Le site Jean-Luc Lagardère offrait un espace et des possibilités immenses, Airbus a décidé de les exploiter au maximum. Depuis le printemps 2021, l’ancienne usine A380 de l’avionneur européen est en reconversion pour abriter une première ligne d’assemblage final (FAL) dédiée à l’A321neo à Toulouse. Airbus a saisi cette occasion pour en faire une FAL de nouvelle génération, hautement automatisée et plus ergonomique pour alléger la tâche des compagnons qui y travailleront. En marge de la présentation des résultats annuels du groupe le 16 février, l’avionneur a ouvert les portes de cette usine et présenté les innovations qu’elle abrite.
Si elle est encore loin d’être pleinement opérationnelle, cette FAL a accueilli sa première cellule A321 en octobre dernier et en abrite deux aujourd’hui, toujours en station 42 (où sont installés les monuments cabine qui ne rentrent pas dans le fuselage une fois que les deux tronçons sont assemblés, comme les cuisines ou les cabinets de toilette). Avec la prochaine qui arrivera, elles permettront de tester les systèmes automatisés, les différentes innovations et les nouveaux processus qui ont été mis en place, afin de les rendre plus matures et de permettre une augmentation très rapide des cadences de production par la suite. Ces trois cellules passeront ainsi environ un an sur la ligne d’assemblage quand il faut en moyenne huit semaines pour assembler un A321 sur une ligne de production rôdée. Le roll-out du premier appareil est en effet prévu pour la fin de l’année.
Une logistique automatisée
L’une des grandes innovations de la FAL A321 de Toulouse est le recours à l’automatisation de tout le système logistique. Elle sera à terme équipée de 24 véhicules à guidage automatique (AGV), qui officieront des stations 42/43 (où arrivent les tronçons) aux stations 25 (où sont installés les équipements cabine et où ont lieu de premiers essais système). En fonction des besoins immédiats des compagnons travaillant sur un avion, une mission est créée numériquement qui amène le système logistique à sélectionner le chariot automatique qui convient pour apporter les pièces nécessaires sur le poste de travail, à récupérer ces pièces dans le magasin central de stockage et à les apporter jusqu’au compagnon en les déposant par une porte écluse.
Ce type de véhicule automatisé permettra de limiter les pertes de temps liées au déplacement des compagnons. Image © Hervé Goussé / Airbus
De même, l’usine se veut 0 papier. Les collaborateurs seront équipés de tablettes et de téléphones société sécurisés sur lesquels ils pourront commander les pièces et outils dont ils ont besoin, consulter les plans avions et valider les étapes d’assemblage.
Une volonté de rendre l’usine plus ergonomique
Avec le système logistique automatisé, Airbus compte gagner du temps mais aussi économiser des déplacements trop nombreux à ses compagnons. Plusieurs améliorations de ce type ont été apportées après consultation des personnels des autres lignes d’assemblage. Airbus met notamment en avant la nouvelle organisation de l’espace de travail au niveau des stations 25 de finition cabine (un espace qui compte trois postes classiques et un poste allégé pour les aménagements complexes, qui concernent particulièrement l’A321 par rapport aux autres appareils de la famille). L’espace du site Jean-Luc Lagardère le permettant, chacun de ces postes comprend une plateforme couverte et surtout surélevée au niveau de la cabine, qui permet de stocker les fauteuils à la hauteur de l’avion, donc au niveau où ils seront installés. C’est une première dans une FAL Airbus. Cela améliorera la sécurité et allègera la charge de travail, évitant les allers-retours du personnel dans les escaliers. Chaque poste de la station 25 sera par ailleurs doté de son propre magasin de pièces, une décentralisation qui limitera aussi les déplacements.
L’un des postes de la station 25, principalement chargée de la finition cabine. Image © Hervé Goussé / Airbus
Une autre décision a été prise pour améliorer le quotidien des collaborateurs d’Airbus sur cette ligne d’assemblage A321 : la création d’une station 37 entre les stations 40 et 30, chargée de terminer le travail de jonction aile-fuselage, d’installer les dérives et d’avancer dans l’installation de systèmes. A Hambourg, ces fonctions sont accomplies sur la station 40. La création d’une station intermédiaire a permis de ne garder que deux shifts (des équipes qui se relaient deux fois huit heures) au lieu de trois pour un meilleur équilibre vie personnelle – vie professionnelle.
Adoption et amélioration du FlexTrack utilisé à Saint-Nazaire
Toujours pour améliorer les conditions de travail, Airbus a décidé de reprendre le système de perçage automatisé utilisé dans les usines de Saint-Nazaire, FlexTrack, pour les jonctions entre deux parties de fuselage. Il a été amélioré pour intégrer des têtes de perçage électriques et non plus pneumatiques, et supprime la partie la plus pénible du travail de fixation – le rivetage est lui toujours réalisé à la main, car les têtes auraient été trop imposantes. Airbus, peu disert sur les bénéfices en termes de productivité que toutes ces innovations doivent apporter, estime que le gain en temps sur cette action n’est pas significatif mais qu’il gagnera beaucoup en qualité.
L’avionneur souligne par ailleurs que tous les équipements, systèmes et processus de la FAL A321 ont été certifiées par l’agence européenne de la sécurité aérienne (EASA). Il précise également qu’il s’est concentré sur des innovations qui ont déjà été éprouvées car il est nécessaire pour lui de progresser le plus vite possible vers une production efficace. L’objectif est que l’installation fonctionne à ses pleines capacités en 2025. Mais en parallèle, Airbus n’oublie pas ses autres lignes A320 et étudie déjà la possibilité d’y intégrer certaines innovations.
Le premier A321 de la nouvelle ligne d’assemblage final à Toulouse se trouve à la station 42. Image © Hervé Goussé / Airbus