La poursuite de la reprise dans un monde très complexe, voilà ce à quoi s’attend le GIFAS pour 2023. A l’occasion de la présentation des voeux du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales, son président Guillaume Faury s’est montré optimiste sur la capacité de l’industrie de continuer à se redresser, tout en restant conscient des grandes difficultés auxquelles elle est confrontée : conséquences de la guerre en Ukraine, tensions entre les blocs, inflation, incertitudes dans la crise énergétique, difficultés de la chaîne de valeur, pénurie de matières premières, de composants, de talents…
Alors que le transport aérien est passé d’une crise de la demande en 2020 et 2021 à une crise de l’offre en 2022, les compagnies aériennes devraient dans l’ensemble pouvoir reconstruire leur bilan plus rapidement que prévu, estime Guillaume Faury. Dans le secteur de la défense, le conflit en Ukraine a mis en avant le besoin de souveraineté des Etats et de l’Europe et la nécessité de planifier le moyen et le long-terme, tout en répondant aux enjeux immédiats. Cependant, si les entreprises ayant une production dans le secteur militaire sont globalement mieux considérées depuis février 2022, il reste encore beaucoup de travail pour attirer les investissements vers elles. Par ailleurs, la chaîne de valeur industrielle a de grandes difficultés à répondre à la reprise de la production et la croissance des livraisons en raison des diverses pénuries.
L’une des plus préoccupantes est celle de personnel, dans tous les secteurs et dans tous les métiers. Clémentine Gallet, présidente du comité Aero-PME, indique que les entreprises membres du GIFAS auront de nouveau besoin de recruter entre 15 000 et 16 000 personnes en 2023, avec des besoins particulièrement importants du côté des PME puisque les grands groupes ont déjà couvert une partie des leurs. Elle souligne que les PME ont perdu beaucoup de compétences durant la crise et qu’elles ont du mal à mettre en avant leurs atouts.
Enfin, Guillaume Faury a évoqué un changement qui est en train de s’opérer dans les scénarios de production. « Nous étions avant la covid dans un monde très optimisé par rapport à un scénario stable et nous sommes passés en trois ans sur un scénario un petit peu moins optimisé mais beaucoup plus résilient par rapport à des événements de nature imprévue », ce qui affecte durablement la façon de mener les opérations, de choisir les fournisseurs et d’assurer la logistique. L’objectif est de pouvoir continuer à opérer en cas d’événement imprévu ou de décisions unilatérales d’Etats ou de blocs. Cela ne remet pas en cause la globalisation de la production mais cette réduction de l’exposition au risque entraîne une forme de régionalisation, « nous globalisons différemment ».
En revanche, d’autres mouvements pourraient se produire en raison de la crise énergétique. Les différences entre les régions sur le prix de l’énergie, si ceux en Europe se maintiennent au niveau très élevés auquel ils sont actuellement, va imposer des décisions aux sociétés les plus exposées, les plus énergivores. « Il y a un risque de délocalisation des activités à très forte intensité énergétique ». Il est donc essentiel de retrouver de la visibilité sur les tarifs à moyen et long terme de l’énergie en Europe. « Nous pouvons absorber les surcoûts à court terme et éviter des réindustrialisations à l’étranger, mais si nous sommes dans une situation dans laquelle le prix de l’énergie sera beaucoup plus élevé à moyen et long terme, alors les entreprises devront prendre des décisions. »