Les deux futurs lanceurs de l’US Air Force seront connus en 2020. Le Space and Missile Systems Center, en partenariat avec l’agence de renseignement National Reconnaissance Office (NRO), vient de publier un appel d’offres en ce sens, le 3 mai. Il formalise ainsi le lancement de la Phase 2 du programme National Security Space Launch (NSSL), connu il y a encore peu sous le nom d’Evolved Expendable Launch Vehicle (EELV). Il doit amener au remplacement des actuels lanceurs moyens et lourds Atlas V et Delta IV de United Launch Alliance (ULA), développés dans les années 1990 pour la phase initiale du programme EELV.
Cet appel d’offres doit rendre son verdict en septembre 2020. Il déterminera deux vainqueurs, qui recevront par la suite plusieurs contrats annuels entre 2020 et 2024 de la part de l’US Air Force et du NRO, pour des lancements militaires – avec une charge utile possiblement classifiée – jusqu’en 2027. Le magazine américain spécialisé SpaceNews parle d’un potentiel d’environ 25 lancements contractualisés sur cinq ans, pour un montant de près d’un milliard de dollars par an. Cette activité sera répartie à hauteur de 60% pour le premier candidat sélectionné et de 40% pour le second.
Quatre candidatures attendues
Le Space and Missile Systems Center a déclaré que cet appel d’offres serait « une compétition entière et ouverte » et que toutes les candidatures seraient donc étudiées. Celles-ci pourront être déposées jusqu’au 1er août. Le nombre de compétiteurs devrait néanmoins se limiter à quatre : ULA, Northrop Grumman, Blue Origin et SpaceX.
En octobre dernier, l’US Air Force avait accordé trois contrats de R&D pour le développement de prototypes de systèmes de lancement d’ici 2024 dans le cadre de ce qui s’appelait encore le programme EELV. ULA – par l’intermédiaire de sa filiale United Launch Services – devait ainsi recevoir 967 millions de dollars pour le développement de son lanceur Vulcan Centaur, tandis que Northrop Grumman Innovation Systems s’était vu attribué 792 millions de dollars pour son OmegA et que Blue Origin se contentait de 500 millions de dollars pour son lanceur New Glenn.
SpaceX n’a pas bénéficié d’un tel contrat, mais ses lanceurs Falcon 9 and Falcon Heavy ont été qualifiés par l’US Air Force. La firme d’Elon Musl s’est ainsi vue confier neuf lancements au cours des deux dernières années au titre du programme EELV, dont le premier a eu lieu en décembre 2018 avec la mise en orbite d’un satellite GPS III par un Falcon 9. Le premier tir d’un Falcon Heavy dans ce cadre est attendu pour juin prochain.
Le New Glenn devrait prendre part à la compétition. © Blue Origin
New Space chez les militaires
Cette arrivée de SpaceX a permis de casser le monopole d’ULA, effectif depuis le rapprochement de Boeing et Lockheed Martin depuis 2006 au sein de cette coentreprise. En effet, avant cette date, les deux partenaires étaient concurrents avec le Delta IV pour le groupe de Chicago et l’Altlas V pour celui de Bethesda.
Cette Phase 2 du NSSL doit confirmer la fin de cette hégémonie d’ULA, et surtout permettre aux militaires américains de pérenniser leur accès indépendant à l’espace. Ils sont pour l’instant encore en partie dépendants du moteur RD-180 de la société d’Etat russe NPO Energomash, qui équipe l’Atlas V ainsi que plusieurs autres lanceurs américains. Cette situation avait d’ailleurs conduit le Congrès des Etats-Unis à prendre une directive en 2014, pour interdire au Département de la Défense (DoD) de passer contrat avec un lanceur équipé de ce moteur après 2022. A priori, grâce au NSSL, cela ne posera pas de problème.