Dans la lignée des autres grands industriels aéronautiques français, Dassault Aviation publie des résultats en hausse en 2018, qu’il s’agisse du volume d’affaires ou de la rentabilité. Les chiffres, présentés le 28 février, sont ainsi positifs essentiellement grâce à la défense. Mais qu’il s’agisse du domaine militaire ou civil, l’activité s’avère tirée par l’export.
Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, a débuté sa présentation en rappelant l’environnement instable dans lequel son groupe évoluait, citant tour à tour les difficultés pour construire l’Europe de la défense ou les incertitudes économiques. Pourtant, force est de constater qu’il a présenté des résultats largement positifs.
Le chiffre d’affaires est en croissance de 4% par rapport à 2017, et atteint 5,1 milliards d’euros sur l’année. La progression de la rentabilité est somme toute plus impressionnante, avec une hausse de 87% du résultat opérationnel ajusté. Il atteint ainsi 669 millions d’euros, ce qui représente une marge opérationnelle de 13,2% (+5,9 points). Le résultat net ajusté suit, à 681 millions (+66%).
L’apport de Safran
Ces chiffres sont néanmoins dopés par l’encaissement des 241 millions d’euros d’indemnités payés par Safran au titre des retards du moteur Silvercrest qui ont conduit à l’annulation du Falcon 5X fin 2017. Sans cela, Dassault Aviation estime que sa marge opérationnelle aurait tout de même été de 9,2%.
Le niveau modéré de R&D autofinancée actuel – dû entre autres au gel puis à l’abandon du programme Falcon 5X – a aussi contribué à cette bonne rentabilité. Ce budget était de 392 millions d’euros en 2018, soit 7,7% du chiffre d’affaires.
Dassault est néanmoins dans une phase de remontée en puissance à ce niveau avec une hausse de 25% par rapport à 2017 et 34% par rapport à 2016. Cela devrait se poursuivre avec en 2019 avec le Falcon 6X et du futur Falcon – autour duquel Eric Trappier maintient le mystère – mais aussi les travaux inhérents au développement du Rafale F4 et du SCAF (même si ceux-ci font l’objet de contrats étatiques).
Une des principales satisfactions de l’année est à mettre au crédit des prises de commandes, avec une croissance de 53%. Portées par les Rafale à l’export, elles atteignent à 5 milliards d’euros. Cela permet de préserver le carnet de commandes du constructeur français, qui a été évalué à 19,4 milliards d’euros au 31 décembre dernier (-0,4%).
Les Falcon encore fragiles
Derrière ces chiffres, la situation des Falcon reste tout de même compliquée. Dassault Aviation est certes fidèle à ses objectifs avec la livraison de 41 appareils (un de plus que prévu), mais cela constitue tout de même une baisse significative au regard des 49 avions de 2017. Le chiffre d’affaires de la branche civile diminue donc logiquement de 15%, pour se situer à 2,6 milliards d’euros.
Avec 42 commandes nettes de Falcon – 52 ventes moins l’annulation des dix derniers Falcon 5X – Dassault fait mieux qu’en 2017 (41 ventes et trois annulations) et préserve son carnet. Le constructeur dispose ainsi d’une réserve de 53 appareils, soit un de plus que fin 2017, mais pour une valeur en baisse à 2,2 milliards d’euros (-12%). Bien que le détail des appareils ne soit pas communiqué, cela laisse entendre que les commandes ont été portées par des appareils plus petits (Falcon 2000 ou 900) que lors des années précédentes.
Eric Trappier évoque un marché plus dynamique, porté par la bonne santé de l’économie américaine et la fluidification du marché de l’occasion, mais estime que l’aviation d’affaires se trouve encore dans une phase de plateau. La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine ou les incertitudes sur la poursuite de la croissance mondiale, facteur capital dans l’aviation d’affaires, le poussent à la prudence. Il vise donc une légère augmentation des livraisons en 2019, à 45 appareils.
Une solide défense
Les exportations successives du Rafale ont contribué à redonner de la vigueur à l’activité Défense de Dassault Aviation, puisque son chiffre d’affaires s’élève à 2,5 milliards d’euros pour l’année 2018 (contre 1,9 milliard en 2017) – soit quasiment la moitié du chiffres d’affaires global, qui culmine à 5,1 milliards d’euros. Les prises de commandes sont également en hausse et atteignent 2,7 milliards d’euros pour l’année passée, portées notamment par la levée de l’option pour 12 Rafale supplémentaires pour le Qatar, ainsi que la notification du standard F4. Quant au carnet de commandes, il est évidemment porté par les contrats exports, qui le porte à 14,2 milliards d’euros, en légère augmentation par rapport à 2017 (13,9 milliards d’euros). Le carnet de commande Défense France est en très légère baisse, passant ainsi de 3,04 milliards d’euros en 2017 à 3,01 milliards d’euros pour l’année 2018.
Parmi les perspectives de l’année à venir, Dassault prévoit de livrer 26 Rafale – uniquement à l’export, les livraisons pour les forces armées françaises étant stoppées jusqu’en 2022. L’année a débuté par la première livraison au Qatar, début février, l’Inde va quant à elle réceptionner son premier avion en septembre prochain, conformément au calendrier. Toujours concernant le Rafale, l’avionneur devrait démarrer les travaux de développement du standard F4 et vise la finalisation du « nouveau contrat de MCO » pour la France, dans la lignée du plan de transformation du MCO aéronautique lancé fin 2017 par la ministre des Armées Florence Parly.
Enfin, les volontés politiques du système de combat aérien futur devraient se concrétiser davantage lors du prochain Salon aéronautique du Bourget (en juin prochain), lors duquel sont attendues les notifications de contrats d’étude pour les démonstrateurs du moteur et de l’aéronef. Enfin, l’avionneur doit également livrer le premier Atlantique 2 rénové et indique « poursuivre les travaux en vue de la commande de Falcon de surveillance maritime et CUGE (Charge universelle de guerre électronique, NDLR) » pour la France.