Le Journal de l’Aviation a récemment visité le nouveau site de Safran Aircraft Engine Services Brussels (SAESB) situé au nord de la plateforme aéroportuaire de Bruxelles, un atelier de maintenance de 8 500 m2 dédié aux LEAP-1A (famille Airbus A320neo) et LEAP 1-B (famille Boeing 737 MAX) qui a été inauguré le 11 juin dernier. SAESB avait d’ailleurs été précurseur dans la MRO du successeur du CFM56, en étant le tout premier atelier certifié pour la maintenance du LEAP-1A au monde en 2016, année de la mise en service du 1er A320neo motorisé par ce type de moteurs. SAESB fait ainsi partie intégrante du réseau de shops LSO (opérations sur site et sous l’aile) de Safran Aircraft Engines, l’activité de soutien la plus directement en prise avec les opérateurs pour faire voler leurs avions.
Un shop dédié aux interventions légères
La nouvelle installation de SAESB réalise des « shop visits » dites légères, c’est-à-dire des opérations en « quick turn ». Le nom est un peu trompeur car il s’agit bien du fruit d’une dépose, avec une durée d’intervention légèrement supérieure à 100 jours aujourd’hui (Safran a pour objectif de descendre en dessous des 100 jours à court terme, avec une ambition qui sera comparable à ce qui se fait de mieux sur les CFM56). Il n’est donc pas question ici d’interventions plus lourdes comme celle de la restauration complète des performances du moteur (PRSV) mais plutôt de visites plus ciblées, par exemple pour venir remplacer certaines pièces des parties chaudes d’un moteur avant une intervention plus complète quelques années plus tard.
Le site est calibré pour réaliser jusqu’à 120 interventions par an, l’équivalent d’un dixième des capacités prévues par le motoriste d’ici quatre ans (lire l’Édito : La maintenance des moteurs LEAP change véritablement de dimension chez Safran Aircraft Engines).
Un LEAP-1A en démontage, sans son module Core. © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
Le site était d’ailleurs plein lors de notre visite, avec 28 moteurs LEAP (très majoritairement des LEAP-1A) à différentes étapes du processus de révision, voire même prêts à repartir aux essais (SAESB ne dispose pas d’un banc de test moteurs et fait appel à celui de Safran Test Cells situé près de Liège).
L’atelier comprend ainsi deux postes dédiés à l’accueil des moteurs et aux inspections boroscopiques pour les parties tournantes, puis de 8 alvéoles de démontage (et de 8 alvéoles dédiées au remontage pour le processus inverse) des principaux modules des moteurs une fois l’induction lancée (séparation de la soufflante et du module LPT, puis séparation du module Core). Il s’agit là de l’une des phases critiques du processus d’inspection puisque c’est le moment où un maximum de personnes travaille en même temps sur le moteur. Vient ensuite l’étape du démontage plus poussé de certains modules et équipements du moteur dans un espace dédié qui vient ainsi libérer les alvéoles principales, avec le stockage des pièces dans une zone logistique attenante, le transfert de pièces vers différents sites de réparation dédiés, le nettoyage de certaines parties du moteur…
Différents modules FAN de LEAP en cours de désassemblage. © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
L’atelier de SAESB dispose d’ailleurs d’une ligne de nettoyage automatisée avec 14 bains pour traiter les pièces contaminées par les oxydes de carbone, une opération qui facilitera les inspections visuelles et non-destructives. Elle bénéficie de tout un système de traitement des eaux pour éviter tout rejet dans la nature. Le site accueille aussi une cabine de peinture capable d’intervenir sur un moteur complet ou sur un module Fan, un équipement qui permet d’intervenir par exemple sur des traitements de protection, sur le revêtement des aubes de soufflante, le tout dans un environnement entièrement contrôlé (température, humidité, poussière).
Un modèle d’atelier qui se multipliera dans tout le réseau de soutien du LEAP
Évidemment, l’aspect RSE du nouvel atelier MRO de Safran n’a pas été oublié avec une installation totalement neutre en termes d’émission carbone grâce, notamment, à utilisation de plus de 800 panneaux solaires sur le toit, d’une efficacité énergétique optimisée (éclairage le plus naturel possible en journée, système de pompes à chaleur pour le chauffage et la climatisation…
Mais le nouveau site de SAESB préfigure aussi sur bien des aspects ce qui sera mis en place dans les futures installations MRO de Safran Aircraft Engines à travers le monde, par exemple pour ses futurs sites d’Hyderabad (Inde), de Casablanca (Maroc) et du deuxième site de Querétaro (Mexique). L’architecture de l’atelier pourra ainsi servir de modèle au niveau des différentes étapes du processus de révision des moteurs, même si les capacités de ces futurs sites diffèrent quelque peu.
La ligne de nettoyage automatisée de pièces. © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
Cet aspect similarité sera d’ailleurs un avantage sur le plan de la formation des futurs techniciens de maintenance qui devront rejoindre rapidement les différents sites MRO du motoriste et assurer la montée en cadence des besoins des LEAP d’ici 2028. On nous confie même que l’un des cinq partenaires « Premier MRO » de CFM International sur le LEAP (licencié CBSA) s’est grandement inspiré du nouvel atelier de SAESB pour concevoir ses propres installations.
Et à cela pourront s’ajouter certaines innovations technologiques découlant directement de l’usine 4.0 pour optimiser le cadencement des opérations de maintenance, à l’instar du chariot mobile « Beetle » qui se généralisera peut-être un jour dans tous les ateliers MRO du LEAP, un peu comme la Pulse Line du LEAP pour l’assemblage des moteurs neufs.
La cabine de peinture. © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
Une nouvelle extension pour intervenir sur les modules en 2027
Mais le site de SAESB va aussi bientôt pousser ses murs pour accueillir une « module factory », une nouvelle installation de quelque 11 900 m2 qui sera dédiée aux interventions plus lourdes sur les modules des moteurs et qui viendra ainsi soulager d’autres centres de maintenance du réseau MRO du LEAP. La nouvelle extension offrira aussi plus de 3000 m2 de surface de bureaux supplémentaires.
L’idée est de pouvoir traiter entre 1200 et 1500 modules par an directement sur le site, des modules en provenance de moteurs déjà pris en charge à Bruxelles, mais aussi en France et peut-être même ailleurs.
Le nouveau site de SAESB pourra ainsi intervenir plus rapidement sur des activités plus complexes et reprendre la totalité de l’activité modules qui est aujourd’hui réalisée dans son bâtiment historique de Zaventem (Building 24B).
Un accord a ainsi été signé avec Brussels Airport, le gestionnaire de l’aéroport de Bruxelles, en vue du démarrage de la construction du futur bâtiment adjacent début 2026, sur un terrain actuellement déjà occupé. Ce nouveau bâtiment viendra même un peu mordre sur l’emprise aéroportuaire actuelle même s’il ne disposera pas d’accès « air side ». Il viendra par contre renforcer toute l’activité dédiée à la MRO et à la logistique qui se développent au nord de l’aéroport, avec par exemple la construction prochaine de nouveaux hangars de maintenance pour monocouloirs et pour gros-porteurs.
La « module factory » devrait être opérationnelle le 1er août 2027, SAESB regroupant alors sur un même site son activité de maintenance LSO et son activité modules.
Le chariot mobile Beetle. © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés