Il n’y a pas de petites victoires. Lockheed Martin célèbre donc les 100 000 heures de vol du F-35. Le constructeur américain en profite pour faire le point sur le développement de son avion de combat, dont les retards et les surcoûts font couler toujours autant d’encre. Cela ne l’empêche pas d’affirmer que la phase de développement et de démonstration du système (SDD) est « on track ».
Pour Jeff Babione, vice-président exécutif de Lockheed Martin et directeur général du programme F-35, « la barre des 100 000 heures indique un niveau significatif de maturité pour le programme et le système d’armes F-35. » Il se montre tout aussi confiant pour les prochaines étapes : « nous sommes bien placés pour achever l’avion au standard 3F complet et le développement logiciel du système de mission d’ici la fin de 2017. » Les forces armées américaines ont d’ailleurs déjà passé un contrat à Lockheed Martin, en avril dernier, pour la livraison de 567 kits de modification d’ici 2021. Ils permettront un rétrofit des appareils déjà produits. Ce nouveau standard doit néanmoins encore être validé.
Bond en avant espéré
L’arrivée du Block 3F doit permettre au F-35 de passer, enfin, à un standard pleinement opérationnel. L’avion atteindra alors son développement logiciel complet, avec l’ensemble de ses capacités de combat. Il doit permettre à l’avion de délivrer l’ensemble de son panel de munitions air-air et air-sol, qu’il s’agisse d’AIM-9X, de JDAM, de tirs au canon, etc. Le F-35 disposera d’une liaison de données complète (Liaison 16 et Liaison de données avancée multifonction), indispensable pour lui permettre une véritable interopérabilité : l’avion peut par exemple recevoir des données sur une cible envoyées par un autre avion plutôt que d’allumer son radar et ainsi préserver sa furtivité. Quant au développement logiciel du système de missions, il sera lui complété à 98 %.
L’ensemble de ces fonctionnalités n’est pas encore effectif avec le Block 3I actuel. Celui-ci intègre un système de combat développé à seulement 89 %, avec des capacités réduites. Malgré cela, l’U.S. Air Force a déclaré la capacité opérationnelle initiale (IOC) des F-35A avec ce standard, en août 2016. L’U.S. Marine Corps avait agi de manière encore plus prématurée en validant l’IOC du F-35B dès juillet 2015, alors que l’avion était encore au Block 2B (87 % de développement).
Outre la validation du Block 3F, Lockheed Martin et les unités opérationnelles chargées de la mise au point de l’appareil doivent encore poser un certain nombre de jalons : tests de décollage sur tremplin et d’opérations sur piste rudimentaire du F-35B (version à décollage court et atterrissage vertical), essais de charge à haute vitesse pour les F-35B et C, et achèvement des tests de précision pour le tir de divers armements.
Avancées réalisées
Ce travail vient s’ajouter à celui réalisé lors des derniers mois. Lockheed Martin a fini par défricher l’ensemble de l’enveloppe de vol du F-35A, poussant apparemment l’avion aux limites de ses capacités sous forts facteurs de charge. Le constructeur n’a pas précisé si son avion pouvait désormais encaisser 9G (comme la plupart des avions de combat), où s’il était toujours limité à 7G.
Les essais de précision pour le tir des armements britanniques AIM-132 ASRAAM et Paveway IV ont aussi été achevés, tout comme 45 des 50 tests similaires prévus. C’est le cas notamment pour les tirs avec le canon interne ou monté sur pod.
Les prochaines étapes sont le développement et l’intégration du Block 4, qui verra le parachèvement du système de missions. Celui-ci pourrait arriver autour de 2021, la Cour des comptes américaine (GAO) souhaitant que le Block 3F soit développé en priorité avant de penser au standard suivant. Lockheed Martin devra aussi assurer le passage à la production de série à cadence pleine. Enfin, l’U.S. Navy prépare aussi l’IOC de la version navalisée F-35C pour 2019, avec quelques mois de retard sur l’objectif. Il sera alors temps pour les forces américaines, et étrangères, de commencer à penser à la pleine capacité opérationnelle (FOC) tout en maîtrisant l’inflation galopante des coûts du programme.