C’est un serpent de mer qui refait surface dans les eaux de la Moskova. Annoncée plusieurs fois depuis la chute de l’Union soviétique, la fusion entre MiG et Sukhoi semble cette fois en marche. Selon une interview de Denis Manturov, ministre russe du Commerce et de l’Industrie, à l’agence de presse TASS, les deux frères ennemis ne feront qu’un d’ici 2019. Il confirme les informations données en juin dernier par Yury Slyusar, président de United Aircraft Corporation (UAC ou OAK en russe), le consortium national qui possède la majorité du capital des deux constructeurs russes.
Ce rapprochement s’inscrit dans le plan de transformation d’UAC, présenté en décembre 2015 et lancé un an plus tard. Celui-ci réorganise le consortium et sa trentaine de filiales en une seule entreprise consolidée autour de quatre branches distinctes, une pour chaque type d’avions : civils, militaires, spéciaux et de transport. MiG et Sukhoi seront intégrés dans la division militaire d’UAC, avec un capital commun. Les deux entités dépendront d’une direction unique, tandis que leurs différentes composantes seront amenées à collaborer beaucoup plus étroitement, qu’il s’agisse des bureaux d’études, des moyens de production ou des services après-ventes. Les synergies seront largement recherchées.
Ces marques prestigieuses ne disparaîtront pas pour autant. Elles devraient continuer d’exister à travers le nom des programmes. On continuera donc à parler de Sukhoi Su-57 – désignation militaire du T-50 qui doit arriver dans les forces russes à partir de 2018 ou 2019 – ou encore de MiG-35.
Cette transformation se déroule étape par étape. En décembre dernier, UAC a reçu son certificat de la part des autorités russes pour commercialiser en son nom propre des services de soutien militaire pour les avions Sukhoi, MiG, Iliouchine, Yakovlev et Tupolev, ainsi que des chantiers de modernisation à des clients étrangers. La fusion s’inscrit dans ce processus. D’autres suivront dans les prochaines années. Dans le civil, Sukhoi civil aircraft corporation (SCAC), Irkut ou Iliouchine devraient connaître le même sort. La division Avions de transport est, quant à elle, déjà en vol.
Au-delà de la réorganisation interne, UAC souhaite aussi fortement rééquilibrer son modèle économique. Son chiffre d’affaires dépend aujourd’hui à 80 % de l’activité militaire et donc du bon vouloir de quelques clients étatiques : Russie, Inde et Chine pour l’essentiel. L’objectif est de faire passer la part de la branche Avions civils dans les revenus du groupe de 20 à 45 % d’ici 2035. Pour y arriver, UAC veut s’attribuer 4,5 % du marché mondial des avions neufs d’ici 2025, contre moins de 1 % aujourd’hui. Il espère publier des profits nets la même année puis s’imposer peu à peu comme une entreprise rentable et attractive, et ainsi réduire sa dépendance aux investissements gouvernementaux.