Rencontré à l’occasion de la convention américaine 2017 de la NBAA, Mark Masluch, directeur communications et affaires publiques de Bombardier Avions d’affaires, fait le point sur un marché qui montre des signes positifs et la position très prudente du constructeur canadien.
Comment se porte le marché de l’aviation d’affaires en Europe et en Amérique du Nord ?
Ce sont nos deux marchés principaux. Il y a actuellement plusieurs indices positifs. Tout d’abord une hausse de l’utilisation des avions pendant six mois consécutifs en Europe et dix mois consécutifs en Amérique du Nord. Le marché des appareils d’occasion est en train de se réduire. Enfin, les indicateurs macroéconomiques, comme le PIB ou les cours boursiers, sont en croissance. Ce sont des facteurs positifs pour une reprise des ventes d’avions neufs.
Pourquoi diminuer vos livraisons sur l’année par rapport à 2016 ?
Jusque-là, tout le monde tirait sur le « backlog » (réserve de commandes, NDR). Cette fois, nous voulons le restaurer. On ne commence pas à produire plus en prévision de la reprise des ventes. Notre « book-to-bill ratio » (rapport entre les commandes et les livraisons, NDR) commence ainsi à remonter vers 1. Notre backlog reste tout de même le plus gros de l’industrie avec environ 14 Md$ de commandes en réserve.
Nous avons l’approche la plus agressive du marché en ce qui concerne la réduction du nombre d’avions produits. Nous avons largement diminué nos cadences. 135 avions seront produits cette année contre environ 300 il y a trois ans. Nous nous sommes alignés par rapport au déclin du marché. Cela nous permet de préserver le prix de vente des avions neufs comme anciens. Nous tenons à être responsables en la matière.
Nous avons pu ainsi faire remonter nos marges de 4 % en 2015 à 6 % en 2016. Pour cette année, nous visons 8 % de marge. En 2015, notre plus gros ajustement avait été de réduire les cadences de Global 5000 et 6000. Cela nous a permis de garantir la valeur des avions. Cette fois, le Learjet sera le plus touché avec seulement un avion produit par mois.
Quelles sont vos prévisions à moyen terme ?
Pour les prochaines années, nous restons prudents même s’il y a de plus en plus de signes d’optimisme. Nous voulons trouver une stabilité pour la production, mais être capables d’augmenter les cadences si nécessaires et, par exemple, livrer un Challenger en moins d’un an.
Sur les trois prochaines années, le Global 7000 va venir gonfler les chiffres en s’ajoutant aux ventes de Global 5000 et 6000. Nous voulons aussi conserver nos parts de marché sur le segment du Challenger 350, qui est l’un des avions les plus vendus sur les dix dernières années. Notre nombre de livraisons sera divisé entre un tiers de petits avions, un tiers de jets de moyenne gamme, et un tiers d’appareils haut de gamme.
Nous avons ainsi un objectif de 10 Md$ de chiffre d’affaires sur les ventes en 2020, avec la pleine production du Global 7000, ainsi qu’une croissance de nos revenus sur les services après-vente. Pour ces derniers, nous visons une croissance de 50 %, en capturant des parts de marché sur notre propre flotte. Nous avons aussi restructuré l’équipe qui gère les avions d’occasion. Nous sommes même capables de générer des profits sur ce domaine.
Entre les crises successives et les difficultés du CSeries, avez-vous encore des capacités d’investissement pour de nouveaux modèles d’avions ? Qu’en est-il du Global 8000 ?
Nous avons toujours des projets en cours pour garantir nos parts de marché, mais nous concentrons nos investissements sur les services après-vente, avec notre nouvelle offre Smart Services, et les améliorations pour les avions en service. Nous voulons un rafraichissement continu de nos programmes. Nous avons présenté la nouvelle cabine Premier pour les Global 5000 et 6000, héritée du Global 7000, et nous proposons désormais le système de connectivité 4G de Gogo sur Challenger.
Les commandes à court terme sont centrées sur le Global 7000, nous avons du temps pour le Global 8000. Nous allons recalculer le calendrier une fois qu’on aura fini d’avancer avec le Global 7000, qui doit entrer en service au second semestre 2018
Nous travaillons également sur l’amélioration de notre démarche de production « Lean ». La numérisation nous permet de nous améliorer vite et de proposer des prix compétitifs.
Craignez-vous d’être touchés par les surtaxes américaines mises en place sur le CSeries ?
Nous suivons le conflit avec Boeing, mais nous ne sommes pas affectés. Nous désamorçons juste les possibles confusions avec les clients.