En plein développement, le H160 est au coeur de toutes les attentions chez Airbus Helicopters. Il faut dire que l’appareil doit permettre au constructeur européen d’étalonner ses futures méthodes de conception, de production et de soutien qui seront constitutives de la « H generation ». Il représente aussi le nouvel espoir d’Airbus Helicopters pour contre-attaquer et signer son retour au premier plan sur le segment des hélicoptères moyens. A l’occasion d’une visite organisée avec l’Association des journalistes professionnelles de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE), Bernard Fujarski, vice-président en charge du programme, fait le point sur les avancées du H160.
Airbus Helicopters semble pour l’instant satisfait de l’avancement du programme. Celui-ci devrait néanmoins accuser un peu de retard sur le calendrier initial, dévoilé lors du lancement du H160 en 2015, qui prévoyait une entrée en service en 2018. Elle ne devrait intervenir finalement qu’en 2019. Cela ne remet pas en cause la volonté de l’hélicoptériste d’assurer le plus au niveau de maturité au moment de l’entrée en service, avec trois axes de travail parallèles : le développement de l’hélicoptère en lui-même, de la production industrielle et du soutien.
Pas moins de 68 brevets ont été déposés pour le H160, dont les pales Blue Edge. © Léo Barnier / Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
La certification se prépare
Sur ce premier axe, Airbus Helicopters a pu cocher plusieurs cases importantes en vue de la certification. La flotte d’essais compte désormais trois prototypes, dont le dernier vole depuis le 13 octobre. Elle a accumulé plus de 555 heures de vol. « C’est la moitié du total prévu », explique Bernard Fujarski. Ces trois prototypes seront rejoints par un appareil représentatif de la série l’an prochain. Il sera utilisé pendant un an pour la mise au point de certaines configurations et préparer au mieux les premières livraisons de l’appareil. Le constructeur s’appuie également sur un « helicopter zero » pour tester tous les systèmes et faisceaux électriques à échelle réelle, ainsi que sur un « dynamic helicopter zero » pour les ensembles dynamiques et les systèmes de puissance.
Au cours de l’année, le H160 est parti au Canada pour ses essais temps froid, où il a affronté des températures de -40°C, avec notamment des tests d’imprégnation qui consiste à faire « dormir » la machine dehors avant de la démarrer. Ces essais seront complétés par des vols dans un environnement neigeux dense. Le premier prototype se tient actuellement prêt à partir dans les Alpes dès que la météo sera (dé)favorable. Les essais par temps chaud attendront l’an prochain, avec probablement une campagne menée aux États-Unis. Airbus Helicopters a tout de même pu commencer à tester son appareil dans ce domaine, à la faveur des températures particulièrement chaudes (40°C) rencontrées cet été en France. Le constructeur a aussi réalisé les tests de résistance des équipements et des systèmes aux effets indirects de la foudre (LIE).
Tous ces tests ouvrent la voie aux essais de certification qui seront lancés l’an prochain, avec les autorités européennes (EASA) et américaines (FAA). Le programme sera chargé avec des vols de performances, la mise au point des procédures de décollage et d’atterrissage, les simulations de pannes, etc. Par ailleurs, Safran Helicopter Engines travaille sur la certification de son moteur Arrano 1A, prévue à fin 2018.
Legende. Le H160 a réalisé ses essais temps froid en début d’année, au Canada. © Airbus Helicopters – J. Deulin
La production va s’industrialiser
En parallèle, Airbus Helicopters travaille donc sur son outil et ses méthodes de production. Pour l’instant, le premier appareil de série – comme les onze suivants – est en cours d’assemblage sur un « dock » : tout le travail est réalisé sur un poste fixe. Mais le constructeur prépare l’industrialisation du programme, avec la mise en place d’une première ligne d’assemblage final (FAL) à partir de l’an prochain. La montée en cadence sera progressive pendant trois ans, avec l’implémentation d’une seconde ligne. L’objectif est de produire 40 machines annuelles à l’issue de cette période. A terme, Airbus Helicopters veut pouvoir livrer entre 50 et 55 exemplaires par an.
Le temps de production sera largement réduit par rapport au Dauphin, grâce à une production séquencée. Cette chaîne « taktée » comprendra cinq stations actives plus deux en réserve. La mise en parallèle de certaines tâches ou encore la livraison de sous-ensembles déjà prêts à être assemblés en « plug and play » permettront aussi des gains importants. Cette FAL permettra d’assembler un appareil en 40 jours. Un H160 pourra ainsi être livré 26 semaines après avoir été commandé, contre plus d’un an pour un Dauphin.
Pour l’instant, l’hélicoptériste vérifie et valide le processus industriel numérique et physique. Il met aussi à l’épreuve la stratégie et la géométrie de son outil de production avec des tests « de bout en bout ». Celui-ci a été conçu autour de la maquette numérique (DMU) du H160 avec la volonté de garantir une continuité numérique depuis la conception jusqu’aux opérations.
L’allongement du mât rotor a permis de conférer de très bonnes performances vibratoires au H160. © Léo Barnier / Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
Le soutien n’attend pas
Si la mise en service n’est pas encore pour tout de suite, les équipes dédiées au soutien sont déjà à pied d’oeuvre. Airbus Helicopters a lancé cette année une campagne « operator zero » pour préparer la mise en oeuvre opérationnelle du H160. Celle-ci est menée en coopération avec plusieurs clients, notamment autour de la maintenance. Le réseau de soutien a aussi commencé à être constitué, avec des entités locales, tout comme le programme de maintenance autour de la norme MSG-3. Enfin, un premier manuel de vol électronique a été publié.
L’an prochain, Airbus Helicopters va poursuivre ses campagnes « utilisateur zéro » et une première carte de travail 3D sera publiée pour la maintenance. Enfin, un premier simulateur de vol complet sera mis en service avec Thales.
Des débouchés multiples
Pour l’instant, Airbus Helicopters ne communique pas sur le carnet de commandes de l’appareil, mais Bernard Fujarski assure que celui-ci est « très actif ». « Nous voulons au moins retrouver la part de marché du Dauphin dans ses meilleures années, soit 40 % », poursuit-il. Actuellement, cette part a lourdement chuté et se situe actuellement autour de 6 %.
Pour y arriver, l’appareil sera décliné en plusieurs versions : transport de passagers, SAMU (transport secondaire entre hôpitaux), VIP, offshore. Une version militaire est également à l’étude avec la France dans le cadre du programme HIL (hélicoptère interarmées léger, voir encadré).
La France a sélectionné le H160 pour son programme HIL. Image © Léo Barnier / Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés