Rolls-Royce semble bien décidé à limiter la dérive de son calendrier. Un mois et demi après avoir fait tourner pour la première fois son démonstrateur ALECSys (Système avancé de combustion à émissions basses) dans ses installations de Derby (Royaume-Uni), le motoriste a annoncé qu’il avait commencé les essais par temps froid, le 23 mars. Un enchaînement rapide qui n’est peut-être pas étranger aux quatre ans de retard déjà pris par rapport aux objectifs du programme de recherche européen CleanSky, dont il fait partie.
Ces essais par temps froid se déroulent dans le centre GLACIER (Centre aérospatial mondial pour la recherche sur le givrage et l’environnement) de Thompson (Manitoba), au Canada. Le démonstrateur, monté sur un moteur Trent 1000 (qui équipe habituellement le Boeing 787) spécialement adapté, a pu fonctionner à des températures de l’ordre de -20 °C. Rolls-Royce entend ainsi valider le fait qu’ALECSys peut opérer dans différentes conditions climatiques.
Pour rappel, le but de ce système est de prendre compte les conditions environnementales ainsi que la poussée demandée par le pilote pour optimiser le mélange d’air par rapport au carburant dans la chambre de combustion avant la mise à feu. Le rejet de NOx et d’autres particules pourrait ainsi être réduit par rapport à un mélange riche. Rolls-Royce annonce que les premiers tests montrent une diminution de moitié de ces émissions en régime de croisière, au-delà de son objectif de 30 %.
Andy Geer, ingénieur en chef et directeur des Programmes technologiques de Rolls-Royce, y voit « une nouvelle étape significative pour le programme ALECSys. Nos modèles informatiques nous ont donné une compréhension en profondeur de la façon dont marche le système dans des conditions extrêmes de froid et cette série d’essais valide physiquement cela. »
ALECSys affronte des températures largement négatives au Canada. © Rolls-Royce
Un calendrier oublié
Rolls-Royce commence donc ainsi à valider des technologies et les faire gagner en maturité pour atteindre le TRL 6 (phase de démonstration d’un système), afin de pouvoir créer un système générique intégrable par un industriel dans un moteur de série. Il répond ainsi aux objectifs fixés par SAGE 6 (6e programme du volet Moteur durable et vert) dans le cadre de CleanSky. Mais cette étape aurait déjà dû débuter en 2014 selon le calendrier initial.
Lancé en 2011, SAGE 6 prévoyait de premiers essais d’ALECSys au banc en 2013, puis son installation sur un moteur pour des tests au sol et en vol entre 2014 et 2016. Le niveau de maturité TRL 6 aurait ainsi dû être atteint dès mi-2016 pour l’ensemble des briques technologiques d’ALECSys : chambre de combustion à émissions basses, système de contrôle carburant, mise en place des lois de contrôle, traitement du bruit acoustique, et interface optimisée entre la chambre de combustion et la turbine. Cela n’a été le cas que pour le premier de ces cinq items.
Rolls-Royce n’arrivera donc au terme de SAGE 6 qu’après avoir achevé la campagne d’essais en vol d’ALECSys. Ce chantier, qui n’est jamais anodin, devrait prendre encore de longs mois au motoriste britannique.