Lorsque l’on parle d’avion du futur, on pense rarement à l’aviation régionale et encore moins aux turbopropulseurs, souvent étiquetés comme archaïques par le grand public du fait de leurs hélices. Cela n’empêche pourtant pas les différents acteurs de ce secteur de regarder vers l’avenir. C’est le cas du constructeur ATR et de la compagnie Air New Zealand, qui viennent d’annoncer la signature d’un partenariat le 9 novembre. Ils entendent ainsi « explorer ensemble l’écosystème du futur pour l’aviation régionale ».
L’un des axes de travail principal portera a priori sur l’amélioration de la propulsion, avec notamment l’hybride et l’électrique. Stefan Bortoli, président exécutif d’ATR, en semble convaincu : « En tant que leader du marché, ATR travaille sur les solutions du futur et la technologie des turbopropulseurs y occupe une place essentielle, tout comme les appareils hybrides et électriques ».
Cette vision est partagée par Christopher Luxon, président exécutif d’Air New Zealand : « Les appareils hybrides devraient arriver sur le marché au cours des dix prochaines années. Avec le développement des technologies hybrides et électriques pour les appareils à turbopropulseur de plus grande envergure, nous pensons qu’il pourrait s’agir d’une option viable pour notre réseau régional ».
Le patron de la compagnie néo-zélandaise se propose de tester ces différentes nouvelles technologies au sein de sa flotte, qui comprend actuellement cinquante turbopropulseurs de différentes générations : vingt ATR 72-600, plus neuf en commande, sept ATR 72-500 et le reste de Bombardier Q300. D’où un intérêt prononcé : « Notre flotte régionale génère environ 40 % de nos émissions domestiques, le potentiel d’économies en carbone est donc colossal ».
Construction d’un écosystème
Au-delà de ce travail de R&D sur de nouvelles technologies, les deux partenaires souhaitent surtout préparer leur intégration dans le monde opérationnel, d’où la notion d’écosystème. Parmi les composantes nécessaires pour construire ce futur monde de l’aviation régionale, ils citent les infrastructures aéroportuaires et réglementaires, la maintenance et les opérations au sol et en vol.
Développer un moteur électrique, ou même hybride, ne suffit en effet pas. Cela doit s’accompagner de la construction d’un nouveau cadre réglementaire, l’actuel n’étant pas adapté. Il devra par exemple établir des procédures pour l’assistance aéroportuaire avec la recharge ou le remplacement des batteries des moteurs après un vol : peut-on les déposer alors que l’avion est au contact dans un aéroport ? Quels types de personnels sont habilités à le faire ? Comment acheminer la puissance électrique jusqu’à l’avion ? Autant de questions qui se répètent pour la maintenance.
De même, de nouvelles normes de certification devront aussi être édictées : comment établir la fiabilité d’un moteur électrique ? Quels essais seront nécessaires ? Comment attribuer une qualification ETOPS ?
Il s’agit assurément d’un travail pharaonique qui s’étalera sur plusieurs années. Alors que Bombardier vient d’annoncer la revente de son programme Q400 et ne semble plus enclin à réinvestir dans les turbopropulseurs, il revient donc à ATR d’assurer grandement ce rôle moteur dans les évolutions à venir dans ce secteur. Et ce malgré le manque de concurrence.