Entre l’intégration de Zodiac Aerospace et le passage du CFM56 au LEAP, l’année du groupe Safran a été chargée. Malgré ces nombreuses phases de transition, le groupe français voit l’ensemble de ses secteurs d’activités historiques progresser – moteurs, équipements et défense – ainsi que ses résultats globaux pour l’année 2018. Et il se prépare désormais à entrer dans une nouvelle phase de forts investissements.
« C’est une excellente année 2018 », se félicite Philippe Petitcolin, directeur général de Safran, fort des nombreux indicateurs dans le vert de son bilan financier. Le groupe a ainsi vu son chiffre d’affaires progresser de 32% par rapport à 2017, pour atteindre 21,1 milliards d’euros. Ce résultat est largement dopé par l’apport de Zodiac, comptabilisé sur les dix derniers mois de l’année après la finalisation de son rachat en février 2018. La société, dont les activités ont été intégrées au sein de Safran Aerosystems, Safran Cabin et Safran Seats, a ainsi contribué à hauteur de 3,8 milliards d’euros au chiffre d’affaires du groupe.
La croissance organique (à périmètre constant et hors effet de change) reste néanmoins forte, avec une progression à deux chiffres (+10%). Elle a largement été portée par les activités de propulsion aéronautique et spatiale (+12% à 10,5 milliards d’euros).
Profitabilité en hausse
Le résultat opérationnel courant ajusté – Bernard Delpit, directeur financier, jugeant les données ajustées plus adaptées que les données consolidées pour illustrer la performance financière du groupe – est de 3 milliards d’euros. Cela représente une progression de 38% par rapport à 2017, et de 25% en organique. La contribution de Zodiac est ainsi évaluée à 290 millions d’euros sur dix mois.
Safran affiche ainsi une marge opérationnelle courante de 14,4% (+0,7 point) que Bernard Delpit décrit comme une « performance exceptionnelle ». Seuls les secteurs de la défense et des intérieurs d’avions dénotent avec des marges respectives de 8,5% et 1%. Pour la défense, le directeur financier estime que cette faiblesse est structurelle du fait du fort niveau de R&D dans ces activités, tandis qu’il rappelle que les intérieurs d’avions sont essentiellement le fait des anciennes entités de Zodiac Aerospace, qui affichaient plus de 100 millions d’euros de pertes en 2017 contre un gain de 20 millions l’an passé. « Ce n’est pas suffisant, mais cela va dans la bonne direction », a commenté Philippe Petitcolin.
Seul le résultat net ajusté recule de 17%, à 2 milliards d’euros. Le groupe affiche tout de même un flux de trésorerie disponible en hausse de près d’un quart, à 1,8 milliard d’euros et prévoit une hausse du dividende par action à 1,82 euro, contre 1,6 euro en 2017.
En ce qui concerne les perspectives 2019, Philippe Petitcolin vise une croissance du chiffre d’affaires de 7 à 9% par rapport à l’an passé, avec l’apport de Zodiac sur 12 mois complets. En organique, il estime que la hausse sera de 5%. Le résultat opérationnel courant ajusté devrait afficher une progression « autour de 12 % ».
Zodiac s’intègre
Comme l’illustrent ces résultats, l’un des principaux enjeux de 2018, mais aussi des années à venir, est la fusion des activités de Zodiac au sein de Safran. « L’intégration se passe bien, sans heurts, déclare Philippe Petitcolin. Nous sommes en ligne avec nos objectifs. Nous avons continué à travailler avec Zodiac sur les synergies au niveau des coûts, pour pouvoir jouer sur les effets d’échelles, et sur celles au niveau des équipes fonctionnelles et support. A partir de 2019, nous allons également regarder les synergies autour de ce qui concerne les clients et les business. » Le directeur général a d’ailleurs revu ses prévisions à la hausse : là où il visait 200 millions d’euros de synergies à terme, vers 2021-2022, il estime pouvoir atteindre 250 millions à l’horizon 2022.
En attendant, les anciennes unités de Zodiac continuent de travailler pour redresser la barre, après plusieurs années pendant lesquelles elles ont accumulé les retards et le manque de qualité. Philippe Petitcolin estime que « la clef est de retrouver la confiance de nos clients par des faits. Tant que nous ne l’aurons pas fait, nous n’avons aucune chance de revenir au niveau de performance de Zodiac avant sa crise. Et les faits, c’est de livrer des produits de qualité à l’heure. Cela devrait commencer à porter ses fruits l’année prochaine. » Au niveau des sièges, cela est aussi passé par le remplacement de la direction de Safran Seats GB, qui refusait d’adhérer au modèle opérationnel décidé par Safran.
Le LEAP occupe les premiers rôles
En ce qui concerne la transition du CFM56 vers le LEAP, Philippe Petitcolin estime que « cela se passe très bien ». Safran Aircraft Engines a réalisé une réelle performance sur le LEAP, en passant de 459 moteurs livrés en 2017 à 1 118 en 2018. L’objectif en 2019 est de continuer à augmenter les cadences de 30% chaque trimestre, pour atteindre les 1 800 moteurs sur l’année. Cela ne s’est pas passé sans heurts avec jusqu’à sept semaines de retards, des difficultés résolues pour Airbus mais pas encore pour Boeing.
Safran Aircraft Engines a ainsi largement contribué à la bonne performance des activités propulsion aéronautique et spatiale, alors que Safran Helicopter Engines pâtit toujours de la faiblesse du marché des hélicoptères. Avec plus de 10 milliards d’euros, ces activités représentent la moitié du chiffre d’affaires du groupe malgré l’absorption de Zodiac. Et elles sont largement bénéficiaires avec deux milliards d’euros de résultat opérationnel courant (les deux tiers de celui du groupe) et une marge de 18,5% (+2,3 points par rapport à 2017).
Augmentation des volumes dans la défense
L’activité défense du groupe enregistre un chiffre d’affaires de 1,39 milliard d’euros pour l’année 2018, soit une hausse de 5,3% par rapport à l’année précédente. Cette croissance est de 6,5% sur une base organique. Safran indique que cette hausse « a été tirée par l’augmentation des volumes des systèmes de guidage et de visée, ainsi que de équipements optroniques portables ».
L’année 2019 devrait s’annoncer plutôt profitable pour la branche Défense de Safran, engagée dans la conception du système de combat aérien futur (SCAF). L’industriel a en effet signé une lettre d’intention avec l’allemand MTU Aero Engines début février pour coopérer sur le moteur du SCAF. Un deuxième contrat est attendu lors du prochain Salon aéronautique du Bourget, qui se tiendra du 17 au 23 juin, il s’agira cette fois d’un contrat de développement pour un démonstrateur de moteur, dont les premiers essais sur banc sont attendus à l’horizon 2025-27.