Fort d’une croissance organique soutenue depuis plusieurs années, Thales a pu compter sur l’intégration de Gemalto pour poursuivre sa marche en avant en 2019. Le groupe français, qui a présenté ses résultats le 26 février, progresse sur tous les indicateurs financiers, avec notamment une rentabilité record. Pourtant, il subit quelques déconvenues sur ses marchés historiques de l’Aérospatial et du Transport, qui limitent sa croissance organique.
« L’intégration de Gemalto est en ligne avec notre plan de marche », s’est réjouit Patrice Caine, PDG de Thales, en ouverture la conférence annuelle 2019. Et cette fusion, qui a tout de même coûter 4,8 milliards d’euros, fait du bien sur le plan des résultats. Le groupe ainsi consolidé affiche un chiffre d’affaires en hausse de plus de 16% par rapport à 2018, à 18,4 milliards d’euros.
Objectif prioritaire du plan stratégique Ambition 10 (2013-2021), la hausse de la rentabilité est elle aussi au rendez-vous. Le résultat opérationnel (EBIT) bondit de 19%, toujours sous l’effet de l’intégration Gemalto, et dépasse les 2 milliards d’euros. Cette opération n’a d’ailleurs pas impacté négativement la marge opérationnelle qui progresse de 0,3 point à 10,9%. Le résultat net suit dans les mêmes proportions (+19%) pour atteindre 1,4 milliard d’euros.
Une croissance organique au ralenti
Sans l’apport de Gemalto, la progression de Thales aurait marqué le pas. La croissance organique du chiffre d’affaires n’est ainsi que de 0,8%, légèrement inférieure à la prévision de 1% faite en octobre 2019 et loin des 3 à 4% espérés il y a un an. Cela contraste avec les 4 à 5% de hausse connus depuis 2013.
Ce bilan reflète les difficultés actuelles de la branche aérospatiale, toujours affectée par le fort ralentissement du marché des satellites de télécommunication depuis 2017. Au total, le secteur a vu son chiffre d’affaires baisser de plus de 4% en organique, à 5,6 milliards d’euros. Si la performance opérationnelle reste positive, avec un EBIT de 521 millions d’euros, elle est inférieure de près 11% à celle de 2018. L’activité Transport est également à la peine.
A l’inverse, le secteur Défense & Sécurité affiche un réel dynamisme. Il connaît une progression généralisée de ses activités, qui donne lieu à une hausse organique du chiffre d’affaires de plus de 6%, qui dépasse les 8,2 milliards d’euros. L’EBIT fait un bond de plus de 20% et s’approche des 1,2 milliards d’euros.
Toujours à périmètre constant, Thales aurait tout de même progressé sur le plan de la rentabilité, avec un résultat opérationnel en hausse de 4% et une marge de 10,9% (+0,3 point). Cela reflète notamment les efforts engagés par le groupe depuis 2018 pour améliorer ce secteur, avec un travail sur la compétitivité des fonctions supports, une nouvelle organisation centralisée des achats et une réduction des frais généraux.
Prises de commandes encourageantes
Quoiqu’il en soit, Thales peut compter sur des perspectives solides. Pascal Bouchiat, directeur général Finance et Systèmes d’Information, s’est dit ainsi « ravi des prises de commandes ». Alors qu’il comptait sur un peu plus de 18 milliards d’euros, le groupe a engrangé 19,1 milliards de contrats. Cela représente un ratio commandes/livraisons (« book-to-bill ») de 1,04. Fait remarquable, près de la moitié de ces commandes ont été enregistrées au cours du seul quatrième trimestre, avec 12 contrats majeurs (plus de 100 millions) sur le total de 21 signés en 2019.
Les prises de commandes ont ainsi progressé de 19% par rapport à 2018. Cette croissance se retrouve sur toutes les tailles de contrat, avec une hausse notable des accords de moins de 10 millions d’euros du fait de l’intégration de Gemalto. En variation organique, la croissance globale des commandes aurait tout de même été de 4%.
Là encore, l’activité Défense & Sécurité domine les débats avec plusieurs contrats majeurs, notamment en Europe. Patrice Caine cite entre autres le programme Archange avec Dassault Aviation en France ou les frégates Type 31 avec Babcock au Royaume-Uni. Les commandes tutoient ainsi les 10 milliards d’euros (+16% de croissance totale).
Dans le même temps, l’aérospatial continue de reculer, à 4,8 milliards d’euros (-10%). Le secteur est confronté à un ralentissement du marché des systèmes de divertissement à bord (IFE), pourtant promis à de belles perspectives avec l’intégration progressive de la connectivité à bord, ainsi qu’à la faiblesse du spatial.
Sur ce dernier point, Patrice Caine s’est néanmoins montré optimiste avec une reprise, timide mais réelle, du marché des satellites de télécommunication en 2019. Treize exemplaires ont été vendus dans le monde l’an dernier, dont quatre par Thales. Le groupe a ainsi remporté trois des quatre appels d’offres conclus lors du quatrième trimestre 2019. Le patron de Thales espère que le mouvement se poursuivra en 2020, accompagné d’un développement des opportunités institutionnelles avec la hausse de budget de l’Agence spatiale européenne (ESA).
Fort de ces perspectives, Thales souhaite tenir le rythme avec un chiffre d’affaires de 19 à 19,5 milliards d’euros en 2020, soit 3 à 6% de croissance (pro forma). La performance opérationnelle doit suivre avec une marge de 10,8 à 11%. Enfin, le groupe vise un book-to-bill encore supérieur à 1, afin de soutenir l’accélération de sa croissance prévue à partir de 2021.