Bombardier restera donc un avionneur. Après s’être progressivement mais rapidement désengagé de l’aviation commerciale, le groupe canadien a annoncé le 17 février avoir signé un protocole d’accord avec Alstom pour lui vendre sa division Bombardier Transport, qui développe les produits ferroviaires. Il parie donc sur l’aviation d’affaires pour survivre, comme le laissaient entendre les nombreux investissements consentis ces derniers mois dans ses produits et ses services.
La vente de Bombardier Transport à Alstom devrait être finalisée au premier semestre 2021. Elle se base sur une valeur entreprise de 8,2 milliards de dollars, environ 6 milliards étant détenus par Bombardier et le reste par la Caisse de dépôt et placement du Québec. Une fois divers facteurs pris en compte (notamment le passif de la division), Bombardier estime que la vente représentera un produit net compris entre 4,2 et 4,5 milliards de dollars, qui seront affectés au remboursement anticipé d’une partie de sa dette.
« C’est la fin de notre redressement et le début d’un nouveau chapitre prometteur », annonce Alain Bellemare, le PDG du groupe
Lorsque cette dernière étape de la restructuration de Bombardier sera franchie, le groupe devrait se retrouver avec un bilan plus solide et en meilleure position pour renforcer sa position dans l’aviation d’affaires. La division devrait représenter un chiffre d’affaires annuel de plus de 7 milliards de dollars et le carnet de commandes atteint une valeur de 14,4 milliards de dollars. Pour 2020, Bombardier vise 160 livraisons. Le Global 7500 à lui seul doit représenter 35 livraisons annuelles ; son carnet de commandes est plein jusqu’en 2022.
Selon l’avionneur, les perspectives sont bonnes dans le secteur et le nombre de livraisons devrait croître durant les prochaines années, surtout dans le secteur des jets larges. La croissance économique mondiale, l’expansion des modèles de nolisement et de multipropriété et l’arrivée d’un cycle de remplacement devraient favoriser l’activité.
Bombardier souhaite rester « le point d’ancrage de la grappe aérospatiale au Québec et au Canada », souligne Alain Bellemare, qui a exclu toute vente de l’activité Avions d’affaires, quelles que soient les offres qui se présentent : « non, nous ne vendrons pas Bombardier Aviation ». Avant l’annonce de l’accord avec Alstom, Textron était pressenti pour reprendre la division Aviation.
Une restructuration de cinq ans, « très exigeante »
Après des années passées à maintenir à bout de bras le CSeries hors de l’eau, Bombardier a enregistré en 2014 sa première année de pertes. C’est à ce moment-là également que les vagues de restructuration ont débuté, avec trois importants plans sociaux en à peine plus d’un an et l’abandon du programme Learjet 85. En 2016, l’activité hydravions (CL-215, CL-215T et CL-415) est cédée à Longview Aviation Capital, qui la confie à Viking (qui a déjà relancé le Twin Otter). En 2018, alors que les licenciements se poursuivent, Bombardier vend son programme Q400, toujours à Longview, qui relance la marque De Havilland Canada. Puis, en 2019, le CRJ passe aux mains de Mitsubishi Heavy Industries et CAE reprend les activités de formation des pilotes et des techniciens d’Avions d’affaires. Quant à Spirit Aerosystems, il est en train de racheter les activités liées aux aérostructures et aux services après-vente de Belfast et de Casablanca, ainsi que les installations de MRO de composants de Dallas. Enfin, Latécoère a repris la partie systèmes d’interconnexion et câblage de Queretaro.
Entre temps, en 2017, le couperet est aussi tombé sur le CSeries. Airbus et Bombardier annoncent la création d’une société en commandite, qui reprend le programme d’avions régionaux et dans laquelle l’avionneur européen détient une part majoritaire aux côtés de son partenaire canadien et du gouvernement du Québec. La transaction est finalisée en 2018 et le CSeries devient l’A220. Le désengagement de Bombardier dans le programme qui a causé sa perte est devenu total le 13 février, avec la vente du reste de sa participation dans l’A220.