Martin Gauss devait intervenir lors du forum Connect 2016, qui s’est déroulé à Vilnius du 13 au 15 mars. Mais le président d’airBaltic a changé ses plans pour visiter Bombardier. Il est en effet allé à Mirabel, surveiller la progression de l’assemblage du premier CS300 de série, destiné à sa compagnie. L’appareil porte le numéro de série 55003.
AirBaltic attend treize exemplaires du CS300 et détient des options sur sept appareils supplémentaires. Elle est la compagnie de lancement de cette version de l’avion de Bombardier, un risque qu’elle considère davantage comme une opportunité : « nous avons eu cette discussion : est-ce qu’on doit s’attacher à une approche low-cost avec peu de risque ou choisir celle qui offre plus de confort à nos passagers ? Nous avons choisi la seconde. Je suis sûr que ce sera une grande amélioration pour nos passagers. En plus, c’est un avion à la pointe de la technologie, très performant », a expliqué Martin Sedlacky, le directeur des opérations d’airBaltic le 14 mars.
Il a par ailleurs précisé que le premier CS300 devait être livré en septembre et qu’entre trois et cinq exemplaires seraient opérationnels à la fin de l’année. La préparation à l’introduction de l’appareil à déjà débuté : des équipes d’airBaltic sont au Canada depuis trois mois et la formation des personnels qui évolueront autour de l’avion est en cours.
Les CSeries sont censés remplacer les douze 737-300 et 500 que la compagnie exploite d’ici 2018. La plupart des Boeing a été acquise en leasing mais cinq appartiennent à airBaltic et serviront à terme d’appareils de rechange en cas de perturbations dans les opérations. En attendant, les CSeries permettront à la low-cost de transformer ses opérations. « Grâce aux CSeries, nous serons moins limités en termes de capacités, ce qui nous permettra de travailler sur nos destinations, nos fréquences et notre connectivité. L’été prochain, le réseau aura complètement changé. » Les CS300 seront initialement placés sur les principales routes d’airBaltic (Paris, Londres, Amsterdam et Bruxelles) puis augmenteront les fréquences sur tout le réseau.
Les projets contrariés de compagnie balte
Mais Martin Sedlacky est lucide : « nous aurons toujours une vingtaine d’appareils en 2021, ce n’est pas assez pour exister de façon indépendante. Il faut cinquante voire cent avions pour atteindre une masse critique. » Or le marché letton est très limité, la Lettonie ne comptant que 2 millions d’habitants. L’ambition d’airBaltic, et son nom l’indique, est d’être la compagnie des trois états baltes, ce qui augmente sa zone de chalandise. S’il n’y a pas de résistance à ce projet en Lituanie, l’Estonie y est en revanche farouchement opposée.
Après avoir soutenu jusqu’au bout Estonian Air à coup d’aides d’Etat dont l’illégalité a mené à la faillite, le gouvernement estonien a relancé dans la précipitation Nordica (ex-Nordic Aviation Group) fin 2015 pour ne pas laisser la place vacante, excluant de nouveau toute alliance avec airBaltic, jugée « scandaleusement chère » par Erik Sakkov, membre du conseil d’administration de Nordica. Un nom qui laisse d’ailleurs transparaître son ambition internationale à elle aussi puisqu’il ne se rattache que de façon détournée à son origine estonienne et sa volonté de concurrencer airBaltic.
En attendant, celle-ci a décidé de croître en Estonie comme en Lituanie dans les prochaines années. La marge de progression est grande puisqu’elle ne détient respectivement que 12% et 6 à 7% de part de marché dans chacun des pays. Par ailleurs, contrairement au modèle low-cost classique, elle mise sur le trafic de correspondance. « Si on ne peut pas rentabiliser une route en point-à-point, il est dommage de laisser la place vacante et il faut miser sur les correspondances. Nombreuses sont nos routes qui sont rentables uniquement grâce à ce trafic de correspondance. »
Une stratégie qui explique aussi en partie le choix de se doter d’une flotte composée de deux modèles d’avions puisque la compagnie exploite également douze Q400, qui sont utilisés sur ses vols les plus courts. « Nous sommes de petits pays et les offices du tourisme n’arrivent pas à promouvoir la destination. Nous ne pouvons pas exploiter une flotte unique d’avions de 200 places et croître à toute vitesse. »