L’Europe se réveille d’un séisme politique : le Royaume-Uni a voté pour le Brexit, signant sa sortie de l’Union Européenne. Si cette sortie prendra du temps, si les conséquences ne sont pas encore très claires, l’incertitude qui naît du résultat du référendum britannique va de toute façon avoir un impact sur l’économie et sur le secteur aéronautique plus particulièrement, qu’il s’agisse du transport aérien ou de l’industrie.
Pour le moment, la prudence reste de mise dans les réactions. IAG comme easyJet ou Flybe ne voient pas d’impact sur leur activité à long terme. KLM non plus. Outre-Atlantique, Delta considère que c’est « business as usual ».
Mais toutes ont affirmé leur vigilance car cela reste un saut dans l’inconnu. Donc une mauvaise nouvelle pour les affaires – comme en témoigne l’état de la bourse de Londres aujourd’hui. L’IATA estime déjà que le Brexit et ses conséquences sur l’activité économique et sur la livre devrait provoquer une baisse de 3 à 5% du nombre de passagers au Royaume-Uni d’ici 2020. IAG n’a pas attendu très longtemps avant d’émettre une alerte aux résultats : ayant constaté un ralentissement de l’activité durant les semaines précédant le vote, le groupe s’attend à ce qu’il persiste et ne compte plus améliorer son bénéfice opérationnel dans la même mesure qu’en 2015 (+68%).
EasyJet a rappelé qu’elle s’était préparée à ce résultat et qu’elle avait déjà travaillé à un plan B. Alors qu’elle se concentrait sur la campagne contre le Brexit avant le vote, elle souhaite désormais s’engager pleinement pour accélérer les discussions entre les gouvernements britannique et européen afin de permettre au Royaume-Uni de rester dans le marché unique européen de l’aviation, par exemple en restant membre de l’Espace Economique Européen. Ce qui lui éviterait de devoir mettre en place son plan B – dans lequel easyJet Switzerland pourrait être amenée à jouer un rôle.
Gueule de bois aussi du côté de l’industrie. Airbus a réagi très rapidement par la voix de Paul Kahn, le président d’Airbus Group UK : « c’est un signal d’alarme pour l’Europe et un catalyseur pour le changement. » Le groupe, qui avait déjà prévenu qu’il y aurait des effets à long terme sur sa présence au Royaume-Uni en cas de Brexit, va devoir travailler avec le gouvernement britannique pour déterminer dans quelle mesure il pourra en minimiser l’impact sur ses activités et les 15 000 emplois directs qu’elles génèrent. Mais la Grande-Bretagne est le troisième pays aéronautique européen et ses responsabilités sont grandes : les usines de Filton et Broughton ont la charge de la conception et de la production des ailes des Airbus, sans compter les activités d’Airbus Helicopters et Airbus Defense and Space.
Quant au groupe Safran, il compte neuf filiales et treize sites outre-Manche, qui conçoivent des nacelles, travaillent sur des pièces composites et des systèmes électriques pour motoristes et avionneurs, ou abritent des bancs et équipements d’essais pour moteurs, entre autres.
Le secteur de la défense sera peut-être relativement épargné puisque déjà partiellement régi par des accords bilatéraux. Ainsi, le président de la République François Hollande a assuré qu’il « n’oubliait pas nos relations étroites en matière de défense, qui seront préservées. » Pas de divorce donc.
Mais le résumé formulé par l’IATA pour le transport aérien colle aussi pour l’industrie : « une incertitude énorme demeure au sujet des détails précis de la sortie et cela pourrait prendre deux ans ou plus avant que ces problèmes ne soient résolus ; une incertitude prolongée qui influencera à la fois la magnitude et la persistance des impacts économiques. »