Eurowings fait machine arrière. Ses cinq années d’expansion ayant considérablement complexifié ses activités et coûté cher au groupe, celui-ci a décidé de limiter la casse. Eurowings va donc redevenir ce qu’elle devait être initialement : une compagnie low-cost, rationalisée et rentable. Une restructuration a été présentée le 24 juin, dont les conséquences vont être l’abandon des opérations long-courrier, la suspension de l’intégration de Brussels Airlines, le retour à une AOC unique, la modernisation de la flotte, notamment avec des Airbus A320neo, et un travail sur l’amélioration de la productivité.
Le plan s’étale sur trois ans, durant lesquels les efforts accomplis devraient permettre de réduire les coûts au siège de la compagnie de 15% (passant de 6,1 à 5,2 centimes d’ici 2022) et de la rendre enfin profitable.
Bye bye long-haul
La première victime de la restructuration sera l’activité long-courrier, qui va redevenir la compétence unique des compagnies de réseau. Pour le moment, le low-cost long-courrier n’a pas fait ses preuves sur le marché transatlantique, comme l’ont montré les faillites de Primera et Wow Air ou les difficultés de Norwegian. Eurowings en est le nouvel exemple. Le groupe considère que le lancement des opérations long-courrier ont introduit de la complexité dans les opérations et ont distrait l’attention de la compagnie du moyen-courrier. Ses activités à Francfort et Munich (quatre et trois appareils) seront donc réintégrées à celles de Lufthansa dès l’hiver 2019-2020. Restera ensuite à régler le sort des quatre avions à Düsseldorf en 2020.
De ce fait, l’intégration de Brussels Airlines dans Eurowings est suspendue et ses activités devraient se rapprocher de celles des compagnies de réseau. A quel point ? Cela reste également à déterminer mais le groupe Lufthansa travaille à un plan de réalignement et de restructuration qui devrait être présenté au troisième trimestre.
Focus sur le moyen-courrier
Toute l’attention d’Eurowings va donc se reporter sur le réseau européen, qui compte aujourd’hui treize bases et 140 destinations. L’objectif ici n’est pas encore la croissance : celle-ci va être maîtrisée durant les trois prochaines années pour se maintenir à une moyenne de 1% par an (contre 19% ces trois dernières années). La stratégie va être de consolider la position dominante d’Eurowings sur ses marchés stratégiques et de poursuivre la croissance sur les marchés-clefs que sont Düsseldorf, Hambourg, Stuttgart et Cologne, tout en fermant les bases et les routes non rentables.
Dans un souci de simplification toujours, Eurowings devrait passer de quatre à un CTA. 2019 devrait être une année transitoire avec la réduction à deux certificats de transporteur allemands : celui d’Eurowings (à Düsseldorf) et celui de Germanwings (à Tegel). Le CTA autrichien d’Eurowings Europe va donc être supprimé (et sa base transférée à Munich), comme le CTA allemand de LGW (Luftfahrtgesellschaft Walter). La petite compagnie allemande a déjà été revendue au groupe Zeitfracht mais continue d’opérer ses Q400 en wetlease pour Eurowings.
Rationalisation de la flotte
Mais cela ne va pas durer car Lufthansa prévoit aussi une restructuration de la flotte d’Eurowings. Actuellement composée de 139 appareils, elle est plutôt hétérogène en raison des intégrations diverses, avec la présence de sous-flottes, et ancienne, avec une moyenne d’âge de onze ans et des appareils en service depuis parfois plus de 25 ans.
Eurowings va donc retirer les quinze Q400 de LGW de son programme de vols à partir de 2021pour les remplacer par des appareils de plus grande capacité. Avant cela, neuf monocouloirs en wet lease vont être remplacés par des appareils appartenant en propre au groupe, de manière à ce que ce type de contrat ne soit plus utilisé que lors des pics d’activité de la saison été. Enfin, les plus anciens appareils de la flotte en sortiront (notamment les 737) – neuf doivent la quitter dès 2019. Ils seront notamment remplacés par des A320neo issus du carnet de commandes de Lufthansa : Eurowings en intègrera quatre en 2021 et seize en 2022.
La productivité de la flotte devrait ainsi gagner entre 10% et 15%, tandis que sa taille diminuera de 10% à 20% – le nombre d’avions de réserve doit lui aussi baisser à partir du quatrième trimestre 2019. L’organisation de la maintenance de la flotte devrait elle aussi être simplifiée à partir du quatrième trimestre.
Amélioration générale de la productivité
Si la flotte devrait passer d’environ 3 000 à plus de 3 300 heures de vols par appareil par an, elle ne sera pas la seule à devoir améliorer sa productivité. Le groupe juge en effet que la productivité actuelle du personnel d’Eurowings n’est pas satisfaisante, notamment en raison de la complexité de l’organisation (CTA multiples, pilotes avec contrat Lufthansa…). Plusieurs mesures vont ainsi être prises comme le transfert chez Lufthansa des pilotes avec un contrat Lufthansa, la réduction des redondances dans les équipages, l’instauration d’un principe strict de base d’attache pour réduire les procédures d’acheminement et l’augmentation du nombre de jours et d’heures de travail. Ainsi, Eurowings espère que ses équipages atteindront 750 heures de vol par an, au lieu de 530 aujourd’hui.
Toutes ces mesures ont un seul but : faire qu’Eurowings soit à l’équilibre en 2021, un objectif que Lufthansa poursuit sans jamais l’atteindre depuis plusieurs années en expliquant que la croissance rapide puis l’intégration (très coûteuse) d’AirBerlin ont retardé ses efforts. A long-terme, le groupe vise même une marge opérationnelle supérieure à 7%.