Le moins que l’on puisse dire, c’est que la conjoncture est tout sauf favorable au développement des compagnies hongkongaises. Après voir souffert des tensions commerciales entre la Chine et les Etats-Unis, après avoir essuyé six mois de manifestations qui ont porté un rude coup au tourisme et provoqué une récession, elles doivent désormais affronter la crise du coronavirus. Apparu en Chine au mois de décembre, il a mis à mal la faste période du Nouvel An chinois et isole de plus en plus le territoire semi-autonome.
A ce jour, Hong-Kong a identifié 24 cas de personnes infectées par le coronavirus, dont une y a succombé. Cette annonce a amené American Airlines et United Airlines à suspendre leurs vols vers le territoire, une décision également prise par plusieurs autres compagnies comme Jetstar, Air India ou Virgin Australia. A partir du 8 février, une période d’isolement de quatorze jours est par ailleurs imposée à toute personne ayant séjourné en Chine dans les deux semaines précédentes.
Protéger sa trésorerie, première priorité de Cathay Pacific
Mais Cathay Pacific ou Hong Kong Airlines ont elles-mêmes souffert dès janvier, les liaisons vers la Chine représentant une très grande partie de leur activité. La suspension de la moitié de leurs opérations vers le pays, décidée le 28 janvier, leur a déjà porté un coup dur. Mais cette mesure va être renforcée, au moins chez Cathay et sa filiale low-cost Hong Kong Dragon Airlines qui annonçaient dès le 4 février la suppression de 90% de leur programme de vols chinois. D’autres coupures devraient avoir lieu sur d’autres segments, ce qui fait dire au groupe Cathay que cette crise va lui coûter 30% de ses capacités totales. Reste à voir sur combien de temps.
Pour la compagnie hongkongaise, la priorité est désormais à la préservation de la trésorerie. Signe que la situation est très préoccupante, son directeur général, Augustus Tang, a demandé à ses 27 000 collaborateurs de poser trois semaines de congés sans solde pour soulager les comptes.
Nouvelle épreuve pour la survie de Hong Kong Airlines
Hong Kong Airlines a elle aussi annoncé de nouvelles coupes à son programme de vols, qui seront maintenues au moins jusqu’au 28 mars, et vient de décider de licencier 400 personnes pour assurer sa survie. La filiale du groupe HNA est d’autant plus en danger qu’elle revient de loin. Le mois de décembre a été particulièrement difficile pour elle, marqué par une crise de liquidités qui a empêché le versement des salaires de ses collaborateurs, a provoqué la saisie de sept de ses appareils et a failli lui coûter sa licence – qu’elle a pu conserver après une injection de fonds in extremis.
C’est peut-être elle la plus fragile aujourd’hui et la plus menacée par cette nouvelle crise, qui pourrait être fatale à certaines compagnies. C’est en tout cas ce que craint Alan Joyce, le PDG de Qantas, qui, dans un entretien avec le magazine Fortune le 30 janvier, a estimé que « beaucoup de compagnies aériennes ne seraient peut-être plus en mesure de poursuivre leurs opérations ». Selon lui, le développement rapide du transport aérien en Asie s’est souvent fait aux dépens de la rentabilité des transporteurs, créant une surcapacité, rendant difficile la réalisation de bénéfices et les mettant à la merci de toute crise. « C’est la survie du plus fort. »
Singapour menacé
Plus généralement, ce sont toutes les compagnies asiatiques qui se sont beaucoup reposées sur la Chine pour développer leur activité qui vont traverser une mauvaise passe. Même Singapour ressent l’impact de la crise du coronavirus. Bien qu’ils soient mieux armés que certains de leurs confrères asiatiques, les groupes Singapore Airlines et Jetstar Asia risquent de voir leur modèle s’enrouer quelques semaines. Ils ont suspendu leurs vols vers la Chine tandis que les détenteurs d’un passeport chinois qui ne sont pas résidents permanents de Singapour et les voyageurs ayant récemment séjourné en Chine ne sont plus acceptés sur l’île-Etat. Ici, trente cas ont été identifiés. Le ministre des Transports singapourien estime que l’impact de cette pneumonie virale sera pire que celui du SRAS (Syndrome respiratoire aigu sévère) en 2003 car la proportion de voyageurs chinois a doublé.