Il y a six mois, alors qu’elle relevait à peine la tête de la crise sanitaire, Finnair a replongé pour une nouvelle crise majeure. L’invasion russe de l’Ukraine a provoqué l’adoption à la chaîne de sanctions à l’encontre de la Russie, auxquelles celle-ci a riposté : notamment, la fermeture du ciel européen aux compagnies russes, décidée immédiatement après l’agression, a entraîné la fermeture du très stratégique espace aérien russe aux compagnies européennes. Ce faisant, Finnair a perdu le pilier-même de sa stratégie, son positionnement commercial reposant essentiellement sur le fait qu’Helsinki se trouve sur la route la plus courte entre l’Europe et l’Asie et que son efficacité permettait de ne pas rallonger un voyage avec escale dans la capitale finlandaise par rapport à un vol direct au départ d’un autre point en Europe.
Avec la route transsibérienne coupée, Finnair a vu ses temps de vol vers l’Asie s’allonger « considérablement », de 15% à 40% selon les destinations, avec un impact particulièrement important sur ses destinations les plus importantes (Japon, Corée du Sud et Singapour). Elle a donc perdu son principal avantage concurrentiel. Constatant cela, la direction de la compagnie travaille depuis plusieurs mois à réduire sa dépendance à l’ouverture de l’espace aérien russe et à rééquilibrer son activité pour redevenir rentable.
Le rééquilibrage de l’activité passera principalement par un rééquilibrage du réseau. Finnair souhaite conserver sa force sur l’Asie mais elle restera rationnelle dans ses fréquences (les volumes vont baisser) et le choix de ses dessertes pour ne conserver que celles qui permettent de dégager des profits malgré l’allongement des temps de vol et le renchérissement du carburant. En parallèle, elle compte développer ses marchés en Amérique du Nord, vers le Moyen-Orient et l’Inde. Pour cela, elle va notamment s’appuyer sur des partenariats, par exemple la coentreprise sur l’Atlantique Nord avec American Airlines et le renforcement des relations avec Qatar Airways pour la desserte du Moyen-Orient, de l’Inde mais aussi du reste de l’Asie Pacifique et de l’Afrique.
Cela aura deux conséquences. La première est qu’elle va devoir davantage viser les marchés les moins régulés et où la concurrence est la plus forte. Elle devra donc réduire ses coûts si elle veut espérer pouvoir entrer dans la compétition. Finnair vise une réduction de 15% de ses coûts unitaires par rapport à leur niveau de 2019 (hors carburant) – cela inclut donc les efforts déjà faits dans le cadre de la crise sanitaire. Topi Manner, le CEO de la compagnie, souligne que des mesures seront prises dans tous les domaines, y compris la gestion du personnel.
La seconde conséquence sera une adaptation de la taille de la flotte. Topi Manner s’est refusé à indiquer quelles parties de la flotte seraient amputées, précisant seulement que les capacités de sa compagnie seraient à 80% voire 85% de leur niveau pré-covid au quatrième trimestre. En ce qui concerne le long-courrier, il a expliqué que les A350-900 étaient essentiels pour la poursuite de la desserte de l’Asie. Quant au partenariat avec Qatar Airways, il a redonné de la pertinence au maintien des A330-300, quand « leur adaptation au réseau avait été réduite avec la fermeture de l’espace aérien russe », a déclaré Topi Manner. Ils voleront donc notamment vers Doha.
Topi Manner a également souligné que la compagnie avait loué des avions avec équipage pour soutenir les opérations de Lufthansa/Eurowings et British Airways durant l’été et que l’expérience avait été concluante. Enfin, Finnair compte renforcer ses recettes unitaires par le développement de son offre numérique, ses produits et ses options pour les passagers.