« C’est vraiment un gros acte de confiance que vient de nous témoigner Cessna », annonce tout souriant Olivier Andriès, le Président de Safran Aircraft Engines (anciennement Snecma), lors de la grande convention de la NBAA (National Business Aviation Association) qui s’est tenue cette année à Orlando (Floride).
Le réacteur Silvercrest a en effet été sélectionné par l’avionneur américain pour propulser son futur Citation Hemisphere, un avion d’affaires à fuselage large qui affichera un rayon d’action de 4500 nautiques (8300 km). Successeur du défunt programme Columbus, le Citation Hemisphere est de loin l’avion d’affaires le plus ambitieux jamais lancé par la filiale de Textron. Son premier vol est attendu pour 2019.
« Cette victoire est d’autant plus belle quand on sait qu’il y a eu une intense compétition avec les acteurs habituels présents sur ce marché ; Rolls-Royce, Pratt & Whitney Canada, GE…, et nous avons finalement remporté l’appel d’offres. »
Le patron de Safran Aircraft Engines explique ce succès pour plusieurs raisons. « Tout d’abord, notre réacteur a été conçu et optimisé pour ce segment de marché, avec une classe de poussée comprise entre 10 000 et 12 000 livres. Les autres acteurs proposaient par exemple des moteurs plus gros ou plus petits. Or, réduire la puissance d’un moteur ne peut se faire qu’au détriment de ses performances globales, de sa masse. » Selon lui, le Silvercrest était tout simplement le réacteur qui correspondait le mieux aux besoins de Cessna pour son Citation Hemisphere.
« Enfin, il y avait autre chose … », poursuit Olivier Andriès, qui se rapproche et touche d’une main le carter du réacteur d’essais présent sur le stand du groupe Safran à Orlando. « Ce moteur est bien réel, ce n’est pas un moteur en papier. »
Olivier Andriès ajoute aussi que le Silverscrest-2C qui est proposé à Cessna est pratiquement le même que celui du Falcon 5X de Dassault Aviation (même architecture et même dimensions), à l’exception logique de certaines interfaces. Il devrait d’ailleurs afficher la même poussée maximale, de l’ordre de 12 000 livres, ce qui simplifiera aussi le processus de certification. Olivier Andriès a par ailleurs indiqué que Cessna ne s’était pas encore prononcé quant au choix des fournisseurs pour la nacelle et l’inverseur de poussée. Pour la Falcon 5X, c’est l’ensemble du système propulsif qui est fourni par Safran.
Mais le patron de Safran Aircraft Engines est aussi revenu sur les mésaventures du réacteur apparues à la mi-2015, date à laquelle les ingénieurs avaient constaté que le nouveau réacteur ne pourrait, en l’état, répondre au cahier des charges promis aux avionneurs. « Depuis ces 16 derniers mois, nous avons travaillé silencieusement, et je peux vous annoncer ici que les problèmes sont désormais derrière nous. »
Le calendrier du programme d’essais du nouveau réacteur est désormais bien arrêté, avec une certification qui devrait être obtenue au printemps 2018. Safran Aircraft Engines est désormais dans la phase de validation des modifications du moteur et un premier Silvercrest finalisé avec l’ensemble des correctifs, aussi bien logiciels que matériels, est d’ailleurs en cours d’assemblage et devrait être terminé en décembre.
Selon Michel Brioude, le Responsable du programme Silvercrest, ce moteur disposera notamment d’un système de pilotage actif de jeu au niveau de la turbine haute pression afin de corriger le problème de continuité des écoulements. Les perturbations rencontrées dans la partie haute pression seraient liées au compresseur de type axialo-centrifuge, une architecture généralement adoptée sur des réacteurs de plus petites dimensions.
Pour Cédric Goubet, le directeur des moteurs civils de Safran Aircraft Engines, cette architecture a permis de limiter le nombre d’étages du moteur, et donc de réduire sa masse et de le rendre plus compact, ce qui représente un avantage important sur des programmes pour lesquels les réacteurs sont situés à l’arrière de la cellule. Les essais des réacteurs Silvercrest seront notamment menés en Russie l’année prochaine pour les tests de température extrême ainsi que sur le banc d’essai GII à San Antonio (Texas). Le GII a déjà effectué 170 vols avec le Silvercrest. « Ce n’est d’ailleurs pas vraiment un banc d’essai volant », ajoute Cédric Goubet, qui rappelle que l’appareil doit compter sur le Silvercrest pour voler en toute sécurité.
Michel Brioude, Responsable du programme Silvercrest chez Safran Aircraft Engines © Le Journal de l’Aviation