Il n’y a pas que les assureurs mutualistes qui font le succès économique de la région de Niort (Deux-Sèvres). C’est en effet à Chauray que Safran Electrical & Power dispose d’un important site dédié aux systèmes électriques pour l’aéronautique, l’établissement de Zodiac Aéro Electric passé sous le giron du groupe Safran suite au rachat de Zodiac Aerospace en début d’année.
Comme l’explique Richard Montois, le directeur du site de Niort, la genèse des activités démarre avec la société Equipement et Construction Electrique (ECE) implantée dans le 20e arrondissement de Paris en 1948 pour venir équiper des avions militaires français en relais et contacteurs électriques. Viendront ensuite progressivement les premiers Mirage de Dassault, puis Concorde, l’Airbus A300 , le Mercure… Une première étape importante est franchie au milieu des années 70 avec le premier véritable coeur électrique du programme d’hélicoptère Ecureuil, prenant la forme d’un boitier de distribution électrique. Un peu plus tard, à la fin des années 80, l’entreprise va plus loin dans l’architecture électrique des avions avec l’appareil de transport CN-235 de Casa. C’est d’ailleurs à peu près à cette date, en 1989, que la société est rachetée par Intertechnique, « marquant le réel début du développement à l’international avec Bombardier, Embraer et Boeing » observe Richard Montois.
Dix ans plus tard, Intertechnique sera rachetée par le groupe Zodiac. 1999 est d’ailleurs une véritable année pivot car c’est à partir de là qu’est né le véritable savoir-faire de Zodiac Aéro Electric dans les architectures électriques complexes, la société migrant du composant à la réalisation d’un système avion complet avec le jet d’affaires Challenger 300 de Bombardier. Depuis, et comme s’est félicité Richard Montois, le directeur du site, « la société va être retenue dans tous les grands programmes mondiaux », sur l’Airbus A380 bien sûr puis sur l’A350, en passant par le 787 de Boeing qui reste à ce jour l’avion commercial le plus électrique au monde, avec une puissance générée de l’ordre de 1200 kW (notamment pour compenser les traditionnels systèmes pneumatiques).
Aujourd’hui le site de Safran Electrical & Power à Chauray emploie 950 personnes pour une surface de 26 000m2. Une grande partie de ses installations est consacrée à la production de contacteurs livrés un peu partout sur la planète, mais aussi de boitiers de distribution primaires (en aval des générateurs électriques des appareils) et secondaires (par exemple pour repartir le courant dans les galleys, dans l’éclairage, dans les IFE…). L’usine produit ainsi 100 000 contacteurs par an et 6000 coeurs électriques. C’est d’ailleurs la fiabilité de ses contacteurs qui a progressivement permis au site de développer des boitiers plus complexes, jusqu’à atteindre les quelque 60 000 pièces nécessaires à un coeur de distribution primaire pour l’A350 par exemple.
Les deux plus importants programmes du site de Niort sont d’ailleurs les 787 et A350, avec pour chacun des lignes d’assemblage complètement dédiées. Pour la famille A350, ce sont ainsi 3 boitiers de distribution primaires et 12 boitiers de distribution secondaires qui doivent ainsi être livrés à Airbus pour chaque appareil, des éléments qui sont d’ailleurs montés en FAL et qui ne seront plus démontables, mais pourvu de LRU pour pouvoir adapter la puissance souhaitée par l’opérateur en fonction des besoins, par exemple pour des réaménagements cabine ou pour le simple ajout de prise usb au niveau des IFE (il y a cependant fort heureusement des réserves).
Des moyens d’essais uniques en Europe
Safran Electrical & Power dispose par ailleurs d’une importante partie ingénierie (R&T sur les produits mais aussi sur les process) avec des moyens d’essais importants, à l’instar de la plateforme dédiée aux systèmes complets de l’A350 et ses 180 km de câbles. Ici, tout le coeur électrique du gros-porteur d’Airbus est testé en condition réelle (vibrations, température, essais foudre) pour vérifier que les protections fonctionnent bien, y compris au niveau de la distribution secondaire (par exemple en simulant les besoins d’équipements).
Le site a par ailleurs investi dans deux grandes cages CRBM pour étudier la compatibilité électromagnétique de certains équipements, par exemple face à des ondes radar ou face aux effets des lignes à haute tension, où à l’inverse pour vérifier que certains systèmes n’émettent rien en retour aussi. « Ce sont des moyens uniques en Europe, et rares dans le reste du monde » observe Richard Montois, qui annonce aussi qu’ils ont servis à tester le câblage d’un gros jet d’affaires assez récemment.
L’usine de Safran Electrical & Power à Niort dispose enfin du banc d’essai GENOME financé par le CORAC pour étudier les architectures électriques de demain, par exemple en faisant appelle à des tensions plus élevées, ou en mutualisant des convertisseurs pour gagner de la masse, ce qui permet aussi de gagner en redondance en cas de panne puisque les convertisseurs ne sont plus spécialisés par système. Et comme le souligne Richard Montois, le site travaille aussi sur des batteries de forte puissance et sur des cartes électroniques. Et de conclure « Ce sont des enjeux importants et il ne faudra pas louper le train ».
L’une des salles CRBM de Safran Electrical & Power à Niort