Le plan d’aide destiné à soutenir la filière aéronautique française doit être annoncé avant le 1er juillet, mais c’est peut-être aussi au niveau européen qu’émanera un soutien pour une industrie éminemment stratégique pour le continent.
On le sait, l’industrie aéronautique française est particulièrement impactée par la pandémie de coronavirus, étant présente sur pratiquement tous les programmes d’aéronefs civils mondiaux. Les donneurs d’ordre comme Airbus et ATR subissent désormais de plein fouet la crise qui touche les compagnies aériennes mondiales, mais c’est en fait toute la chaîne de fournisseurs qui est aujourd’hui pratiquement à l’arrêt (motoristes, équipementiers, sous-traitants), avec un risque important de défaillance pour les structures les plus fragiles.
Les mesures de chômage partiel mis en place par le gouvernement et le dispositif de prêt garanti par l’État durant la période de confinement ont bien sûr été des réponses efficaces en pleine crise sanitaire, mais on sait désormais que le redémarrage de l’ensemble de la supply-chain ne va être que très progressif et que le niveau d’activité d’avant-crise ne sera très certainement pas rattrapé avant au moins deux ans, avec une très importante menace qui plane désormais aussi sur les emplois.
Le GIFAS (Groupement des Industries Françaises Aéronautiques et Spatiales), qui réunit plus de 400 entreprises du secteur et qui représente 195 000 emplois directs a déjà tiré plusieurs fois la sonnette d’alarme en indiquant que la filière était touchée de plein fouet et qu’une aide supérieure au milliard d’euros serait nécessaire pour traverser la crise. « Le besoin n’a pas été complètement identifié (…), mais l’unité de mesure c’est plutôt le milliard. Est-ce que c’est un, deux ou trois milliards, je ne sais pas », avait estimé Eric Trappier, le Président du GIFAS et PDG de Dassault Aviation la semaine dernière.
Des discussions sont d’ailleurs en cours entre le GIFAS et Bpifrance pour la mise en place d’un fonds de soutien pour la filière, avec une annonce qui pourrait intervenir « avant le 1er juillet » selon le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Il faut dire que certains acteurs de la chaîne de fournisseurs sont en situation d’urgence, Eric Trappier annonçant même que plusieurs dizaines de PME étaient en grande difficulté financière.
D’une façon générale, la filière aéronautique française a beaucoup investi ces dernières années pour répondre à l’augmentation des cadences tout en réduisant leurs coûts de production, des investissements nécessaires pour rester compétitive sur le marché, mais qui pèsent aujourd’hui encore davantage sur leur trésorerie avec la réduction contrainte de leur activité.
L’Europe également en soutien ?
L’accord annoncé conjointement par Emmanuel Macron et Angela Merkel visant à la création d’un fonds de relance européen temporaire doté de 500 milliards d’euros au niveau de l’UE pour les secteurs et régions les plus touchés par la pandémie, et qui pourrait également constituer une aide précieuse pour le secteur aéronautique du continent en notamment en France, même si sa mise en place pourra encore prendre du temps compte tenu de l’opposition de certains États.
Pour l’instant, la répartition de cette aide n’est évidemment pas encore d’actualité et l’accord annoncé indique simplement que la Commission européenne pourra privilégier des secteurs liés aux transitions écologique et numérique ainsi que dans la recherche et l’innovation.
L’Allemagne et la France sont d’ailleurs particulièrement sur la même longueur d’onde quant au soutien de leur filière aéronautique respective, en témoigne cette réunion commune tenue la semaine dernière par le GIFAS et son équivalent allemand BDLI. Eric Trappier et Dirk Hoke ont d’ailleurs appelé « d’une même voix et d’une façon urgente à un plan de relance européen ambitieux en faveur de l’aéronautique civile pour préserver l’avenir et soutenir les efforts conjoints de la profession en faveur de l’innovation et d’une aviation responsable, intégrant les enjeux liés à l’environnement ».
D’autant que de l’autre côte de l’océan atlantique, les États-Unis travaillent aussi à soutenir leur industrie aéronautique, avec un montant annoncé par Boeing de l’ordre de 60 milliards de dollars depuis mars même si on sait aujourd’hui que l’avionneur américain, déjà très fortement endetté, n’en bénéficiera pas directement.
Le secteur aéronautique a démontré depuis des décennies qu’il était une activité industrielle stratégique pour la France et pour l’Europe. Les « coronabonds » seront peut être là pour constituer un vrai soutien pour son avenir ?