Il y a cinquante ans, jour pour jour, Saturn V décollait du Centre spatial Kennedy pour la mission Apollo 11. Trois hommes – entrés depuis dans l’histoire de l’humanité – se trouvaient à son bord, confinés dans l’étroit module de commandes : Neil Armstrong, Buzz Aldrin et Michael Collins. Ils s’envolaient alors pour un voyage de huit jours qui devait voir l’homme poser le pied sur la Lune dans la nuit du 21 juillet 1969.
C’était aussi la réalisation de la vision de John F. Kennedy, qui lança le programme Apollo en 1961 pour enfin prendre l’avantage face aux Soviétiques dans cette course à l’espace, émanation directe de la Guerre froide. Ses mots sont restés célèbres : « We choose to go to the Moon in this decade and do the other things, not because they are easy, but because they are hard. » Il fallait au moins cela pour engager les dizaines de milliards de dollars nécessaires à cette entreprise.
Heureusement, l’immense portée de cet exploit a dépassé le conflit temporel Est-Ouest. Neil Armstrong, un civil, fut choisi pour être le premier humain sur la Lune plutôt que Buzz Aldrin, militaire de son état. Et sa première phrase sur l’astre sélène fut un message pour la planète entière : « That’s one small step for a man, one giant leap for mankind ». Si cela n’a pas mis fin aux tensions, la première mission Apollo-Soyouz se tenait dès 1975 et ouvrait la voie à la coopération internationale concrétisée aujourd’hui à travers l’ISS.
Difficile de savoir si le programme américain Artemis, avec un retour sur la Lune en 2024, pourra se hisser à la hauteur d’Apollo. L’exploit sera moins retentissant qu’en 1969, mais il s’agira sans nul doute d’une nouvelle aventure humaine magnifique. Et la Lune ne doit être qu’une étape vers Mars.
Malgré les avancées technologiques, des risques perdurent. Les difficultés multiples du lanceur SLS et de la capsule Orion, qui doivent voler l’an prochain, en sont la preuve. D’autant que la pérennité de la mission est troublée par une volonté politique, certes fortes, mais potentiellement néfaste. Donald Trump n’a pas hésité à exiger une accélération du calendrier de quatre ans – avant la fin de son deuxième (possible) mandat – faisant fi des avertissements. Qu’importe les risques lorsqu’il s’agit de prendre de vitesse la Chine et d’inscrire son nom au « Hall of Fame » des grands dirigeants.
Si la NASA compte sur la participation internationale, ne serait-ce que pour partager les coûts, Artemis pourrait aussi être emprunt d’un nationalisme latent, exprimé par le vice-président Mike Pence : « The first woman and the next man on the Moon will both be American astronauts, launched by American rockets from American soil. » Il était certes déjà présent dans les années 1960, mais il semble autant anachronique qu’inquiétant à l’heure de la coopération spatiale.
Et pour ceux qui s’intéressent à la mystique des noms : Artémis, déesse de la Lune, aida sa mère à accoucher de son frère jumeau Apollon, dieu du Soleil, mais tua par accident son amant Orion.