Alors que le système européen de relais de données par satellite (EDRS) s’apprête à gagner en consistance avec un deuxième satellite, EDRS-C, la Commission européenne cherche désormais à en développer les débouchés. Elle vient d’organiser un événement sur le sujet en partenariat avec le Service européen pour l’action extérieure (EEAS), le 10 juillet à Bruxelles.
Cette demi-journée de conférences a été ponctuée d’une démonstration en direct de ce système appelé à créer une autoroute de données spatiales (« SpaceDataHighway »). Développé en partenariat public-privé par l’ESA et Airbus, EDRS est en effet conçu pour assurer un relais entre les satellites en orbite terrestre basse (LEO) et les stations au sol grâce à une connexion laser, afin d’accélérer la transmission de l’information.
La démonstration a eu lieu simultanément au siège de l’EEAS à Bruxelles et à l’Agence européenne pour la sécurité maritime à Lisbonne, afin de présenter les capacités du système à de nouveaux acteurs en dehors du domaine spatial. L’accélération de la transmission des données satellitaires permises par EDRS peut ainsi présenter des avantages pour des secteurs comme la surveillance maritime ou la gestion de catastrophes naturelles, où le temps est un facteur clef.
Au-delà de cette promotion extra-sectorielle, l’objectif était aussi de faire connaître EDRS en dehors des frontières de l’Europe, d’où la participation active de l’EEAS. La démonstration a ainsi été retransmise en direct au Japon, plus précisément à la délégation de l’Union européenne à Tokyo où un panel d’acteurs locaux s’était rassemblé.
Coopération japonaise pour EDRS-D
L’identification d’opportunités en région Asie-Pacifique est désormais prioritaire. C’est là que sera positionné EDRS-D à l’horizon 2024-2025. Ce troisième et dernier satellite (appelé aussi noeud de communication) doit conférer à la constellation EDRS une couverture mondiale dans le cadre du programme d’extension GlobeNet. Airbus a d’ailleurs signé un partenariat à cet effet avec l’opérateur japonais SKY Perfect JSAT, en février dernier.
L’accord porte sur le cofinancement d’études de conception et de développement de la charge utile du satellite et du système global. En échange, SKY Perfect JSAT pourra assurer la commercialisation du service offert par EDRS au Japon. Avec ce partenariat, Airbus estime le montant total des investissements pour l’extension du SpaceDataHighway à près de 15 millions d’euros.
EDRS-C lors d’essais en chambre anéchoïque chez Airbus Defense & Space. © ESA / S. Corvaja
EDRS-C presque sur le pas de tir
En attendant, c’est EDRS-C qui doit s’envoler. Prévu d’abord en 2017, il décollera finalement du Centre spatial guyanais (CSG) de Kourou le 24 juillet, à bord d’une Ariane 5 ECA, pour être placé en orbite géostationnaire au-dessus de l’Europe (31° Est). Il viendra compléter le service déjà offert par EDRS-A et assurer une redondance. Ce dernier est opérationnel depuis 2016. Positionné à 9° Est, il offre une couverture entre la côte Est des Amériques (presque exclusivement en Amérique du Sud) et l’Inde.
Alors qu’EDRS-A est une charge auxiliaire embarquée sur Eutelsat 9B, EDRS-C est un satellite dédié construit par OHB System, même s’il abritera aussi la charge HYLAS-3 pour l’opérateur britannique Avanti. Ils embarquent chacun un terminal de communication laser (LCT), conçu par Tesat-Spacecom et le DLR, avec un débit de 1,8 Gbit/s et une portée de 35 000 km – d’où l’idée d’autoroute spatiale. EDRS-A a ainsi réussi à assurer 20 000 connexions entre janvier 2016 et avril 2019, avec une fiabilité de l’ordre 99,5 % (99,8 % sur les 10 000 premières connexions). Plus d’un pétabit de données a ainsi été transmis.
EDRS-D sera aussi un satellite dédié, et il n’a pas encore été fait mention d’une charge utile auxiliaire. Il disposera de trois LCT de nouvelle génération, qui lui conféreront un débit accru et une portée étendue à 75 000 km. L’objectif est ainsi d’arriver à une transmission « presque temps réel » sur la quasi-totalité de la planète. Du fait du partenariat avec SKY Perfect JSAT, il aura aussi la possibilité de communiquer avec des terminaux japonais.
Vue d’artiste d’EDRS-A, embarqué dans le satellite Eutelsat 9B. © ESA
Une fibre optique de l’espace
Ce sont ces LCT qui permettent la transmission des données. Ils peuvent ainsi se connecter par laser à un satellite LEO équipé d’un terminal afin de récupérer les informations qu’il contient et les retransmettre vers le sol. Par exemple, un satellite d’observation au-dessus du Brésil peut ainsi s’appuyer sur EDRS-A pour transmettre ses images de la forêt amazonienne vers la France sans avoir à attendre de repasser au-dessus de l’Hexagone. Il pourra aussi acquérir davantage de données car il sera moins limité par ses capacités de stockage.
Si EDRS n’a donc pas encore atteint son plein potentiel, il possède déjà des applications. Il a bénéficié d’un financement de 90 millions d’euros de la part de l’Union européenne et l’ESA pour la période 2015-2020, au titre duquel il assure notamment la transmission des données pour le programme européen d’observation de la Terre Copernicus (avec les satellites Sentinel 1A/1B et 2A/2B). A partir de 2021, il fera de même pour la constellation de satellites d’observation Pléiades Neo d’Airbus, en attendant de nouveaux débouchés.