Tout vient à point à qui sait attendre. Les fans de SpaceX ont en effet dû faire preuve d’une certaine philosophie pour patienter jusqu’au deuxième lancement d’un Falcon Heavy, plus d’un an après son vol inaugural en février 2018. Leur longanimité a été récompensée le 11 avril, avec le premier vol commercial mais aussi le premier succès complet du lanceur lourd de la firme américaine, à l’occasion de la mise sur orbite du satellite de télécommunications Arabsat-6A.
Les 27 Merlin font parler leur puissance combinée au décollage. © SpaceX
Un géant s’élève
Malgré un report d’un jour, ce deuxième Falcon Heavy s’est envolé ce jeudi depuis l’emblématique complexe de lancement 39A (LC-39A) du Kennedy Space Center (KSC), en Floride, à 22:35 UTC. Le lanceur de plus de 1 400 tonnes s’est rapidement élevé dans le ciel sous l’effet combiné de ses 27 moteurs Merlin – également répartis sur les trois corps du premier étage – offrant une poussée totale de près de 23 000 kN.
Après un peu plus de deux minutes et demie de vol, les deux accélérateurs latéraux se sont séparés du corps central pour revenir se poser sur la terre ferme cinq minutes plus tard dans un ballet synchronisé toujours très impressionnant. Le corps central s’est lui détaché du second étage après trois minutes et demie de vol, avant d’apponter six minutes plus tard sur la barge de récupération autonome « Still loving you » dans l’océan Atlantique. Malgré une perte de retransmission des images de la barge juste au moment crucial, les personnels de SpaceX ont pu célébrer pour la première fois la récupération des trois éléments du premier étage.
Pour la première fois, les trois corps de l’étage principal ont été récupérés. © SpaceX
Arabsat-6A mis sur la bonne voie
Lors de sa séparation du corps central du premier étage, le second étage évoluait à 10 700 km/h à une altitude de 100 km. Un premier allumage de cinq minutes de son unique moteur Merlin lui a permis d’atteindre une vitesse de 26 700 km/h à 164 km d’altitude. Arrivé à 199 km d’altitude moins de vingt minutes plus tard, le Merlin s’est rallumé une seconde fois pendant une minute et demi jusqu’à atteindre 36 700 km/h et 221 km d’altitude. Le satellite Arabsat-6A a été libéré cinq minutes après à plus de 700 km d’altitude sur une orbite de transfert géostationnaire.
Le gros satellite – 3,5 tonnes à vide, 6 tonnes au décollage avec son carburant – a poursuivi sa route vers l’orbite géostationnaire à environ 36 000 km d’altitude. Il se positionnera à une longitude de 30,5 degrés Est pour couvrir l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Europe en remplacement d’Arabsat-5A, en service depuis 2010. Basé sur la plateforme LM 2100 de Lockheed Martin, il délivrera des services de télévision, de radio, d’Internet et de téléphonie en bande Ka et Ku.
Arabsat-6A s’éloigne après avoir été relâché par le second étage du Falcon Heavy. © SpaceX
Un succès véritable
Si ce tir n’a pas eu le même retentissement médiatique que celui de 2018, c’est pourtant le premier succès complet du Falcon Heavy. Il y a un an en effet, le lanceur lourd avait certes envoyé une Tesla Roadster dans l’espace sur fond de Space Oddity, mais avait raté son placement sur l’orbite de Mars. Le véhicule s’était alors éloigné en direction de la ceinture d’astéroïdes située entre les orbites de Mars et Jupiter. Surtout SpaceX avait échoué dans sa tentative de récupération du corps central du premier étage.
Cette fois, avec la mise sur la bonne orbite d’Arabsat-6A et le retour des trois corps du premier étage, tout s’est donc passé de façon nominale, s’est-on félicité chez SpaceX. De plus, Elon Musk a annoncé sur Twitter que les deux éléments principaux de la coiffe avaient été récupérés dans l’océan, mais intacts, et qu’ils seraient réutilisés dès cette année dans le cadre du déploiement des premiers satellites de la constellation de télécommunication géante Starlink de SpaceX. L’attente fut donc encore fois longue pour la firme américaine – qui n’en est pas à son premier retard – mais elle a été à nouveau couronnée de succès. Falcon Heavy va donc enfin pouvoir véritablement débuter sa carrière.