Airbus tenait une conférence de presse à Londres en préparation du prochain salon aéronautique de Farnborough qui ouvrira ses portes à partir du 15 juillet. Sans dévoiler la teneur d’une semaine qui s’annonce d’ores et déjà intense, la direction du groupe aéronautique européen a ainsi pu faire le point sur les défis et les opportunités qui se présentent pour ses différentes activités et en particulier pour ses avions commerciaux.
Tom Enders, le CEO d’Airbus vient d’ailleurs de rentrer d’un séjour à Montréal pour la mise en place effective de la nouvelle joint-venture avec Bombardier concernant la famille CSeries. Les nouveaux appareils moyen-courriers CS100 et CS300 viennent en effet de rejoindre la gamme des monocouloirs d’Airbus le 1er juillet. « Notre joint-venture est désormais pleinement opérationnelle » a annoncé Tom Enders, ajoutant que nous allions bientôt voir ce que « cela allait impliquer en termes de ventes », laissant bien sûr entendre que le prochain salon de Farnborough serait une formidable vitrine pour cela (lire l’Edito : Farnborough 2018 : Un salon qui s’annonce déjà prometteur en commandes d’avions commerciaux).
Le CEO d’Airbus est également revenu sur la digitalisation de l’ensemble du groupe. « C’est aujourd’hui un gros sujet, ce n’est plus seulement une activité qui n’occupait que quelques personnes en interne il y a quelques années ». Il cite notamment l’essor de la plateforme de données Skywise, développée en collaboration avec l’Américain Palantir, et qui attire de plus en plus de fournisseurs et de clients. Rien que pour la MRO, ce sont 3 000 appareils qui sont désormais concernés et qui vont progressivement être connectés à la plateforme. « Ce nombre va rapidement augmenter » a-t-il déjà prévenu. Il rappelle aussi qu’avec la digitalisation, nous assistons véritablement à la troisième révolution de l’aéronautique. « C’est triste, mais c’est hélas la réalité : dans les années 2020, les données seront plus importantes que les talents. »
Tom Enders, qui n’assurera pas de nouveau mandat l’année prochaine, est aussi revenu sur la stratégie qu’il continue de mener à la tête du groupe aéronautique européen. Il a notamment rappelé les trois piliers stratégiques d’Airbus, les fameux « 3 i » pour intégration, internationalisation et innovation. Tous ont été pleinement renforcés selon lui. Il cite notamment pour l’intégration les énormes progrès qui ont été faits au niveau des relations entre les différentes entités du groupe. « Nous n’aurions pu résoudre les problèmes rencontrés sur les boitiers de transmission de l’A400M sans le soutien d’Airbus Helicopters par exemple », a-t-il rappelé.
Mais Tom Enders s’est montré une nouvelle fois particulièrement pessimiste sur le Brexit, avec toutes les conséquences que pourrait engendrer une sortie « dure » du Royaume-Uni de l’UE. Le scénario du pire est d’ailleurs anticipé par Airbus à partir de mars 2019 avec l’impossibilité d’installer certaines pièces produites outre-manche faute de certification. « Nous ne sommes pas en train de bluffer », a annoncé pour sa part Guillaume Faury, le Président d’Airbus Commercial Aircraft. Il explique d’ailleurs qu’une production tampon de trois mois est déjà envisagée pour éviter toute rupture de production liée à un Brexit « hard », avec évidemment la problématique d’accélérer une production déjà saturée par les différentes montées en cadence. « Un tampon de trois mois, cela revient à augmenter d’un tiers la production des pièces sur trois mois » a-t-il expliqué.
Les difficultés de livraison persistent sur la famille A320
Guillaume Faury est revenu sur les nombreux monocouloirs sans moteur qui continuent d’occuper beaucoup d’espace, notamment à Finkenwerder (Hambourg) et à Toulouse. Selon lui, la flotte de « planeurs » est, petit à petit, en train de se résorber, les motoristes Pratt & Whitney (PW1100G-JM) et CFM International (LEAP-1A) respectant leur trajectoire de rattrapage pour combler les retards. « Nous continuons à recevoir des moteurs », a-t-il tenu à rassurer, précisant que le nombre d’A320neo sans moteur était redescendu à 86 appareils le dernier jour de juin, contre un peu plus d’une centaine un peu plus tôt dans l’année.
Il rappelle aussi que pour Airbus, la problématique était davantage de livrer que de produire. Bien sûr, l’avionneur aurait pu baisser les cadences d’assemblage des monocouloirs en attendant la livraison des moteurs, mais Guillaume Faury précise que cette solution aurait rendu difficile le rattrapage du retard vis-à -vis des clients. « Nous devrions avoir résorbé notre retard d’ici la fin de l’année et nous poursuivrons le ramp-up » a-t-il annoncé. Pour rappel, avec la mise en place récente de la quatrième ligne d’assemblage final de la famille A320 à Finkenwerder, les 8 FAL de monocouloirs d’Airbus à travers le monde pourront produire 60 appareils par mois l’année prochaine.
Autre bonne nouvelle pour Airbus, la production de la famille A350 XWB poursuit sa montée en cadence de façon quasi linéaire, Guillaume Faury confirmant que la cadence 10 serait atteinte à la fin de l’année. L’avionneur a déjà livré 10 exemplaires de plus au premier semestre cette année que sur la même période l’année dernière (dont les deux premiers A350-1000 pour Qatar Airways et Cathay Pacific) et les choses vont grandement s’accélérer au second semestre, notamment pour la version la plus capacitaire. Les prévisions de livraison d’A330 et d’A380 programmées pour l’année restent inchangées (respectivement 60 et 12 exemplaires).
L’objectif des 800 avions commerciaux livrés en 2018 reste d’actualité, même si « cela sera difficile » a cependant concédé Tom Enders.