Si le transport aérien a été frappé de plein fouet par l’effondrement du trafic, les effets du coronavirus ont mis quelques semaines de plus à se faire sentir dans l’industrie aéronautique. Personne ne doutait que cette crise sanitaire allait avoir des conséquences à moyen terme sur les commandes, les livraisons, le rythme de production…, mais la célérité de la propagation du virus en Europe et les mesures de confinement décidées par une partie des gouvernements ont accéléré le cours de l’histoire.
Certes, les acteurs de l’aéronautique – en France du moins – avaient commencé à préparer la mise en place de mesures pour le télétravail, la distanciation des employés, voire la séparation des équipes. Jusqu’au 15 mars environ, tout semblait réuni pour que l’industrie continue de tourner. Le confinement total annoncé le 16 mars puis effectif le lendemain midi a tout changé.
Il n’en fallait pas moins pour jeter le doute sur le niveau des mesures prises, notamment pour la protection des fonctions de production très exposées et non éligibles au télétravail. Plusieurs syndicats ont rapidement exigé un arrêt total et immédiat du travail pour protéger les salariés. Une mesure extrême, sans doute indispensable, à laquelle les industriels se sont résolus avec plus ou moins de bonne volonté.
L’enjeu est désormais la reprise du travail dans des conditions sanitaires satisfaisantes. Si la santé des personnes doit rester la priorité absolue, directions comme syndicats savent qu’ils ne doivent pas tarder à s’accorder sous peine de compromettre l’avenir des entreprises. Chaque jour qui passe sans production, c’est de la trésorerie qui disparaît alors que celle-ci sera vitale pour rebondir après crise.
Le coronavirus va en effet coûter cher, très cher. L’effondrement du trafic a déjà provoqué la faillite de certaines compagnies et mis à mal les autres. Des reports, voire des annulations de commandes sont inévitables. Et les constructeurs devront se montrer compréhensifs sur l’aménagement des livraisons et des paiements sous peine de voir disparaître d’autres transporteurs.
Dans le même temps, ces grands acteurs doivent s’assurer de la pérennité de leur chaîne d’approvisionnement, déjà sous tension avant crise. Le ralentissement de la production dans un système dimensionné pour une hausse des cadences pour encore plusieurs années va entraîner une explosion des coûts. Cette situation va mettre à genoux nombre de fournisseurs de rang inférieur et sans doute aussi quelques acteurs majeurs.
Les constructeurs et les grands équipementiers ont donc l’obligation de trouver très rapidement un équilibre entre l’exigence sanitaire, la reprise de la production, l’aménagement des cadences et la préservation des capacités de financement. Et les Etats doivent aussi prendre rapidement leur part dans cet équilibre, sous peine de voir des pans entiers de l’industrie aéronautique européenne s’effondrer. Le temps est compté.