Visiteurs, exposants, nouveautés, contrats, etc. tous les éléments étaient réunis au salon MRO Americas, du 10 au 12 avril à Orlando (Floride), pour confirmer encore une fois le dynamisme du secteur de la maintenance. Si les chiffres ont varié quelque peu, chacun s’est accordé à dire que les perspectives de croissances sont immenses avec la combinaison de plusieurs facteurs : croissance de trafic aérien, maintien des carnets de commandes à des niveaux records, augmentation de l’externalisation avec l’apparition de nouveaux opérateurs et les choix économiques de certaines compagnies traditionnelles, allongement de la vie opérationnelle des avions, multiplication des équipements, création de nouvelles offres de services, etc.
Richard Brown, consultant principal Aérospatial et MRO pour le cabinet ICF, estime ainsi que le marché va doubler dans les vingt prochaines années. Son volume d’affaires passerait ainsi de 76 milliards de dollars par an aujourd’hui, à 140 milliards en 2037, sous l’impulsion des marchés émergents, Asie-Pacific en tête.
Cette bonne santé actuelle se traduit aussi dans l’innovation avec la transformation numérique et l’utilisation massive de données. Cela ouvre de nombreuses perspectives pour l’optimisation de la maintenance : allongement des intervalles entre deux visites, passage du préventif au prédictif, cercles d’amélioration continue où le retour d’expérience opérationnelle vient bénéficier à la conception et à la production pour les EOM, nouveaux outils, etc.
Au-delà du miroir
La vitrine est belle, mais elle ne doit pas cacher les nombreux défis que doit affronter le monde la MRO. La disponibilité des pièces au plus près des clients reste un enjeu majeur auquel les EOM et les sociétés de MRO ont encore du mal à répondre. Les outils numériques peuvent certes aider à anticiper la demande, mais cela ne suffit pas à structurer l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Certains petits fournisseurs ont du mal à absorber les variations brutales de cadence, notamment sur les pièces à long cycle de production, alors que leur dimensionnement les oblige à prévoir les stocks de rechanges au plus juste sous peine de voir les prix s’envoler.
D’ailleurs, ce sont souvent ces mêmes fournisseurs qui ont du mal à prendre le virage du numérique, faute de capacités d’investissements ou de recrutement de gens qualifiés sur ces nouvelles technologies. Ce problème est aussi présent chez nombre de petites sociétés de MRO, compléments locaux indispensables aux grands réseaux mondiaux. Ainsi prennent fin la continuité numérique et les cercles d’innovations voulus par les EOM. Malgré les initiatives des grands du secteur pour les aider, la fracture numérique prendra du temps à être réduite.
Ces « petits » risquent également d’être mis à mal par les bouleversements que connaît le secteur, avec une consolidation de plus en plus forte : Rockwell et B/E Aerospace, Safran et Zodiac, Melrose et GKN, etc. A cet expansionnisme horizontal des équipementiers s’ajoute celui vertical des constructeurs, à commencer par Boeing et Airbus. Les acteurs locaux risquent donc d’avoir du mal à trouver leur place – si ce n’est en s’alliant aux géants mondiaux – et de subir de plein fouet la pression actuelle sur les prix, tout comme la course à la technologie.
Toutes les parties prenantes devront enfin résoudre un dernier problème : le recrutement. La croissance de l’activité se conjugue actuellement avec un trou générationnel, et le manque de personnels qualifiés commencent à se faire de plus en plus prégnant à tous les niveaux : ingénieurs, techniciens et mécaniciens. Le secteur doit donc tout mettre en oeuvre dès les prochains mois pour développer ses capacités de formation, mais aussi attirer des jeunes vers ces métiers de la mécanique, sous peine de faire face à une réelle pénurie de main-d’oeuvre dans les cinq prochaines années. Là encore, les « petits » risquent d’être les premiers à en subir les conséquences.