Le secteur du transport aérien n’a pas fini de se battre pour redécoller. Alors que les vols internationaux restent en grande majorité cloués au sol et que les restrictions de déplacement demeurent, les organisations internationales représentatives des acteurs du secteur travaillent d’arrache-pied à convaincre les gouvernements de mettre en place des politiques de dépistage systématique avant les voyages et de les coordonner, afin de permettre la réouverture des frontières et la levée des mesures de quarantaine, qui ont le même effet qu’une interdiction d’entrée.
Dans ce contexte, l’OACI vient de publier un guide sur le dépistage et les mesures de gestion des risques transfrontaliers, élaboré par un groupe de travail rassemblant plusieurs gouvernements, des centres de contrôle et de prévention des maladies, l’OMS (Organisation mondiale de la santé), l’IATA, l’ACI et des représentants de l’industrie aérospatiale. Ce manuel se veut un outil d’évaluation des risques, utilisable pour la mise en place de programmes de tests covid dans le cadre du transport aérien, en plus de toutes les autres mesures recommandées pour éviter la propagation de l’épidémie lors des déplacements (port du masque, désinfection régulière des avions et des aéroports, respect des gestes barrière etc.).
Un passeport sanitaire numérique
C’est dans ce cadre que l’IATA a annoncé le développement de son « Travel Pass », un passeport sanitaire numérique. Le travail sur ce nouvel outil a déjà bien avancé puisque l’association en est à la phase finale de développement. Il a pour fonction de gérer, vérifier et faire circuler les informations sur les tests et, ultérieurement, les vaccins entre les gouvernements, les compagnies aériennes, les laboratoires et les passagers.
Le Travel Pass doit ainsi permettre aux laboratoires de fournir des certificats sanitaires au format numérique qui soient reconnus par les gouvernements et aux gouvernements de vérifier l’authenticité du test et de l’identité du passager. Avec lui, les compagnies aériennes doivent pouvoir fournir à leurs passagers des informations fiables sur les politiques de test au départ et à destination et vérifier qu’ils peuvent voyager. Quant aux passagers, ils pourront obtenir des informations sur la nécessité et l’endroit où réaliser un test (ou un vaccin) et présenter leur passeport sanitaire aux compagnies et aux autorités en aéroport.
Le Travel Pass a été développé en collaboration avec IAG et sera testé avec le groupe. L’IATA espère ainsi fournir un outil de réouverture des frontières et d’élimination des quarantaines, disponible dès le premier trimestre 2021.
Des programmes-pilotes concluants
Plusieurs programmes de dépistage ont été réalisés et ont donné des résultats encourageants. A Toronto, les autorités ont testé les passagers à l’arrivée à trois reprises : au moment du débarquement, cinq jours après puis quatorze jours après leur arrivée. L’étude a détecté 1% de passagers positifs, dont 70% ont été détectés par le premier test. Le risque qu’un passager infecté ne soit pas identifié est ainsi de 0,3%, ce qui est inférieur à la prévalence du virus au Canada.
En Italie, des tests de dépistage ont été réalisés au départ sur la liaison entre Milan et Rome. Ils ont détecté 0,8% de passagers atteints de la covid-19. L’IATA souligne que cette proportion est supérieure à la prévalence en Italie au moment de l’essai, ce qui démontre l’efficacité de la politique de tests systématiques y compris pour détecter les cas asymptomatiques.
L’association estime ainsi qu’en partant du postulat que les tests identifient correctement 75% des passagers porteurs du virus de la covid-19, le risque qu’un passager infecté passe hors des mailles du filet du dépistage est de 0,06% dans un pays où la prévalence est de 0,8%.
Mais l’idée de mettre en place une politique de dépistage fait son chemin dans le monde, même lentement. Des tests antigéniques se déploient en France, par exemple. Même le Royaume-Uni se prépare à faire un pas vers l’allègement de ses mesures de quarantaine en mettant en place un système de « test to release » à partir du 15 décembre : les voyageurs volontaires à destination du pays devront réserver un créneau de test avant leur vol pour se faire dépister cinq jours après leur arrivée, afin de réduire leur quarantaine de quatorze à cinq jours. Le test sera à leur charge (entre 65 et 120 livres). British Airways et Virgin Atlantic ont salué cette avancée mais continuent de réclamer une politique de dépistage avant les vols.
Mais il reste du chemin à parcourir, notamment sur la coordination des mesures. Chaque gouvernement a agi individuellement sans concertation jusqu’à présent, entraînant une complexité pouvant être décourageante pour les passagers. Les appels de l’IATA, de l’ACI et des compagnies individuelles continuent donc d’être lancés pour la mise en place d’une politique harmonisée et mutuellement reconnue, ce qui semble vouloir débuter (difficilement) avec la création de bulles ou couloirs de voyage. Et à côté de cela, Qantas envisage de rendre obligatoire la vaccination à ses passagers internationaux…