« Ce n’est jamais une routine d’envoyer un satellite en orbite », confiait avec soulagement Jan Wörner, directeur général de l’Agence spatiale européenne (ESA), après la réussite du lancement du satellite d’observation Aeolus le 22 août. C’est encore plus vrai lorsqu’il s’agit de la concrétisation de près de vingt ans de travail. Sélectionné par l’ESA dans le cadre du programme Living Planet en 1999, le satellite Aeolus (qui doit son nom à Eole, gardien des vents dans la mythologie grecque) doit mesurer les vents terrestres au cours des trois prochaines années. Son travail permettra d’améliorer la connaissance de notre atmosphère et des changements climatiques.
Initialement prévu le 21 août, le lancement du satellite d’observation des vents avait été reporté de 24 heures pour cause de… vent en altitude au dessus du Centre spatial guyanais (CSG), comme l’a fait malicieusement remarquer Jan Wörner. C’est donc le 22 août, à 21h20 UTC (23h20 heure française, 18h20 heure locale), qu’Aeolus s’est élevé dans le ciel de Kourou à bord du vol VV12 du lanceur Vega d’Arianespace.
Très précisément 54 minutes et 57 secondes après le décollage, le satellite de 1 357 kg a été relâché par l’étage supérieur AVUM (Attitude and Vernier Upper Module) de Vega sur orbite héliosynchrone. Il évoluait alors à 323 km d’altitude avec une vitesse de 7,78 km/s, conformément au profil de la mission.
C’est le 12e tir du lanceur Vega, le premier cette année. © ESA / S. Corvaja
Courte incertitude
Ces performances nominales n’ont pourtant pas empêché quelques sueurs froides aux équipes de l’ESA et d’Arianespace, ainsi qu’à celles d’Airbus Defense & Space. Dans les minutes suivant la séparation, Aeolus devait commencer à émettre et confirmer ainsi sa mise en route, son positionnement face à la Terre, ainsi le déploiement de ses panneaux solaires (rapidement indispensable au vu de la faible capacité de ses batteries). Et le satellite s’est fait quelque peu attendre.
La réception du premier signal était prévue à 22h16 UTC par la station terrestre de l’ESA à New Norcia, en Australie. Il a finalement été capté à 22h30 UTC par la station norvégienne de Troll en Antarctique. Cette confirmation fut accueillie non sans joie et un certain soulagement dans la salle de contrôle du CSG.
La suite des opérations est désormais entre les mains de l’ESOC, le Centre européen des opérations spatiales, à Darmstadt en Allemagne. Les équipes de l’ESA vont poursuivre la mise en service progressive du satellite pendant les trois prochains mois. Il devrait donc être pleinement opérationnel avant la fin de l’année.
Combler le manque dans l’étude des vents
Une mission d’observation de trois ans débutera alors, toujours sous la conduite de l’ESA. Aeolus doit permettre de combler le manque de moyens de mesures des vents à l’aide d’Aladin, instrument novateur qui constitue le coeur de la mission (voir encadré).
Pour y arriver, le satellite scrutera les vents à travers le globe pour établir leurs profils et étudier notamment leur influence sur l’échange de chaleur et d’humidité entre la surface de la Terre et l’atmosphère. Les données recueillies doivent permettre de renforcer la compréhension des dynamiques à l’oeuvre dans notre atmosphère et de leur impact sur le changement climatique, ainsi que d’accroître la précision des prévisions météorologiques.
Le lidar à effet Doppler Aladin permettra la mesure des vents. © ESA / ATG