Partenaires de longue date, le CNES et ArianeGroup ont décidé de s’associer plus étroitement pour le développement de futurs lanceurs. Le 21 février, Jean-Yves Le Gall, président de l’agence spatiale française, André-Hubert Roussel, président exécutif du groupe industriel, ainsi que Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, ont signé un protocole d’accord pour mettre en place une plateforme commune afin de mutualiser leurs efforts de R&D en la matière. Baptisée ArianeWorks, elle doit voir le jour d’ici avril 2020.
Cette nouvelle plateforme va accueillir des équipes des deux protagonistes, afin de les faire collaborer plus étroitement. Le but est de leur offrir « un environnement agile », mais aussi « ouvert à l’international et aux nouveaux acteurs ». Elle veut ainsi accélérer le temps de l’innovation en matière de lanceur, en y associant directement des laboratoires, des start-up, des PME, des ETI, voire d’autres grands industriels de l’écosystème spatial européen.
Prochaine génération de lanceurs
ArianeWorks entend ainsi pouvoir proposer des réponses pertinentes au Future Launchers Preparatory Programme (FLPP) – New Economic Opportunities (NEO) de l’ESA, lancé fin 2016 pour préparer la succession d’Ariane 6 et Vega C. Comme l’explique Jean-Yves Le Gall, « ArianeWorks a pour mandat de préparer au niveau français, les dossiers des lanceurs du futur, qui seront présentés à la prochaine Conférence ministérielle européenne ». Celle-ci doit se tenir à Séville, en Espagne, à la fin de l’année.
ArianeWorks se positionne donc sur la mise au point du futur lanceur lourd européen, à travers le projet baptisé Ariane Next. Celui-ci pourrait potentiellement être réutilisable, grâce au moteur Prometheus, actuellement en développement et qui doit être opérationnel à l’horizon 2030.
Le CNES et ArianeGroup travaillent déjà à ce sujet avec le DLR allemand et la JAXA japonaise, pour développer un démonstrateur de premier étage réutilisable baptisé Callisto (Cooperative Action Leading to Launcher Innovation in Stage Toss-back Operations). Haut de cinq mètres pour un mètre de diamètre, il doit voler fin 2020 pour étudier le retour sur terre après un lancement.
Pour autant, ce chantier est déjà bien engagé et ArianeWorks devrait davantage se consacrer au démonstrateur de lanceur réutilisable Themis, considéré comme la véritable première étape sur la feuille de route d’Ariane Next. Dix fois plus gros que Callisto, il pourrait voler en 2025.
Exemple à suivre
A travers d’ArianeWorks, le CNES et ArianeGroup veulent capitaliser sur l’exemple de Prometheus. Les deux partenaires avaient commencé à travailler de leur propre initiative sur ce moteur potentiellement réutilisable dès 2015, avant de l’inscrire dans le cadre du FLPP-NEO deux ans plus tard. L’ESA alors pris le relais en signant un contrat de 75 millions d’euros en décembre 2017 avec ArianeGroup, pour lancer le développement, la fabrication et les essais de deux prototypes.
Ce projet recouvre aussi un aspect économique, avec l’objectif de mutualiser les investissements et de dégager des synergies entre les différentes équipes et matériels de recherche. Cela doit aussi profiter par capillarité aux différents acteurs qui pourraient être associés à la plateforme.
ArianeWorks doit ainsi répondre aux impératifs de coûts qui régissent de plus en plus l’industrie spatiale dès les activités de R&D. C’est notamment le cas dans le domaine des lanceurs où l’Europe doit affronter une concurrence de plus en plus féroce, avec les acteurs du New Space – qui bénéficient notamment des contrats étatiques américains pour financer leur développement – et les industriels étatiques chinois et indiens.