Comme annoncé dans nos colonnes la semaine dernière, Florence Parly a lancé officiellement l’étude Man Machine Teaming, le 16 mars, dans les locaux de Dassault Aviation à Saint-Cloud. C’est pourtant une autre annonce qui a marqué les esprits. La ministre des Armées a en effet annoncé, à la surprise générale, la création d’une Agence d’innovation de défense cette année.
Placée sous le patronage de la Direction générale de l’armement (DGA), cette agence sera chargée de structurer des projets de R&D afin de favoriser l’émergence des innovations de rupture, et de réduire leurs cycles de développement avec des expérimentations rapides.
Pour Florence Parly, l’agence doit permettre à la DGA de s’ouvrir vers l’extérieur, et ainsi de créer des relations avec les acteurs du monde civil porteurs d’innovation : PME, start-up, laboratoires… La ministre veut ainsi que la R&D militaire profite de la fertilisation croisée avec les autres secteurs, tout particulièrement dans le monde numérique.
L’intelligence artificielle, futur nerf de la guerre
Son action s’articulera donc largement autour de l’utilisation des nouveaux outils numériques, avec l’exploitation massive des données, l’apprentissage automatique et désormais l’intelligence artificielle. Cela suit, entre autres, la recommandation du député Cédric Villani, qui a identifié le secteur de la défense comme prioritaire pour l’investissement dans sa mission sur l’intelligence artificielle.
La nouvelle structure sera progressivement dotée d’un budget de 100 millions d’euros par an. Environ 60 millions d’euros seront consacrés à la menée d’études comme MMT, contre 10 millions d’euros aujourd’hui. Ce budget entre dans le cadre du passage des dépenses de R&D de 730 millions d’euros à un milliard par an, prévu à partir de 2022 par la nouvelle loi de programmation militaire (LPM 2019-2025).
L’Agence d’innovation de défense viendra s’ajouter aux autres dispositifs déjà annoncés par le ministère des Armées : le fonds Definvest, créé en novembre 2017 et qui fera bientôt son premier investissement selon Florence Parly, ainsi que l’Innovation Défense Lab, qui sera lancé cette année. Ce dernier aura notamment pour but de réaliser une veille technologique et d’identifier les acteurs porteurs d’innovation.
Le MMT, précurseur des futurs projets
L’étude MMT se veut un « prototype » des projets que lancera la future agence. Son objectif est de développer des applications opérationnelles de l’intelligence artificielle pour l’aviation de combat. La DGA a ainsi notifié un contrat de 30 millions d’euros sur trois ans à Dassault Aviation et Thales, avec un cadre qui laisse beaucoup de liberté pour innover selon Joël Barre, délégué général pour l’armement.
Les deux industriels auront un rôle « d’architecte et d’intégrateur », comme l’explique Eric Trappier, P-DG de l’avionneur. Ils devront structurer un « écosystème » autour d’eux pour identifier et développer ces fameuses innovations de rupture. Il sera composé de plus d’une centaine de PME, de start-up et de laboratoires, issus du monde civil, militaire ou académique.
Un certain nombre de sujets de recherche va ainsi être défini par la DGA, avec à chaque fois plusieurs sous-thèmes. Des pôles d’une dizaine d’acteurs seront constitués pour travailler dessus, sous l’égide des grands industriels qui devront fédérer les avancées réalisées. Si les thèmes ne sont pas encore connus, le ministère des Armées évoque des applications telles que « la reconnaissance automatique d’images, guerre électronique, combat collaboratif, navigation autonome des robots, cybersécurité, maintenance prédictive, aide à la décision et au commandement, etc. »