La recherche pour déployer l’utilisation du carburant durable d’aviation (SAF) accélère. Dans le cadre d’une rencontre organisée par l’AJPAE le 10 juin, Airbus et Safran ont annoncé le lancement d’une étude en vol qui doit analyser les effets de l’utilisation de 100% de SAF sur les monocouloirs. Mis en place dans le cadre du plan de relance aéronautique, le projet VOLCAN (VOL avec Carburants Alternatifs Nouveaux) rassemble Airbus, Safran, Dassault Aviation, le ministère des Transports et l’ONERA et prévoit de faire voler un A320neo d’essai motorisé par LEAP avec 100% de carburant durable avant la fin de l’année.
Partant du constat que l’avion à turbines à gaz va rester la norme d’ici 2050 pour le moyen et le long-courrier, les industriels se concentrent sur le « verdissement » du carburant qu’il va utiliser, qu’il provienne de la biomasse ou qu’il soit synthétique. Dans les deux cas, le carburant est « chimiquement similaire » au kérosène donc ne nécessite pas un changement majeur de l’infrastructure liée. En revanche, plusieurs questions se posent et doivent être explorées comme la compatibilité avec les systèmes actuels qui sont en contact avec le carburant (moteur, pompes, valves, joints…) ou la viabilité économique et environnementale des solutions disponibles.
Le premier objectif de VOLCAN est de comprendre les caractéristiques des différentes sources de carburant durable d’aviation et leur impact sur les performances de l’avion, sur les équipements et matériaux en service, sur la combustion et sur les émissions.
Jean-Brice Dumont, EVP Ingénierie d’Airbus, indique que les simulations et essais déjà effectués montrent « une amélioration des performances » au niveau de l’avion, qui entraîneront une réduction de la consommation. Mais l’impact au niveau des émissions doit être mieux analysé, qu’il s’agisse de CO2, de NOx ou de particules, au vol comme au sol, ou de la formation de traînées de condensation.
Stéphane Cueille, directeur R&T et Innovation du groupe Safran, insiste quant à lui sur les propriétés des SAF sur les systèmes et matériaux. Expliquant que toutes les formulations ne sont pas compatibles avec les matériaux actuels (par exemple pour les joints), il souligne que les industriels ont « des latitudes pour les formuler différemment » mais qu’il y aura également des choix à faire concernant les matériaux. D’autres sujets doivent être creusés comme celui de la lubrification des éléments tournants de pompes.
L’ONERA soutiendra Airbus et Safran dans leurs analyses sur les sujets de compatibilité avec les systèmes et d’émissions. Dassault Aviation se concentrera sur les études de compatibilité avec les matériaux et équipements, ainsi que la susceptibilité à la bio-contamination du SAF. Tous s’associeront pour développer des solutions aux différences induites par l’utilisation de ces types de carburant et s’entendre sur des spécifications qui pourront être appliquées à d’autres domaines (les hélicoptères notamment). Quant aux différents carburants qui seront utilisés pour les essais du projet VOLCAN, ils seront fournis par TotalEnergies.
« Nous devrions être dès cette génération [d’avions] capables d’utiliser 100% de SAF », affirme Stéphane Cueille, qui prévoit une certification possible d’ici la fin de la décennie – tout en ajoutant que l’industrie « peut aller plus vite s’il faut aller plus vite ». Reste à ce que la filière de production soit développée en parallèle. « Côté industrie, nous allons faire le travail pour le carburant durable. Mais il reste des investissements colossaux à faire dans le développement de la production », prévient-il.