Suite à la publication du rapport d’information parlementaire sur le transport aérien stratégique, le ministère de la Défense a indiqué qu’il était pour l’instant « prématuré » d’évoquer les réflexions en cours sur la pratique quasi-systématique de l’externalisation pour l’acheminement de fret et de personnels à l’aide de gros porteurs. « Nous venons tout juste de recevoir le rapport et sommes en train de l’étudier, il est prématuré de parler de la suite », a déclaré la porte-parole du ministère. « Vous aurez une réponse complète une fois que nous en aurons pris connaissance », a ajouté le porte-parole de l’état-major des armées. Pas question donc d’évoquer un éventuel achat de gros porteurs, la Loi de programmation militaire actuelle ne prévoyant pas cette option et la prochaine n’étant pas encore à l’ordre du jour.
L’auteur du rapport François Cornut-Gentille a présenté le document lors d’une réunion de la Commission des finances le 28 mars dernier, devant une assemblée très clairsemée – à peine une dizaine de députés présents. Il y pointe notamment le risque que représente la grande dépendance de la France d’entreprises privées russes et ukrainiennes, qui fournissent des avions de type An-124, Il-76, voire An-225 pour le transport de matériels et de militaires sur les théâtres d’opérations. Le document décrit une situation de « fragilité », due à la dépendance des contrats SALIS et ICS (voir : Les fragilités du transport aérien stratégique ), mais aussi au manque capacitaire pour ce type de gros porteurs, au taux de disponibilité des moyens patrimoniaux et à la situation géopolitique en Europe de l’Est.
« C’est un risque consenti », nous a-t-on confié. « Le problème est pris en compte », ajoute un connaisseur du dossier, qui indique qu’en cas d’arrêt des activités russes et/ou ukrainiennes, il resterait toujours le recours aux avions des nations alliées – C-5 Galaxy ou C-17 Globemaster III américains ou canadiens par exemple. A la question de savoir pourquoi ce moyen n’était pas employé plus souvent, la réponse semblerait relever en partie de la facturation et du prix d’exploitation.
Dépendance ou non, il s’agit dans tous les cas d’un enjeu industriel. Le C-5 et le C-17 n’étant plus en production, charge aux avionneurs de leur trouver un remplaçant pour pérenniser les capacités de transport.