Cinq ans après l’ouverture de son Customer Definition Centre (CDC) dédié à la famille de long-courriers A350 XWB à Hambourg Finkenwerder, Airbus a officiellement inauguré son nouvel Airspace CDC la semaine dernière. Le centre de définition cabine d’Airbus a été étendu aux familles A320 et A330, un développement logique qui accompagne évidemment l’introduction des cabines Airspace sur la famille A330neo, désormais en service chez TAP et Air Sénégal, et qui sera aussi proposée dès l’année prochaine sur la famille de monocouloirs A320, la compagnie américaine JetBlue étant la compagnie de lancement.
Mais si le CDC A350 a été un élément clé dans la réussite du ramp-up du programme (aujourd’hui produit à dix appareils par mois), l’extension du CDC aux deux autres familles d’appareils de la gamme de l’avionneur européen montre une réelle volonté d’augmenter sa part de marché dans le design, l’ingénierie et la création des kits cabine, aussi bien pour les appareils sortant de ligne d’assemblage que pour les rénovations des aménagements intérieurs (retrofit).
Les cabines des familles A320 et A330 sont quant à elle particulièrement bien connues des sociétés spécialisées dans l’aménagement, à l’instar des grandes sociétés MRO, mais Airbus possède des atouts indéniables pour pousser ses services, et ce avant même l’introduction de Skywise en cabine pour des besoins de maintenance et d’expérience personnalisée pour les passagers (cabine connectée) dans les prochaines années.
François Caudron, SVP Marketing d’Airbus rappelle que le marché de l’aménagement cabine est en train de vivre d’importantes tendances. Tout d’abord, la fragmentation des cabines suit son cours avec l’existence de cinq types de classes offerts, de la First à la classe économique basique. Les compagnies peuvent ainsi proposer jusqu’à quatre classes par appareil aujourd’hui. Il cite aussi l’émergence des services connectés, qui connaîtront d’ailleurs une nouvelle évolution avec des offres de plus en plus personnalisées pour les passagers. Selon lui, les nouvelles générations partagent de plus en plus de données et ce sera une source de nouvelles opportunités dans les ancillaries. François Caudron a par ailleurs indiqué que si un peu plus de 250 appareils volaient aujourd’hui au standard Airspace (en comptabilisant les A350), ce sont plus de 2 000 cabines Airspace qui seront sur le marché dans cinq ans avec les monocouloirs A320.
Sören Scholz, SVP Cabin & Cargo Programme d’Airbus explique pour sa part que le marché des monocouloirs est en train de changer avec l’arrivée de l’A321LR. Les passagers et les équipages vont voler de plus en en plus longtemps sur l’appareil, ce qui engendre évidemment des travaux d’aménagement et de customisation plus importants dans une cabine qui accueillera les mêmes produits que sur gros-porteurs, notamment en classe affaires. Il note aussi que les compagnies qui ont des flottes multiples tendent à harmoniser leurs cabines, créant de belles opportunités de retrofit.
Pour Stefan Römelt, SVP Engineering et directeur du centre de compétences Cabin & Cargo chez Airbus, l’Airspace CDC « est un endroit fantastique avec beaucoup d’outils numériques, de réalité virtuelle… ». « Mais en plus nous travaillons directement avec les clients et c’est une grande satisfaction », a-t-il précisé. Il explique aussi que l’Airspace CDC permet aux clients de tester de nouveaux concepts et de collaborer davantage pour mettre en oeuvre les standards de demain. Stefan Römelt note que l’Airspace CDC comprend désormais toute la gamme proposée par l’avionneur européen, à l’exception de l’A220 d’Airbus Canada. La cabine de d’ex-CSeries de Bombardier aurait ici tout son sens, à l’instar du mock-up présenté sur le stand d’Airbus à Aircraft Interiors, mais aucune décision allant dans ce sens n’a pour l’instant été prise.
La salle dédié à la projection en 3D des Digital Mock-Up.
Comme annoncée il y a deux ans, l’extension du CDC a ajouté quelque 4 500 m2 d’espace de travail supplémentaire grâce à l’utilisation d’un hangar datant des années 30 et adjacent à celui du CDC A350. L’Airspace CDC occupe ainsi plus de 8 000 m2 sur deux niveaux à l’intérieur de deux des plus anciens hangars de la plateforme. En plus de l’accueil, le rez-de-chaussée de la nouvelle extension est divisé en deux parties de surface équivalente, une par famille d’appareils, afin d’accueillir différents mock-ups de démonstration et de définition cabine pour les clients.
Une multitude de palettes de couleurs et de matériaux sont disponibles pour l’aménagement des A320 et A330.
L’étage accueille quant à lui le Design Studio ainsi que de nombreux espaces communs comme des salles de réunion, une cafétéria, un salon et un espace dédié aux innovations. La logique est finalement la même que celle du CDC A350, mais avec quelques nouveautés, à l’instar de la « Projection Room », une salle qui permet de visualiser « in-situ » les potentiels conflits entre les équipements cabine (sièges, monuments) et le cheminement d’un trolley par exemple et qui cette fois est réalisée à l’aide d’une projection laser entièrement configurable (déplacement dans toutes les parties de la cabine), contrairement aux marquages au sol de la salle dédiée du CDC A350.
La nouvelle « Projection Room » avec la projection laser de sièges au sol.
L’une des innovations majeures du CDC est l’eDMU (early Digital Mock-Up) de l’A350 introduit en 2017 et qui permet aux clients de visualiser très tôt la cabine en détail et en 3D, bien avant le gel définitif de la configuration. Cette innovation a permis de résoudre des problèmes jusqu’à six mois avant le traditionnel processus, par exemple pour simuler et modifier une configuration qui ne permettait pas l’évacuation d’un passager allongé sur un brancard. Eric Ezell, directeur de l’Airspace CDC annonce que cette innovation pourra aussi être déployée sur les A320 et A330 même si « cela va prendre du temps ». Il rappelle que l’Airspace CDC peut désormais accueillir les équipes de jusqu’à cinq compagnies aériennes distinctes. Les clients restent en moyenne entre 10 et 15 jours au total sur place pour la définition de leur cabine, d’abord une demie semaine pour en définir les grandes lignes puis plus longtemps ensuite pour le développement détaillé.
Le processus complet s’étale généralement sur plusieurs mois mais comme l’explique
François Caudron, « il est normal que les compagnies aériennes y consacrent du temps, c’est par la cabine qu’elles gagnent de l’argent. »
Les nouveaux XL Bins de l’A320, désormais en service sur un A321neo d’American Airlines et qui feront partie intégrante de la cabine Airspace pour les monocouloirs qui sera introduite par JetBlue l’année prochaine.
Un mock-up physique dédié aux configurations haute densité de la famille A320 (188 sièges pour l’A320 et 240 sièges pour l’A321), avec l’agencement smart-lav, dernière rangée et porte arrière.
Le compartiment de rangement de plafonnier (Centerline Ceiling Stowage – CCS) d’HAECO Cabin Solutions destiné aux appareils de la famille A320. Le CCS avait intégré le catalogue des équipements optionnels SFE d’Airbus il y a deux ans.
Une démonstration de réalité virtuelle pour la cabine A330.
Des vitrines montrant les divers équipements de secours disponibles pour le long-courrier A330.