Le couperet n’a pas tardé à tomber. Le site de Belfast sera le premier touché par la vague de destruction d’emplois lancée par Bombardier dans le cadre d’un énième plan de restructuration. La direction du site nord-irlandais a annoncé le 21 novembre que pas moins de 490 postes y seraient ainsi supprimés. Il ne s’agit que des prémices d’une manoeuvre beaucoup plus large, le constructeur canadien ayant annoncé sa volonté de réduire ses effectifs de 5 000 personnes dans les 12 à 18 mois.
Il aura donc fallu moins de deux semaines entre la présentation du plan de restructuration, lors des résultats du troisième trimestre 2018, et cette première annonce. Ces suppressions de postes représentent 12 % des effectifs du Bombardier en Irlande du Nord. Elles devraient se traduire par un certain nombre de licenciements, même si la direction annonce qu’elle tentera de limiter leur nombre.
Le coup est rude pour Belfast, où le constructeur est un employeur important. C’est en effet une place forte dans sa chaîne industrielle, avec une présence vieille de plus de cinquante ans. Le site accueille des bureaux d’ingénierie pour les aérostructures métalliques et composites, des services de MRO et surtout des activités industrielles.
En ce qui concerne l’aviation régionale, Belfast est ainsi en charge de la production et l’assemblage des ailes et d’éléments de fuselage du CSeries (devenu l’Airbus A220), du fuselage central complet des CRJ700/900/1000 et des composants montés sur la voilure du Q400.
Pour les avions d’affaires, Belfast produit les fuselages avant et central des Learjet 70/75, le fuselage central des Challenger 350 et 650, ainsi que les nacelles de ce dernier, le fuselage avant, les nacelles et les empennages horizontaux des Global 5000/5500/6000/6500 ainsi que les empennages horizontaux du Global 7500.
Cette décision pourrait aussi se répercuter sur l’importante chaîne d’approvisionnement constituée autour du site de Belfast, qui traite avec plus de 900 fournisseurs à hauteur de plus de 200 millions de livres sterling par an (environ 225 MEUR).
L’aviation régionale dans la tourmente
Après cette première annonce, les autres sites Bombardier à travers le monde retiennent leur souffle. Les prochaines coupes pourraient intervenir dans les effectifs canadiens, qui devraient supporter l’essentiel de l’effort avec 3 000 suppressions de postes selon l’AFP. Mais que ce soit au niveau nord-irlandais ou au niveau mondial, ce sont les activités liées à l’aviation régionale qui seront les plus touchées.
Le constructeur canadien a en effet entamé un mouvement de retrait de ce secteur depuis l’an dernier. Il y a eu d’abord la vente du programme CSeries à Airbus, à travers la Société en commandite Avions C Series (SCACS), même s’il en reste actionnaire à hauteur de 31 %. Puis, encore le 8 novembre, l’annonce de la vente du programme Q400 et de la marque de Havilland à une filiale du groupe canadien Longview Aviation.
Cette situation crée d’importantes inquiétudes chez les salariés de Bombardier, notamment au sein de la section locale du Syndicat des Machinistes AIMTA (Association Internationale des Machinistes et des travailleurs de l’Aérospatiale), qui craignent que la prochaine étape soit la cession des CRJ.
En difficulté financière depuis plusieurs années, Bombardier a été largement impacté par les retards du programme CSeries, mais aussi la baisse d’attractivité des programmes CRJ et Q400 et la longue crise connue par l’aviation d’affaires. Le constructeur a ainsi multiplié les restructurations depuis 2015 – abandonnant même le programme Learjet 85.
Ces décisions se sont accompagnées de multiples plans de licenciements, principalement dans les activités aéronautiques. Tant et si bien que les effectifs affectés à cette branche sont passés de 34 000 personnes fin 2014 à 25 000 fin 2017, et donc peut-être 20 000 fin 2020.