Il était probablement l’avion le plus iconique produit par Boeing, celui qui a rétréci le monde, qui a démocratisé le transport aérien. C’est pourquoi l’avionneur américain a mis les petits plats dans les grands le 31 janvier pour organiser une cérémonie d’adieu digne de son 747 à Everett. C’est là en effet, sur le site de production qui a été créé à sa mesure, que Boeing livre le 1 574e et tout dernier 747 produit et relègue ainsi à jamais le programme au passé. Ce 747-8F rejoint la flotte d’Atlas Air Worldwide.
Le dernier des Boeing 747. Image © Boeing
Boeing avait lancé le 747 en 1966 à partir d’une feuille vierge, en reprenant uniquement le concept de motorisation à taux de dilution élevé mis au point pour le programme militaire avorté du C-5A. Du travail de 50 000 employés, surnommés les Incroyables, naît un appareil de 68,5 mètres de long, le premier à compter deux couloirs et doté d’un étage situé dans une bosse devenue emblématique, et dont l’aménagement a fait l’objet d’une intense compétition entre les opérateurs. Le 747-100 réalise son premier vol le 9 février 1969 et est présenté au salon du Bourget la même année, malgré sa jeunesse. Le premier exemplaire commercial entre en service en janvier 1970 auprès de PanAm, sa cliente de lancement, qui a également participé au développement de l’appareil.
Image © Boeing
Trois versions sont développées : une version passagers, une version fret et une version combi. Ses capacités convainquent la NASA de recourir à deux 747-100 modifiés pour transporter les Navettes spatiales. Au fil des années, d’autres modèles améliorés sont mis en service : le 747-200 (introduit en 1972, avec une capacité de 440 passagers et un rayon d’action de plus de 10 300 km), le 747SP (Special Performance, raccourci de 14 mètres), le 747-300 (mis en service en 1983 et doté d’un pont supérieur allongé), le 747-400 (sorti d’usine en 1988, de nouveau allongé et équipé de winglets) et le 747-8 (2010, le plus moderne, encore allongé à 76,3 mètres et qui intègre des technologies développées pour le 787).
Plusieurs dérivés très spécifiques seront mis en service, comme les deux 747-200B modifiés pour transporter le président des Etats-Unis et devenir Air Force One, un 747-400F militarisé pour le programme Airborne Laser (YAL-1) ou les quatre 747-400 devenus Dreamlifter (modifiés pour transporter les ensembles du 787 entre les sites Boeing).
Malgré des avancées qui améliorent ses performances (dont l’adoption du même type de moteurs que le Dreamliner), le 747-8 arrive sur le marché après l’entrée en service de son concurrent direct, l’A380, après la crise financière de 2008, et alors que les gros-porteurs bimoteurs affichent des performances similaires en termes de capacités et de rayon d’action avec des coûts, en premier lieu de carburant, réduits. Boeing peine à enregistrer des commandes, ce qui l’oblige à réduire progressivement les cadences de production. La version passager, le 747-8I, n’enregistre que 58 commandes (certaines seront abandonnées) et la version cargo, le 747-8F, est commandé à 142 exemplaires. La demande pour les très gros-porteurs étant globalement en déclin, le 747 suit le même chemin que l’A380, dont la production est arrêtée en 2021. Il laisse un grand vide à combler à Everett.
Image © Boeing