C’est un sujet relativement peu abordé et pourtant ce secteur est aussi en train de se développer, venant apporter sa contribution à la lutte contre des phénomènes tels que l’« Air Rage », les incidents liés à des passagers turbulents qui connaissent une certaine recrudescence ces dernières années (lire l’article : L’IATA veut plus de coopération gouvernementale pour lutter contre l’« Air rage »).
Une table ronde était ainsi organisée à Dubaï à l’occasion du salon AIME (Aircraft Interiors Middle East) la semaine dernière et entièrement consacrée à ce sujet. Les caméras en cabine sont en effet déjà une réalité à bord des appareils de certaines compagnies et l’explosion de la connectivité attendue au cours des toutes prochaines années ne devrait qu’amplifier cette tendance, même si la réglementation de certains pays interdit formellement ce type de surveillance pour d’évidentes protections liées au respect de la vie privée.
Selon Peter Schetschine, directeur général de KID-Systeme, la problématique de la sécurité à bord n’est plus simplement un risque terroriste visant le cockpit. Toute la cabine est désormais potentiellement touchée. L’équipementier allemand spécialisé conçoit différents produits pour l’aviation commerciale, notamment des systèmes de gestion électronique de cabine à destination des équipages (Safety) ainsi que des systèmes liés au divertissement des passagers. Peter Schetschine explique d’ailleurs que KID-Systeme s’est lancé dans la conception d’outils de surveillance il y a quelques années, une solution d’ailleurs retenue par Airbus sur le programme A350. Cette plateforme a depuis été rendue « complètement évolutive », du CDSS (Cockpit Door Surveillance System) en passant par la surveillance des soutes et bien sûr des passagers en cabine.
Même son de cloche pour Xavier Carrier, le Directeur de la prospective chez Latécoère. Il rappelle d’ailleurs que les CDSS et les caméras de surveillance en cabine viennent répondre à deux problématiques bien différentes. Le CDSS a pour sa part été imposé par les autorités après les attentats du 11 septembre 2001, et les compagnies aériennes ont dû s’y conformer, alors que pour la surveillance de la cabine et des soutes, c’est un besoin qui a été d’abord identifié par les opérateurs eux-mêmes pour pouvoir décider d’une future action auprès des forces de police ou des compagnies d’assurance.
Xavier Carrier a aussi rappelé que Latécoère avait une longue expérience dans les caméras embarquées, même si le groupe français est évidemment plus connu pour ses éléments d’aérostructures (fuselage, portes cargo, baie avionique) et pour les systèmes d’interconnexion. Latecoère a par exemple conçu le système de caméras d’aide au roulage pour les pilotes à bord des Airbus A340-600 et A380 et est aussi présent sur différents produits reliés aux IFE (caméras extérieures) sur différents Airbus et Boeing. Le groupe français a commencé à s’intéresser aux caméras de surveillance interne des appareils il y a cinq ans, d’abord au niveau des CDSS, puis s’est vite tourné vers la cabine et les soutes. « Nous pouvons désormais facilement enregistrer toutes les images fournies par les caméras afin de pouvoir les rendre disponibles une fois que l’avion est revenu au sol.
C’est d’ailleurs l’un des points essentiels des systèmes de surveillance en cabine. Selon Peter Schetschine, les enregistrements doivent pouvoir être utilisables le plus rapidement possible pour pouvoir agir dès l’arrivée de l’appareil à son point de stationnement. Pour Manuel Herrero, Account Executive Marketing & Sales Europe chez Meggitt – Securaplane, les systèmes de caméra en cabine vont évidemment être de plus en plus présents à bord, mais aussi les liens de connexion entre l’avion et l’aéroport, aussi bien du côté hardware que du coté logiciel. Il a également ajouté que s’il existait des difficultés dans certains pays, empêchant par exemple l’intégration des équipements en line fit, les mentalités sont en train de changer et notamment face au risque terroriste. Selon lui, on imagine déjà des scénarios où des forces d’intervention pourraient s’appuyer sur le système de surveillance présent à bord avant d’intervenir dans un avion.
Autre difficulté relevé par le directeur général de KID-Systeme, la disparité des politiques des compagnies aériennes à ce sujet. Si certaines affichent d’emblée que leur cabine est sécurisée par des caméras dans une logique de dissuasion, d’autres au contraire préfèrent des systèmes de surveillance complètement dissimulés du regard des passagers.