Safran vient de parachever l’intégration des activités électriques de Zodiac Aerospace au sein de son entité Safran Electrical & Power, en inaugurant le 23 septembre son nouveau centre d’expertise électrique. Situé à Créteil, dans le Val-de-Marne, il regroupe les activités des sites de Montreuil, Réau et Saclay autour de la distribution électrique, de l’électronique de puissance et des batteries, des bureaux d’études aux fonctions support, en passant par les bancs d’essai. La cérémonie d’inauguration, qui s’est déroulée en présence du président du groupe Ross McInnes, de son directeur général Olivier Andriès et du ministre des Transports Clément Beaune, a permis au groupe de rappeler les projets sur lesquels cette entité travaille, projets qui doivent façonner l’aviation de demain.
Safran Electrical & Power est en effet un maillon essentiel de la recherche pour la décarbonation de l’aviation puisque la division est en première ligne pour rendre les avions plus électriques et développer la propulsion hybride et électrique. « Nous sommes le seul équipementier travaillant sur toute la palette d’activités – génération de puissance, distribution, conversion d’énergie, moteurs électriques… – y compris le câblage », souligne Stéphane Cueille, directeur général de Safran Electrical & Power.
Actuellement, l’électrification des architectures propulsives a deux grands enjeux : la masse des systèmes et la gestion de la haute tension en courant continu. A ce dernier sujet, Stéphane Cueille explique que la pression en altitude réduit la performance des isolants et peut amener à des décharges partielles. De même, l’industriel a dû développer une technologie spécifique pour la protection du système et la capacité à couper le courant : « lorsqu’un circuit est ouvert, un arc se crée et continue de faire passer le courant. Il est beaucoup plus difficile de l’éteindre en altitude qu’au sol. »
« Aujourd’hui nous pensons que ce qui est raisonnable et accessible c’est un réseau à 1000 volt », poursuit-il. C’est pourquoi les produits développés actuellement s’adressent à des applications « moins sollicitantes », des appareils qui volent bas avec des exigences réduites en autonomie, avec une montée en puissance progressive au fur et à mesure que la technologie avance.
Créteil, haut lieu du développement de la gamme ePower
C’est dans ce cadre que s’inscrit la gamme de produits ePower, dont la conception et le développement seront l’un des fers de lance du site de Créteil. Elle concerne aussi bien les batteries (GENeUSPACK), les moteurs (ENGINeUS), que le système de distribution primaire et secondaire (GENeUSGRID Propulsion) ou le système de gestion de la puissance (GENeUSGRID).
Côté moteurs, trois modèles d’ENGINeUS sont en développement. L’ENGINeUS 50, d’une puissance de 50 kW, est destiné aux architectures électriques distribuées. Il vient de finir ses essais au sol, est en cours d’intégration sur le démonstrateur ecoPulse et devrait réaliser son premier vol en début d’année prochaine.
L’ENGINeUS 50 va équiper l’ecoPulse, le démonstrateur de Daher, Airbus et Safran. Image © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
L’ENGINeUS 100 est plus proche d’une application commerciale. Destiné à l’aviation générale légère (loisir et formation des pilotes), il s’agit d’un moteur intelligent, avec un système électronique et de contrôle intégré, qui évite le recours à un câblage lourd et les susceptibilités électromagnétiques, et un refroidissement à air. Il est en processus de certification et pourrait être certifié dès 2023 (par l’EASA et par la FAA, ayant des applications en Europe et aux Etats-Unis).
L’ENGINeUS 100 de Safran, destiné à l’aviation légère (avions de loisir et de formation), devrait être certifié en 2023. Le premier appareil équipé pourrait être l’eFlyer de Bye Aerospace. Image © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
Enfin, Safran Electrical & Power travaille sur l’ENGINeUS 500, destiné aux avions régionaux de 9 à 19 places et volant plus haut que les avions légers – mais doté d’un refroidissement à huile, contrairement aux deux précédentes versions. Se sentant capable de le faire certifier deux ans après l’ENGINeUS 100, il pourrait toutefois attendre la fin de la décennie pour s’adapter aux besoins du marché.
Bruno Bellanger, directeur général de la division Power, a également présenté les enjeux autour des batteries (GENeUSPACK). Si Safran ne produit pas les cellules, il s’occupe de tout ce qui concerne le « packaging », notamment le système de refroidissement et de protection, qui est critique au niveau de la masse et surtout au niveau de la sécurité – il faut être capable de maîtriser un emballement thermique des batteries et contenir un éventuel feu, alors que les cellules utilisées sont de plus en plus énergétiques. Les équipes basées à Créteil travaillent notamment sur le sarcophage pour le rendre moins lourd (par exemple en utilisant des matériaux composites), la répartition des cellules dans les générateurs et visent déjà la technologie après le lithium-ion, à savoir les batteries lithium-métal. En revanche, ce n’est pas sur les cinq bancs d’essais que compte le site que sont réalisés les tests pour ces technologies mais dans des laboratoires spécialisés, en raison de la particularité des feux de batterie.
Un aperçu du travail de Safran Electrical & Power sur le packaging des batteries. Image © Le Journal de l’Aviation – tous droits réservés
Enfin, le site de Créteil va également apporter sa contribution au programme RISE de CFM, qui vise à une hybridation de l’open fan. Le projet vise notamment à intégrer des « génératrices moteur à l’intérieur du moteur ». Stéphane Cueille souligne que la complexité ne vient pas tant de la puissance nécessaire mais plutôt de l’environnement où vont se trouver ses générateurs : un environnement chaud, compact et allant à haute altitude, le tout avec une exigence maximale de fiabilité et de sécurité puisqu’il s’agit d’une application en aviation commerciale. « Toutes nos technologies visent cela, tout en ayant la capacité à faire d’abord ces applications plus simples. »