2021 aura incontestablement été une très bonne année pour Dassault Aviation qui a vu son chiffre d’affaires atteindre les 7,25 milliards d’euros (+32%), pratiquement du niveau de celui de 2019 (7,34 milliards). Comme prévu, l’avionneur français a livré 25 Rafale (pour l’Inde et le Qatar) l’année dernière (13 en 2020), tournant pratiquement à la cadence de deux appareils par mois. La branche civile a elle aussi tiré son épingle du jeu en dépassant le nombre de Falcon initialement prévu (35 avions livrés contre 30), et alors que les conséquences de la crise liée à la pandémie étaient de fait plus intenses en 2021 que lors de son déclenchement après un trimestre presque normal un an plus tôt. Le bénéfice net ajusté de Dassault s’établit à 693 millions d’euros, contre 396 millions en 2020 (+75%). La trésorerie disponible s’élève à 4,88 milliards d’euros, en progression de plus de 1,4 milliard d’euros en un an.
Mais l’année 2021 aura surtout été une année exceptionnelle en termes de prises de commandes, même si toutes ne figurent pas dans les résultats financiers présentés aujourd’hui par Éric Trappier, le PDG de Dassault Aviation, à l’instar « du plus important contrat jamais signé » par l’avionneur à ce jour, celui des 80 Rafale F4 pour les Émirats arabes unis. Le book-to-bill atteint même déjà 1,67 en 2021.
L’avionneur de Saint-Cloud aura ainsi enregistré des commandes fermes pour 100 nouveaux avions l’année dernière (49 Rafale et 51 Falcon), ainsi que la notification du contrat de MCO verticalisé « Balzac » de la part de la DMAé pour la flotte de Mirage 2000 (hors moteurs) de l’armée de l’Air et de l’Espace jusqu’à leur retrait (14 ans). Ces contrats sont valorisés à plus de 12 milliards d’euros et viennent propulser le carnet de commandes à 20,76 milliards d’euros fin 2021, contre 15,89 milliards un an plus tôt. Dassault Aviation a même placé un Rafale supplémentaire en Égypte, un appareil faisant partie d’une option comprise sur le contrat des 24 premiers exemplaires destinés au Caire et qui viendra donc s’ajouter à la nouvelle commande de 30 avions supplémentaires effective depuis novembre dernier.
Mieux, ne figurent donc pas les 80 Rafale destinés à l’UAEAF (14 milliards d’euros) et contractualisés en décembre dernier, juste après le salon aéronautique de Dubaï. Il manque aussi les 12 nouveaux Rafale promis par la Ministre des Armées Florence Parly après la vente des 12 appareils d’occasion à la Croatie et enfin les contrats déjà annoncés pour 2022 (42 Rafale pour l’Indonésie et les 6 Rafale neufs supplémentaires pour la Grèce qui viennent d’avoir l’aval du parlement). Sans oublier que d’autres contrats potentiels sont toujours d’actualité, comme l’a souligné Éric Trappier durant la conférence de presse. On pense bien sûr à la Serbie, à un nouveau contrat probable en Inde, voire même peut-être à l’Irak. Le carnet de commandes de Dassault atteindra assurément un nouveau sommet cette année, d’autant que la conjoncture pour sa gamme d’avions d’affaires est aussi sur une lancée positive.
L’arrivée des nouveaux Falcon 6X (mise en service en fin d’année) et Falcon 10X (le nouveau vaisseau amiral des avions d’affaires de Dassault présenté en mai dernier et attendu pour la fin 2025) ont logiquement eu leur effet, couplé à la bonne tenue du marché nord-américain (trafic en hausse, stock d’avions d’occasion disponibles au plus bas) et à la reprise du marché en Europe. Le carnet de commandes Falcon se reconstitue (55 appareils restant à livrer au 31 décembre 2021, contre 34 un an plus tôt), représentant une valeur de 3,1 milliards d’euros.
Éric Trappier a cependant annoncé une baisse attendue du chiffre d’affaires pour 2022, avec une prévision de livraisons consistant en seulement 13 Rafale (fin du contrat indien) mais avec par contre une augmentation du nombre de Falcon (35). Le PDG de Dassault Aviation annonce d’ailleurs qu’il dispose d’ « un peu de place » pour quelques Rafale supplémentaires, avant la montée en cadence qui passera bientôt à trois exemplaires par mois pour pouvoir livrer son important backlog, notamment pour les appareils destinés à Abou Dhabi et à Jakarta.
Mais les bons résultats financiers annoncés ce jour par l’avionneur français ont aussi été quelque peu teintés de pessimisme quant aux possibles conséquences directes de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Dassault Aviation est, comme les autres industriels, concerné par les approvisionnements en titane en provenance de Russie, participant à la cellule de crise mise en place par le GIFAS. La supply-chain connaissait déjà des difficultés avant le démarrage du conflit et c’est un sujet qui « peut inquiéter » a expliqué le PDG de l’avionneur. Éric Trappier a également annoncé que l’activité Falcon allait aussi être impactée par les sanctions économiques décidées par l’Union européenne, aussi bien du côté des livraisons d’avions neufs qu’au niveau du soutien des appareils déjà présents en Russie.
Il n’en demeure pas moins que l’année 2022 s’annonce d’ores et déjà comme une année historique, avec la concrétisation d’une multitude de contrats pour préparer l’avenir (Eurodrone, MCO en France, soutien des Rafale à l’export, nouvelles prospections, programmes Albatros et Archange, travaux de développement du standard F4…. Dassault Aviation est au firmament, et pas que grâce au Rafale. Ne manque plus que la Phase 1B du SCAF qui bloque toujours sur les commandes électriques…