C’est un grand bond en avant que viennent de faire les autorités aéronautiques chinoises. L’Administration de l’aviation civile de Chine (CAAC) vient de mener à terme son tout premier processus de certification complet pour un moteur aéronautique. Le WZ16, turbine d’hélicoptère développée par Safran Helicopter Engines avec Harbin Dongan Engine et le Hunan Aerospace Propulsion Research Institute (HAPRI) – tous deux membres d’Aero Engine Corporation of China (AECC) – a ainsi obtenu son certificat de type (TC) le 8 octobre. La nouvelle a été annoncée deux jours plus tard à l’occasion de la China Helicopter Exposition, à Tianjin.
Au contraire des précédents processus de certification qu’elle avait effectués, la CAAC ne s’est pas appuyée sur les travaux préalablement réalisés par ses homologues occidentaux, EASA ou FAA. L’administration chinoise a donc mené elle-même tous les essais nécessaires, avec parfois des critères spécifiques, et a bien attribué un TC et non une validation de certificat de type (VTC) comme c’était le cas jusque-ici. Le WZ16 avait pourtant déjà obtenu sa certification européenne en avril 2018, sous la dénomination Ardiden 3C.
Participation industrielle
De même, le processus de certification a été directement réalisé avec Harbin Dongan Engine. Le motoriste chinois est donc le possesseur du TC, tandis que Safran Helicopter Engines détient le sésame européen. Le motoriste français a tout de même apporté un soutien à son partenaire via sa filiale locale, basée à Pékin, et l’envoi d’équipes sur place. Au-delà de la certification, Harbin Dongan Engine a participé directement au développement du moteur avec la conception du compresseur basse pression (LP) et des accessoires, de même que HAPRI. La production sera répartie à parité entre la France et la Chine.
Le processus a tout de même pris du temps. Si le calendrier est à peu près tenu depuis dix-huit mois – lors de l’obtention du TC européen, la certification chinoise était annoncée pour septembre 2019 – il n’en a pas toujours été de même. Le partenariat entre Safran Helicopter Engines et Harbin Dongan Engine date ainsi de 2008. Et lors des premières rotations du moteur en 2013, la date d’une certification chinoise pour fin 2015 était avancée. Enfin, l’Ardiden 3C/WZ16 a été homologué après l’Ardiden 3G – à l’architecture similaire – pourtant lancé trois ans après.
L’AC352 et le WZ16 lors de leur premier vol en 2016. © Avicopter
Phase d’apprentissage
Quoi qu’il en soit, l’objectif pour les Chinois ne se situe clairement pas du côté du calendrier, mais de l’apprentissage. La Chine n’a jusque-là réalisé que des moteurs militaires et doit encore faire des progrès avant d’arriver à développer un moteur civil certifiable. C’est dans ce but qu’a été créé AECC en 2016 – un consortium public qui regroupe l’ensemble des compétences chinoises sur les moteurs aéronautiques – avec un budget de près de sept milliards d’euros.
L’expérience acquise avec le WZ16 est donc précieuse sur la façon de concevoir un moteur pour Harbin Dongan Engine et le reste du consortium, mais aussi de le certifier pour la CAAC. Et cette expérience pourrait s’étendre à l’après-vente, les dirigeants du motoriste chinois ayant fait part de leur volonté de participer au maintien de la navigabilité et au soutien du WZ16 aux côtés de Safran Helicopters Engines.
Il faudra tout de même patienter encore un peu avant de voir ce moteur de 1700 chevaux sur arbre (shp) en service. Celui-ci doit équiper l’AC352 d’Avicopter, développé à partir du H175 d’Airbus Helicopters. Le couple a volé pour la première fois fin 2016, mais la mise au point de l’hélicoptère demande encore du travail. Il ne devrait pas être certifié avant la fin de l’année prochaine. Il n’y a pas de carnet de commandes connu, mais la Chine n’avait pas hésité à acheter 120 moteurs dès 2014 pour soutenir le programme.