A quelques jours de l’anniversaire du premier accident de 737 MAX, Boeing a fait valser sa première tête. L’avionneur américain a annoncé que Kevin McAllister, président de la division Avions commerciaux, était remplacé par Stan Deal, avec effet immédiat. La décision a été prise le 21 octobre lors d’une réunion du conseil d’administration du groupe américain à San Antonio et Stan Deal occupait son nouveau bureau dès le 22 au matin.
Ancien PDG de GE Aviation Services, Kevin McAllister était arrivé en novembre 2016 à la tête de BCA (Boeing Commercial Airplanes), alors que le développement du MAX battait son plein et quelques mois avant la certification du 737 MAX 8 (mars 2017) par la FAA. Il a donc en partie supervisé le processus, aujourd’hui si décrié en raison du manque de compétences des inspecteurs de la FAA et des certifications réalisées en interne (notamment celle du système de contrôle automatisé de l’assiette, MCAS) par délégation.
Alors que les révélations s’enchaînent et enfoncent chaque jour un peu plus Boeing dans la crise, Kevin McAllister pourrait également payer les problèmes sur les autres programmes qu’il doit superviser. Le 777X est en retard – et pas uniquement à cause de ses moteurs puisque l’avion dédié aux essais de fatigue a perdu une porte lors du test de charge sur les ailes – et se trouverait sous la menace d’une réduction de son carnet de commandes, le 787 n’enregistre pas assez d’accords pour maintenir très longtemps un rythme de production de quatorze appareils par mois et des problèmes de production ont été identifiés à la suite de la découverte d’objets étrangers dans des KC-46. Quant au NMA, qui devait être sa priorité, il a été relégué au placard par le MAX.
Si tout ne relève pas de sa seule responsabilité, il lui est beaucoup reproché son manque de communication et sa difficulté à entretenir les relations avec les clients de l’avionneur. Il était d’ailleurs très en retrait depuis le mois de mars dernier, laissant Dennis Muilenburg sur le devant de la scène assurer la communication de crise. Celui-ci a d’ailleurs également reçu un avertissement il y a deux semaines lorsque Boeing a décidé de séparer les fonctions de CEO et de chairman, attribuant cette dernière fonction à David Calhoun.
Stan Deal est quant à lui un pur produit de Boeing, qu’il a rejoint en 1986. Il était jusqu’alors président de la division Boeing Global Services, qu’il a façonnée depuis sa création en 2016. Il avait auparavant occupé de nombreux postes à responsabilité au sein de BCA, le dernier étant SVP de son entité Services. Dans ses nouvelles fonctions, il va devoir repenser complètement la stratégie commerciale de Boeing et tenter de mettre fin à l’incertitude qui entoure le calendrier de re-certification et de retour en service du 737 MAX en répondant enfin aux exigences d’une FAA devenue plus prudente.
L’avionneur vient d’ailleurs de faire un point sur les mises à jour du MCAS en expliquant qu’il avait ajouté trois couches de protection pour éviter tout nouvel accident et que 800 vols d’essais et de production avaient eu lieu avec le logiciel mis à jour. En parallèle, le travail se poursuit sur la deuxième mise à jour concernant le niveau de redondance des ordinateurs de commandes de vol. Un essai de vol de certification a été réalisé la semaine dernière. Si Boeing espère désormais voir un retour en service au tout début de 2020, il n’est pas à l’abri d’un nouveau report, sans compter que les autres régulateurs dans le monde ne sont plus forcément prêts à suivre la FAA les yeux fermés.