Avec la livraison du premier A350-1000 à Qatar Airways le 20 février, Airbus est désormais armé et prêt à attaquer le marché du Boeing 777-300ER. Et si le programme de Boeing est en décélération avant l’entrée en service en 2020 de son successeur, le 777X, Airbus s’est surtout positionné de façon à prendre sa part du marché de remplacement de la flotte actuelle de Triple Sept. Il reste maintenant à l’avionneur à transformer le spectaculaire essai qu’a été la cérémonie de livraison du premier A350-1000 et à engranger davantage de commandes pour s’imposer sur ce segment des biréacteurs de 350 places. Son compteur de commandes reste en effet bloqué sur 169 exemplaires pour onze clients.
Pourtant, l’A350-1000 réunit tous les atouts. Allongé de 7 mètres par rapport à l’A350-900 et profitant de l’expérience au cours des deux ans de service de son prédécesseur, il a connu quelques modifications qui optimisent ses capacités. Les plus visibles sont l’allongement des bords de fuite, qui améliorent les performances d’approche, et un train d’atterrissage principal à six roues, qui permet de mieux répartir le poids de l’appareil sur la piste. Il a également une plus grande proportion de matériaux composites dans sa structure (54% au lieu de 53% sur l’A350-900).
Une autre modification majeure vient des moteurs. Les Trent XWB-84 de l’A350-900 ont été remplacés par des Trent XWB-97, qui fournissent 97 000 livres de poussée. Extérieurement, les deux modèles sont les mêmes, avec la même nacelle, la même soufflante et 80% d’éléments en communs pour faciliter les opérations et la maintenance. Mais « le système de fan a été optimisé pour permettre de faire passer davantage d’air dans le même diamètre », explique Chris Cholerton, le nouveau directeur de la partie Civil Aerospace de Rolls-Royce, avec une soufflante qui tourne 6% plus rapidement. Au contraire, le coeur du moteur a été grossi pour résister à ce flux plus important et la température est plus élevée dans la chambre de combustion et dans les turbines. Le recours aux disques aubagés a également été accru. Par conséquent, de nouveaux matériaux de revêtement ont été utilisés pour garantir la résistance et la durée de vie des éléments.
« Le 777X ne nous fait pas peur »
« Nous respectons absolument nos objectifs en termes de poids, de bruit et de rayon d’action », affirme Marisa Lucas-Ugena, directrice marketing du programme A350. Mieux, les performances au décollage sont meilleures que prévu, même par temps chaud et en altitude, et, à peine certifié, l’A350-1000 a vu sa masse maximale au décollage augmenter, passant de 308 à 311 tonnes.
Devant concurrencer un 777-300ER en perte de vitesse avant son remplacement par la famille 777X, l’A350-1000 ne craint pas la nouvelle version du Triple Sept. « Le 777X ne nous fait pas peur. Nous bénéficions d’un design complètement nouveau, de l’efficacité, d’un bon rayon d’action [8 000 nm, ndlr] et du confort qui va de pair avec ce rayon d’action », explique Marisa Lucas-Ugena. « Le 777X est un dérivé, avec des compromis dans sa conception qui le rendent lourd : de nouveaux moteurs, ces immenses ailes et un fuselage plus grand. Pour une même mission, un 777-9 vide est aussi lourd qu’un A350-1000 plein. »
Pas de version allongée à l’horizon mais beaucoup de modifications à venir pour l’A350-900
Si le 777X offrira tout de même une plus grande capacité que l’A350-1000, Airbus ne prévoit pas de proposer une version allongée pour le moment. « Nous nous concentrons sur les versions -900 et -1000, qui répondent à l’essentiel du marché », rappelle Fabrice Brégier, qui a quitté ses fonctions de président d’Airbus Commercial Aircraft. « Mais nous pouvons toujours améliorer l’A350. Cet appareil a un potentiel immense. Nous pouvons toujours augmenter la MTOW, le rayon d’action ou réduire la consommation carburant avec des améliorations moteur, des allègements… Vous verrez que, sans changer l’avion, nous pourrons installer plus de sièges et nous rapprocher de la capacité du 777-9. Ensuite, lorsqu’il y aura une nouvelle génération de moteurs, il sera temps de repenser à une version allongée, mais c’est loin. »
En attendant, les nouveautés développées pour l’A350-1000 seront implémentées sur l’A350-900 dès cette année. D’abord mises en service sur l’A350-900ULR cet été, elles profiteront également à la version standard dès 2018. La torsion de l’aile a été modifiée conjointement avec la mise en place de winglets plus longs et les carénages des tracteurs de volets et de la jonction aile-fuselage ont été optimisés, améliorant les performances aérodynamiques de 1%. Didier Evrard, responsable du programme, nous confie également que les encadrements de porte seront désormais en composite – ils sont actuellement en titane sur A350-900.
La première vague des « cabin enablers » sera par ailleurs lancée au milieu de l’année. Un réaménagement des galleys et des cabinets de toilette en porte 4, l’ajout de deux trolleys dans le galley en porte 2 et l’installation de « smart lavatories » permettront de gagner neuf places. Une seconde vague est attendue avant la fin de l’année.