Longtemps regardé avec méfiance et limité à la cabine, l’écran tactile commence à s’imposer dans le cockpit. Gulfstream avait lancé le mouvement en 2014 en présentant sa planche de bord Symmetry pour les G500 et G600, Thales a suivi avec son cockpit FlytX et c’est désormais au tour d’Airbus de franchir le pas sur l’A350. Le 18 décembre, l’avionneur européen a livré à China Eastern Airlines le premier exemplaire (MSN373) doté de trois écrans tactiles, développés en collaboration avec Thales. Le projet avait été dévoilé en 2018 par Flight International, mais Airbus était resté très discret sur le sujet depuis. Cela n’a pas empêché une vingtaine de compagnies de sélectionner cette option, soit près de la moitié des clients de l’appareil.
Sur les six écrans LCD (38 cm de diagonale) que compte le cockpit de l’A350, trois peuvent donc désormais être rendus tactiles. Il s’agit des deux écrans extérieurs du système d’information de bord (OIS) ainsi que de l’écran multifonction (MFD) en position centrale basse. Ce nouveau système de sélection et de navigation vient compléter le clavier intégré à la tablette rétractable et l’unité de contrôle clavier-curseur (KCCU) avec sa fameuse « tarckball ».
Le tactile réservé à l’EFB
L’utilisation de cette fonction tactile est limitée aux seules applications liées aux sacoches de vol électronique (EFB), « pour le moment » du moins selon Jean-Michel Roy, pilote d’essais chez Airbus. Elle n’intervient pas dans le contrôle du système de gestion de vol (FMS). Le tactile concerne donc principalement les deux OIS, qui permettent à chaque pilote d’afficher et de contrôler son EFB, et plus ponctuellement le MFD qui permet un affichage des fonctions EFB commun aux deux pilotes.
Les pilotes pourront donc accéder aux menus EFB, sélectionner des données, faire défiler ou zoomer sur les différentes cartes seulement avec leurs doigts. Airbus estime que cela leur facilitera la tâche et leur offrira plus de flexibilité que le KCCU lors de phases à forte charge de travail. Le constructeur espère ainsi une interactivité renforcée avec les EFB et une meilleure interaction au sein de l’équipage.
Airbus a défini trois scénarios types d’utilisation du tactile. Le premier prend place au moment de la préparation du vol dans le cockpit, avec la possibilité pour le pilote de naviguer dans l’EFB d’une main et de saisir les données dans le FMS de l’autre grâce au KCCU. Le deuxième se situe en vol avec un accès facilité aux cartes de navigation en-route et la possibilité de les afficher sur le MFD pour permettre aux deux pilotes d’interagir ensemble dessus. Enfin le dernier cas se déroule pendant la préparation de l’approche, avec la consultation simplifiée des cartes dédiées.
Cette solution développée avec Thales a reçu l’approbation de l’Agence européenne de la sécurité aérienne (EASA) en novembre dernier. C’est donc une première dans l’aviation commerciale. L’électronicien français précise qu’il a dû pour cela « surmonter un certain nombre de contraintes opérationnelles importantes ». Il cite ainsi la nécessité pour ces écrans « d’offrir une faible réflectivité, fonctionner dans des conditions électromagnétiques denses, résister à des niveaux élevés de vibrations, et maintenir leurs caractéristiques de haute performance au cours du cycle de vie du produit. »