Dans la crise actuelle, le secteur de l’aménagement cabine a du mal à garder la tête hors de l’eau. Les cabinets Tronos Aviation Consulting (TAC) et AeroDynamic Advisory estiment que le chiffre d’affaires du secteur en 2020 correspondra peu ou prou au chiffre d’affaires réalisé au premier trimestre et que les dépenses des compagnies aériennes pour le réaménagement de leurs appareils dans les années à venir pourraient en moyenne être réduites de moitié sur la période 2020-2025. L’activité ne devrait pas être compensée par les aménagements en line-fit en raison des reports de livraison demandés par les transporteurs et la baisse des cadences de production qui en résulte chez Airbus et Boeing.
Rien que sur 2020, les investissements vont chuter de 64% dans l’activité du retrofit, passant d’une prévision (réalisée en 2019) à un peu plus de six milliards de dollars à une prévision à 2 milliards de dollars. Sur la période 2020-2025, les cabinets estiment désormais que les achats de composants majeurs pour le réaménagement (sièges, IFEC, cabinets de toilette, galleys, éclairage, etc) devraient atteindre 23 milliards de dollars. Cela représente presque la moitié de ce qui était attendu dans les prévisions de 2019 (43 milliards de dollars) et un ajustement à la baisse de 20% par rapport aux estimations publiées en juin (29 milliards de dollars).
En ce qui concerne l’activité de l’aménagement des avions neufs, elle devrait subir une réduction de volume assez importante, suivant la baisse des cadences de production des avionneurs sur les prochaines années (jusqu’à 40% en 2021). Elle devrait également ressentir l’impact de la transformation du profil des flottes des compagnies aériennes. En effet, la crise a accéléré le déclin de la demande pour les gros-porteurs et le déséquilibre des livraisons devrait s’accentuer en faveur des monocouloirs. Or l’aménagement d’un gros-porteur peut avoir jusqu’à sept fois la valeur de celle d’un monocouloir, en raison non seulement de la quantité d’équipements nécessaire mais aussi le leur complexité.
En ce qui concerne le marché de l’intérieur cabine, la communication a complètement changé depuis ces quelques mois que dure l’épidémie. Si quelques nouveaux programmes ont encore lancés en faveur du confort des passagers (comme le nouveau fauteuil de classe affaires haut de gamme pour monocouloirs de Stelia Aerospace, Opera), l’essentiel des préoccupations est désormais orienté vers l’hygiène. Technologies sans contact (notamment dans les cabinets de toilette), distributeurs de solutions désinfectantes, revêtements antimicrobiens sur les fauteuils et les tablettes, nouvelles méthodes de désinfection (par UV, ionisation)… sont les nouvelles stars du secteur.
Par exemple, c’est pour s’inscrire dans cette tendance que Panasonic Avionics a lancé en septembre une suite de solutions baptisée « Welcome Aboard », convaincue qu’elle répond aux nouvelles pratiques à mettre en place pour restaurer la confiance des passagers. La société américaine propose ainsi aux compagnies de numériser les magazines de bord, de créer un compagnon de voyage intégrant leurs offres IFE dans leur application mobile, de permettre le contrôle de l’écran du siège avec son smartphone ou sa tablette. La suite comprend également des solutions orientées vers le bien-être, comme sa technologie nanoe (qui permet une désinfection de l’air par ionisation – en classe affaires) ou une application personnalisée qui permet de suggérer au passager le meilleur moment pour dormir ou marcher et mieux gérer les effets du décalage horaire (qui peuvent avoir une incidence sur le système immunitaire).
En revanche, TAC ne voit pas d’avenir pour les premières solutions apparues lorsque la crise a éclaté pour des dispositifs de séparation des sièges. « Je n’imagine pas une compagnie en crise de liquidité dépenser de l’argent pour une solution à court terme », commente Gary Weissel, directeur général de TAC.