Pour Boeing, la crise sanitaire actuelle est certes très difficile mais pas insurmontable. L’avionneur a récemment publié ses prévisions commerciales sur vingt ans et a réalisé un focus régional sur l’Europe qui se montre plutôt optimiste sur la capacité de redémarrage de l’industrie du transport aérien et sa résilience à long terme.
Très loin de l’appréciation d’un organisme comme l’IATA, dont les dernières analyses sont à plus court terme, l’avionneur américain anticipe une reprise forte grâce à une relative cohérence dans la gestion de la crise au niveau européen (certificat covid), la levée des restrictions de voyage et une situation économique encourageante, marquée par un retour du PIB à son niveau de 2019 au quatrième trimestre de cette année, un niveau d’épargne élevé ainsi qu’un bon niveau de confiance des entreprises. Pour lui, bien que les finances des compagnies soient exsangues, les caractéristiques fondamentales du marché n’ont pas changé sur le long terme et la croissance reprendra son rythme une fois passé le trou d’air de la covid-19.
Boeing estime ainsi que les compagnies européennes auront besoin de 8 705 avions neufs d’ici 2040, d’une valeur de 1 250 milliards d’euros. Les besoins se répartissent entre 85 avions cargos, 1 460 gros-porteurs, 7 100 monocouloirs (dont 3 000 pour les dix prochaines années) et 60 jets régionaux. La région représente 20% des prévisions de livraisons d’avions neufs au niveau mondial.
Plusieurs facteurs doivent nourrir ce besoin. Le premier est le niveau de la demande, dont le secteur a pu constater tout l’été qu’elle n’avait pas disparu et ressurgissait dès la levée des restrictions. Le marché loisir reste très puissant et Boeing estime qu’il « sera bien au-dessus de son niveau de 2019 en 2025 ». D’autre part, le transport aérien est dominé par le point-à-point et la puissance des compagnies low-cost, qui ont tendance à reposer leurs opérations sur des flottes sans cesse renouvelées.
Enfin, les préoccupations environnementales vont également jouer un rôle important, la pression de l’opinion publique et des politiques sur l’aviation augmentant constamment face au changement climatique. Si la recherche pour décarboner l’aviation n’a jamais été aussi soutenue, la meilleure solution pour réduire l’impact carbone des opérations aériennes dans l’immédiat est le renouvellement des flottes.
Ainsi, Boeing estime que le Vieux continent verra le retrait de plus de 700 avions à court terme – environ 600 monocouloirs ont plus de vingt ans et 41% sont actuellement immobilisés, tandis que 150 gros-porteurs ont un âge équivalent, dont 30% sont au sol. Leur retrait du service permettrait de réduire de 1,7 milliard de dollars par an les coûts de carburant, de 3,1 milliards de dollars par an les coûts généraux et de 6,5 tonnes par an les émissions de CO2. Bien sûr leur retrait n’aura pas un tel impact puisque d’autres appareils, certes plus performants, doivent prendre leur place.
Cependant, Boeing met en avant que 90% de la flotte européenne de 2040 aura été acquise après 2019, ce qui place la région devant la moyenne mondiale, qui devrait se situer autour des 80%. Sur les 9 140 avions qui devraient la composer, 4 785 auront permis de remplacer des appareils plus anciens et 3 920 permettront de faire croître la flotte.