A l’occasion de la rencontre entre l’émir du Qatar, Sheikh Tamim bin Hamad Al Thani, et le président des Etats-Unis Joe Biden, Boeing a conclu un accord avec Qatar Airways portant sur l’acquisition de jusqu’à cent appareils. Ils se répartissent entre une cinquantaine de 737 MAX 10 et une cinquantaine de 777-8F, ce qui permet à l’avionneur américain de lancer la version cargo du 777X.
Le protocole d’accord portant sur les 737 MAX 10 se décompose en 25 appareils fermes et autant de droits d’achat, d’une valeur de 7 milliards de dollars. Elle vient remplacer un ancien contrat signé avec Airbus portant sur cinquante A321neo, que l’avionneur européen a unilatéralement décidé d’annuler dans le cadre de son différend avec la compagnie. Or Qatar Airways avait besoin de ces appareils pour tester de nouvelles destinations et ouvrir des routes où la demande ne justifie pas l’utilisation d’un gros-porteur. La compagnie avait déjà été cliente du 737 MAX, qu’elle destinait à Air Italy, mais elle avait été annulée.
Le contrat 777X cargo porte sur l’acquisition de 34 appareils en commande ferme et seize options. Les appareils ont une valeur de 20 milliards de dollars, selon les prix catalogue. Vingt d’entre eux viendront de la conversion de vingt des soixante appareils passagers de sa commande initiale pour le programme. Deux 777F supplémentaires font par ailleurs partie de la commande.
Boeing est actuellement en train de développer le 777-8 Freighter. L’appareil devrait offrir une charge maximale de 118 tonnes, équivalente à celle du 747-400F, avec des performances améliorées de 25% en termes de consommation de carburant, et pouvoir parcourir 8 167 km. Il sera produit à Everett.
Le 777-8F arrive tôt dans le programme 777X, alors que le premier modèle de transport de passagers, le 777-9, est encore à près de deux ans de son entrée en service (fin 2023). Un développement inhabituel dans un contexte qui l’est tout autant. En effet, la demande en fret aérien explose et l’industrie estime qu’elle va durer, portée par l’essor du commerce en ligne. Au contraire, le marché des gros-porteurs pour le transport de passagers souffrait déjà avant la crise, les faveurs des compagnies aériennes allant vers les appareils de capacités intermédiaires adaptés au point-à-point et à l’augmentation des fréquences. La survenue de la pandémie a précipité la chute de ce segment et la lenteur de certaines régions à lever leurs restrictions de vols ne fait que retarder la reprise sur le segment international, ôtant souvent toute pertinence à l’utilisation d’appareils de grande capacité dans l’immédiat.
Qatar Airways aura ainsi fait avec Boeing ce qu’elle voulait faire avec Airbus : lancer le nouveau programme de gros-porteur cargo. La compagnie avait en effet très tôt fait savoir qu’elle était intéressée par l’A350F. Mais c’était avant que son différend avec l’avionneur européen au sujet des détériorations de la peinture de certains de ses A350 ne franchisse le point de non retour, avec la décision de Qatar Airways de porter l’affaire devant la justice, celle d’Airbus d’annuler cette fameuse commande d’A321neo puis la publication d’une vidéo des dommages sur les avions.