Alors que 40% de la flotte mondiale est couverte par un contrat de leasing, le secteur de la location d’avion ne crie pas victoire pour autant. Au contraire, l’année 2020 s’ouvre avec son lot de défis à relever. Selon une étude publiée par la société de consulting IBA le 15 janvier, le contexte macroéconomique restera relativement stable mais l’industrie sera secouée par des chocs qui auront des conséquences importantes sur la valeur des contrats de leasing et la structure-même du marché.
Sans surprise, le choc le plus important est l’immobilisation du 737 MAX. Si Boeing semble espérer un redémarrage de la production dès la seconde moitié du mois de février, les conséquences de l’immobilisation devraient se faire sentir plusieurs années. Pour le marché du leasing, les premiers effets ont été bénéfiques puisque le marché des monocouloirs a manqué de capacités, entraînant une extension des contrats et une augmentation de la valeur des familles A320 et 737NG – jusqu’à 7% pour le 737-700 ou 8% pour l’A320neo – tandis que les contrats de location se sont globalement maintenus.
La valeur des monocouloirs en leasing devrait chuter au second semestre…
Actuellement, près de 800 appareils sont cloués au sol : les 350 qui étaient entrés en service avant mars 2019 et les 400 produits jusqu’à la fin de l’année et jamais livrés. Lorsqu’ils reprendront du service – un événement que les compagnies américaines n’espèrent plus avant le mois de juin dans le meilleur des cas -, ils entraîneront un revirement du marché, un déferlement de capacités qui se caractérisera par la chute des prix des contrats de leasing.
Cette surcapacité devrait avoir une autre conséquence : une forte augmentation des conversions de monocouloirs en avions cargo à partir de 2021, lorsque les contrats de leasing qui ont été prolongés pour pallier l’absence du MAX arriveront à terme sur un marché moins tendu.
… tout comme celle des gros-porteurs
Par ailleurs, la valeur des gros-porteurs devrait continuer de baisser. Par exemple, IBA s’attend à ce que la valeur de l’A330ceo décline en moyenne de 10% en 2020, portant la baisse totale à 40% depuis le début de 2019, les tarifs de location suivant la même tendance. Davantage d’appareils sont en effet sur le marché, à la suite des disparitions de WOW Air, Jet Airways ou XL Airways, mais aussi des retraits de Singapore Airlines (dès 2015) puis China Eastern, Cathay, Etihad ou TAP. Pourtant, les compagnies aériennes ont davantage tendance à se tourner vers des appareils de moindre capacité pour leurs opérations long-courrier, ce qui aura également des conséquences pour les programmes les plus capacitaires, comme le 777-300ER. Sa valeur pourrait perdre 10% cette année, alors que les loyers ont diminué de jusqu’à plus de 20% (selon l’âge des appareils).
A noter que tous les programmes de gros-porteurs voient une érosion de leur valeur et de leur taux de location, à l’exception du 787-9.
Vers une consolidation du secteur du leasing
IBA estime que la croissance qu’a connue le secteur du leasing ces dernières années n’est pas durable et que la baisse généralisée des tarifs et des marges à venir va précipiter la chute des acteurs les moins solides. Si 2020 s’annonce comme un meilleur crû que 2019 au niveau de la santé financière des compagnies (les mesures de réduction de capacité ont été prises), toute faillite cause des remous sur le marché de la location aussi en libérant de nouvelles capacités. Les faillites de 2019, pas forcément plus nombreuses que les autres années, ont touché des flottes particulièrement importantes (Jet Airways, Avianca Brazil et Thomas Cook par exemple) et ont mis 430 appareils sur le marché. En 2020, ce sont notamment Hong Kong Airlines, South African Airways et Flybe qui sont en danger, tandis que Norwegian devrait continuer à réduire ses capacités alors que ses signes de faiblesse ont redonné des forces à ses concurrentes sur le transatlantique, tout comme Alitalia.
Par ailleurs, les acteurs se sont multipliés sur le marché du leasing, se basant particulièrement sur le modèle du « sale and lease back », sans toujours atteindre une taille critique les rendant capables de survivre à l’érosion des yields qui doit se poursuivre ou l’ancrage permettant de replacer rapidement les appareils en cas de défaillance d’une cliente.