JetBlue et Spirit Airlines, c’est fini. Le 4 mars, les deux compagnies sont redevenues des concurrentes : elles ont annoncé qu’elles avaient mis un terme à leur accord de fusion, conclu en juillet 2022. Bien qu’elles s’affirment toutes deux convaincues que leur rapprochement se serait fait au bénéfice du transport aérien américain, « nous avons conclu que les obstacles réglementaires actuels ne nous permettront pas de conclure cette transaction dans les délais prévus par l’accord de fusion », a déclaré Ted Christie, le PDG de Spirit – à savoir avant le 24 juillet 2024.
En juillet 2022, JetBlue était en effet parvenue à rafler Spirit Airlines à Frontier (qui aspirait également à fusionner avec la compagnie ultra low-cost) et à présenter le projet de construire la cinquième plus importante compagnie américaine, face aux Big Four. Avec un potentiel de 77 millions de passagers annuels, de près de 12 milliards de dollars de chiffre d’affaires et de 700 millions de dollars de synergies annuelles, la nouvelle JetBlue aurait accéléré sa croissance et se serait renforcée sur ses marchés-clefs, le tout en s’appuyant sur une flotte combinée de 458 monocouloirs d’Airbus (et 300 en commande).
Ce beau tableau n’a toutefois pas convaincu la justice américaine, qui a lancé une action civile contre le projet en mars 2023. Et en janvier dernier, le tribunal de district du Massachussetts l’a bloqué, jugeant qu’il allait à l’encontre des lois américaines sur le maintien de la concurrence. La justice craignait en effet que l’absorption de Spirit Airlines signe la disparition d’un modèle très spécifique (ultra low-cost) et que la nouvelle JetBlue ne soit tentée de se détourner du modèle low-cost elle aussi. Par ailleurs, le tribunal a analysé que les conditions du marché du transport aérien et du recrutement rendaient trop difficile la création d’une nouvelle compagnie pour pallier les manques en offre à bas tarifs que la fusion aurait entraînés.
« Nous pensions que cette fusion valait la peine d’être poursuivie parce qu’elle aurait libéré un concurrent national à bas prix et à forte valeur ajoutée pour les quatre grandes compagnies aériennes », regrette Joanna Geraghty, directrice générale de JetBlue. La compagnie versera 69 millions de dollars à Spirit, ce qui la libérera de toute réclamation.
Désormais, les deux compagnies vont poursuivre leur travail en faveur de leur retour à la rentabilité. JetBlue se recentre sur ses forces – son réseau dans les zones géographiques demandées, la segmentation de son produit – et la réduction de ses coûts, visant une marge d’exploitation proche de l’équilibre cette année. Plus en difficulté, Spirit se concentre elle aussi sur le retour à la rentabilité à l’aide de mesures « prudentes » et en évaluant les possibilités de refinancement de ses dettes.