L’IATA a revu à la hausse ses prévisions concernant l’impact de l’épidémie de Covid-19. L’association estime désormais qu’elle pourrait empêcher les compagnies aériennes de réaliser entre 63 et 113 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2020 sur leur activité de transport de passagers, selon l’ampleur de la propagation du coronavirus.
Elle s’est basée pour cela sur la courbe décrivant l’évolution du transport aérien en Asie durant l’épidémie de SRAS en 2013, assumant que le pic de la crise est atteint au maximum trois mois après la découverte du premier cas et que le retour du trafic au niveau pré-épidémie se fait en six à sept mois. Sa prévision initiale, présentée le 20 février, s’appuyait sur un scénario dans lequel la Chine et les pays ayant un lien fort avec elle en termes de liaisons aériennes seraient les principaux touchés. L’IATA estimait alors le manque à gagner à 29,3 milliards de dollars, principalement supporté par les compagnies chinoises et asiatiques. A ce stade, la réaction des marchés a déjà été un choc pour les compagnies aériennes, dont la capitalisation boursière a perdu près de 25% de sa valeur.
Cependant, la situation a évolué et 80 pays ont désormais recensé des cas. L’IATA envisage désormais deux scénarios. Le premier se base sur une propagation limitée du virus, ne touchant que les pays ayant identifié plus d’une centaine de cas au 2 mars, avec une reprise économique rapide (en V). Selon cette hypothèse, les compagnies aériennes membres souffriraient d’un manque à gagner de 63 milliards de dollars sur l’année, une baisse de 11% par rapport à leurs prévisions initiales de chiffre d’affaires, dont 47 milliards pour la région Asie Pacifique.
Dans cette situation, l’Italie verrait une baisse de 24% de la demande des passagers, la France et l’Allemagne de 10%. Le manque à gagner serait respectivement de 2,5 milliards, 2,9 milliards et 5 milliards de dollars.
Le deuxième scénario table sur la poursuite de la propagation du virus et englobe les pays avec plus de dix cas identifiés dans l’analyse (avec toujours une reprise en V après le pic de la crise). Alors, le manque à gagner pourrait atteindre 113 milliards de dollars, soit une baisse de 19% par rapport aux prévisions du début de l’année. L’IATA précise que les conséquences de l’épidémie seraient d’une ampleur équivalente à celle de la crise financière de 2008.
Alors, les compagnies de la région Asie Pacifique verrait ses prévisions de chiffre d’affaires réduites de 57,3 milliards de dollars, celles d’Europe de 43,9 milliards de dollars, celles du Moyen-Orient de 7,2 milliards de dollars et celles d’Amérique du Nord de 21,1 milliards de dollars.
L’IATA souligne que l’impact économique de l’épidémie sera atténué par une baisse de la facture carburant. Le transport aérien n’est pas le seul secteur à avoir vu la confiance baisser et les prix du pétrole ont eux aussi chuté plus rapidement que prévu : le cours du baril se situe autour des 51 dollars alors qu’il était à 68 dollars au tout début de l’année. Par ailleurs, la réduction des capacités voire l’immobilisation d’une partie de la flotte aura également un effet sur la consommation. Les politiques de hedging retarderont toutefois les effets.
« En un peu plus de deux mois, les perspectives de l’industrie dans une grande partie du monde ont pris une tournure alarmante. On ne sait pas exactement comment le virus va se développer, mais que l’impact soit limité à quelques marchés et à une perte de revenus de 63 milliards de dollars, ou qu’un impact plus large entraîne une perte de revenus de 113 milliards de dollars, il s’agit d’une crise. […] Nous vivons une situation extraordinaire », a commenté Alexandre de Juniac, son directeur général.
Alors que plusieurs compagnies européennes, réunies au sommet Airlines for Europe (A4E), avaient prédit une consolidation du secteur avec la faillite des compagnies les plus fragiles, Flybe vient de suspendre ses activités. Les autres ont pris des mesures de réduction des coûts pour faire face à la baisse de la demande, gelant les embauches, prévoyant des réductions d’effectifs et coupant dans leurs capacités (Lufthansa a notamment annoncé qu’elle allait immobiliser 150 appareils dans les prochaines semaines).